Trois principes doivent guider le traitement de la migraine. Les patients doivent consulter pour éviter la surconsommation d’antalgiques inefficaces. Le praticien doit distinguer la migraine des autres céphalées. L’efficacité du traitement, dans le respect des recommandations en vigueur, est remarquable.
EN CAS DE MIGRAINE, la consultation médicale, chez un omnipraticien et, éventuellement, chez un neurologue ou dans une consultation migraine, permet le diagnostic différentiel avec les autres céphalées et la mise en oeuvre d’un traitement conforme aux données acquises de la science. La migraine est, en effet, une maladie sous-diagnostiquée. Il s’agit d’une pathologie fréquente et méconnue. Sa prévalence est de l’ordre de 5 à 10 % chez l’enfant et de 12 à 15 % chez l’adulte selon les critères diagnostiques retenus. Mais, dans les études françaises, de 30 à 45 % des migraineux n’ont jamais consulté, ignorent leur statut de migraineux et les possibilités de prise en charge existantes. Cette situation rend compte de l’automédication fréquente dans cette population de patients, en particulier au moment des crises. Cette automédication se caractérise par une surconsommation d’antalgiques non spécifiques, les prises médicamenteuses étant souvent itératives lors d’une même crise. De plus, une fois sur deux, aucun soulagement significatif ne survient dans les deux heures. Enfin, les traitements spécifiques sont sous-utilisés, alors que leur prise d’emblée serait souvent justifiée.
Un diagnostic uniquement clinique.
Le diagnostic de migraine est uniquement fondé sur la clinique. Il est recommandé d’utiliser les critères diagnostiques établis par l’International Headache Society (IHS). Le trépied clinique qui permet d’affirmer ce diagnostic associe une évolution des céphalées par crises récurrentes, qui sont séparées par des intervalles libres de toute douleur, avec des caractéristiques sémiologiques propres et la normalité de l’examen clinique. La migraine est caractérisée par des crises de céphalées modérées ou sévères qui, en l’absence de traitement, durent de 4 à 72 heures. Elles sont volontiers pulsatiles, sont aggravées par les activités physiques de routine et peuvent être accompagnées de nausées et/ou de vomissements, de phono- et/ou photophobie. Les céphalées peuvent être précédées d’une aura, visuelle dans la grande majorité des cas, mais qui peut également être sensitive, aphasique ou, beaucoup plus rarement, motrice. Les signes de l’aura s’installent progressivement. Ils ont une durée inférieure à 60 minutes et précèdent la céphalée avec un intervalle libre ne dépassant pas 60 minutes. Parfois, les céphalées précèdent ou accompagnent l’aura.
Ainsi, le diagnostic de migraine est possible par l’interrogatoire et ne nécessite pas d’explorations complémentaires, ophtalmologiques, dentaires, oto-rhino-laryngologiques, rachidiennes ou hépatiques. Le texte émis par les experts dans le cadre des recommandations de l’Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé (Anaes, dorénavant Haute Autorité de santé, HAS) précise qu’il n’y a « pas d’indication à réaliser des radiographies des sinus, des radiographies du rachis cervical, un examen ophtalmologique, un examen orthoptique ou une échographie abdominale dans le bilan d’une migraine ». La physiopathologie d’une crise migraineuse fait intervenir des phénomènes vasomoteurs et une inflammation de la paroi artérielle, et sa composante génétique, soupçonnée de longue date, a fait l’objet d’avancées récemment accomplies.
Des traitements remarquablement efficaces.
Dans le traitement de la migraine, il faut distinguer traitement de la crise et traitement de fond. Le traitement de la crise fait appel aux médicaments non spécifiques, antalgiques et anti-inflammatoires non stéroïdiens, ou aux traitements spécifiques, triptans et dérivés ergotés. Les antalgiques ne doivent pas être associés à la caféine ou aux opioïdes, qui peuvent induire un abus médicamenteux, voire une addiction.
La classe thérapeutique des triptans est adaptée à la physiopathologie de la crise de migraine, puisqu’ils inhibent l’inflammation neurogène et la vasodilatation, par leur action sur les récepteurs 5 HT1B/D. Individuellement, chaque migraineux peut préférer l’un des triptans à un autre, les différences étant minimes. Leur nombre et leurs formes galéniques variées permettent de proposer un autre triptan mieux adapté chez un patient non répondeur à une autre molécule de la classe.
Le traitement préventif, ou traitement de fond, doit être instauré lorsque la fréquence des crises est importante et/ou la qualité de vie altérée par la maladie migraineuse. Différents médicaments ont démontré leur efficacité dans cette indication, notamment les bêtabloquants sans activité sympathicomimétique intrinsèque (métoprolol, propranolol, bisoprolol, nadolol), les antagonistes de la sérotonine (pizotifène, oxétorone), certains antagonistes du calcium (flunarizine), le valproate de sodium et l’amitriptyline. D’autres médicaments sont également efficaces dans le traitement préventif de la migraine, comme le topiramate. Ces produits ne doivent pas être associés les uns aux autres, mais essayés l’un après l’autre en cas d’inefficacité. La durée de traitement sera toujours prolongée (de 6 à 12 mois).
D’après un entretien avec le Dr Sophi Romatet-La Fay, Saint-Germain-en-Laye.
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