DANS LE VASTE panorama des risques sanitaires que dresse l’Observatoire des risques sanitaires (instituts VaeSolis et Opinion Way) pour le compte du Cnrs*, la grippe aviaire se présente comme un cas d’espèce. Ce risque a été traité sur tous les fronts médiatiques et abordé sur des registres tous plus catastrophistes les uns que les autres : l’expression du moindre scepticisme face au risque pandémique est scientifiquement incorrecte. Aujourd’hui, la perception du risque augmente avec une progression de trois points par rapport à la précédente enquête, réalisée le 15 novembre 2005. Trente pour cent des personnes interrogées déclarent spontanément avoir été « particulièrement marquées » par le sujet. Cependant, 73 % des sondés jugent que le gouvernement a fait le nécessaire pour réduire les risques d’apparition de la grippe aviaire en France (contre 60 % en 2005).
A telle enseigne qu’ils sont 57 % à estimer que le gouvernement serait capable, en cas de pandémie, d’assurer leur sécurité en leur fournissant la quantité de médicaments et de masques nécessaires, et 51 % à considérer qu’il serait en mesure de préparer les infrastructures hospitalières à l’afflux éventuel des patients (scores respectivement en progression de 2 et 12 points).
Confiance mitigée dans les pouvoirs publics.
Ces résultats sont d’autant plus remarquables que la même enquête se fait l’écho de la confiance toute relative que les Français placent dans les pouvoirs publics pour les protéger : 33 % disent que le gouvernement est bien préparé pour faire face à une crise dans le domaine de la santé, devant l’administration (29 %), les entreprises publiques (28 %) et les collectivités territoriales (25 %) ; quand on leur demande à quel acteur ils font le plus confiance pour dire la vérité, ils ne sont que 3 % à citer le gouvernement, les scientifiques arrivant en tête avec 33 %.
Rassérénés, quoi qu’il en soit, par la communication gouvernementale au chapitre de la grippe aviaire, les sondés expriment inversement leur inquiétude devant les risques liés aux changements climatiques : 68 % se déclarent inquiets pour eux-mêmes et 72 %, pour les générations futures, la politique gouvernementale en la matière ne satisfaisant pas 79 % de la population interrogée.
Les différents types de risque ont par ailleurs été notés de 1 à 10 selon le degré de crainte, ce qui permet d’établir un hit-parade des peurs : risques liés aux nouvelles technologies (5,13), risques domestiques (5,47), accidents liés aux matériels défectueux (5,58), risques médicamenteux (6,02), manipulations génétiques (6,18), risques liés au secteur industriel (6,43), catastrophes naturelles (6,44), risques liés à la malveillance (6,65), risques alimentaires (6,7), risque pandémique (6,78), risques de santé publique (7,14), risques hospitaliers (7,22) et risques liés à l’action de l’homme sur l’environnement (7,87).
Au tableau d’honneur gouvernemental, c’est le ministère de la Santé qui reçoit la palme de la crédibilité (65 %), laissant loin derrière le ministère de la Recherche (18 %) et celui de l’Environnement (13 %). Le ministère de l’Industrie recueille quant à lui un zéro pointé.
L’information jugée floue, tardive et complexe.
Ce qui fait la différence entre les acteurs, analyse l’Observatoire des risques sanitaires, c’est l’information, qui peut être payante, comme le démontre le cas de la grippe aviaire. Mais, en la matière, la forte demande de transparence et d’exhaustivité reste le plus souvent insatisfaite. L’enquête recueille des qualificatifs très péjoratifs sur la qualité de l’information : elle est traitée de floue (65 %), tardive (63 %) et complexe (60 %).
Alors que 93 % des Français préfèrent, disent-ils, « plutôt tout savoir » en matière de santé et 7 %, « plutôt ne rien savoir », 54 % estiment qu’on leur cache beaucoup de choses pour éviter la panique, 30 %, que ne sont communiquées que les informations les plus rassurantes ; 10 %, au contraire, estiment qu’on ne délivre que les informations les plus inquiétantes. Ils ne sont que 6 % à estimer qu’on leur dit tout. Dans un tel contexte de frustration, il ne faut pas s’étonner du pessimisme ambiant : 79 % de sondés pronostiquent que le nombre de crises de la santé aura tendance à augmenter dans les prochaines années, contre 9 % qui veulent croire qu’elles iront decrescendo.
* Etude quantitative réalisée en ligne auprès d’un échantillon de 1 023 personnes représentatives de la population, entre le 28 novembre et le 4 décembre 2006.
Les crises les plus marquantes
A la question quelles sont les crises qui vous ont particulièrement marqués ces dernières années, les personnes interrogées fournissent spontanément les réponses suivantes :
– le sida (36 % contre 28 % en novembre 2005),
– la grippe aviaire (30 % contre 27 %),
– la crise de la vache folle (25 % contre 39 %),
– le sang contaminé (17 % contre 20 %),
– le cancer (11 % contre 7 %).
Suivent, à moins de 10 %, le chikungunya, la canicule, le sras et les maladies contractées à l’hôpital.
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