Le sujet peut paraître déconnecté de l’exercice routinier de la médecine où l’inquiétude est bien plus de passer à côté d’un diagnostic et d’infliger une « perte de chance » au patient que d’être dans la problématique du surdiagnostic et de la surmédicalisation. Et se déconditionner de réflexes issus de 50 ans de culture de médecine triomphante – où les problématiques concernaient davantage le sous-diagnostic que le surdiagnostic – n’est pas chose facile. Pourtant, personne ne peut ignorer ce sujet. Les polémiques autour du dépistage par dosage de PSA, source de prostatectomies injustifiées, ont polarisé toutes les discussions avec les urologues. Ou, plus récemment, celles sur le dépistage par mammographies chez des patientes qu’on traite pour des cancers qui auraient spontanément disparu.
Indépendamment des faux positifs où un examen oriente vers une lésion qui n’en est pas une, les surdiagnostics concernent d’authentiques pathologies. Qui, même non traitées, n’auraient pas évolué de manière péjorative si elles n’avaient pas été diagnostiquées. Le corollaire du surdiagnostic, c’est donc le surtraitement et ce concept s’applique à tous les champs de l’activité médicale. à commencer par le dépistage dont on vient d’évoquer les travers. Mais il y a aussi ces seuils thérapeutiques que l’on abaisse au gré des études statistiques comme ceux des chiffres d’HTA passés de 160/100 mm Hg à 140/90. On connaît aussi les effets pervers de toute nouvelle technique d’exploration qui génère des incidentalomes conduisant à des explorations et des traitements excessifs. Ou les hernies discales des années 1990 opérées à tour de bras et que l’on laisse désormais évoluer de leur belle histoire naturelle. Sans compter les pathologies complexes, au diagnostic difficile, comme le TDAH chez l’enfant, ou la maladie d’Alzheimer que l’on risque fort de traiter sans bénéfice certain pour le patient.
Incontournable, le surdiagnostic ? Faut-il le considérer comme la rançon du progrès et apprendre à vivre avec ? C’est en partie vrai et chaque nouvelle technique (ou syndrome) sera susceptible de générer des surdiagnostics. Mais tout ne relève pas de la fatalité. Les progrès attendus viendront de l’affinage des
indications et des techniques de dépistage, un mouvement entamé par la HAS avec le cancer du sein. Patience et vigilance donc. Et, dans l’attente, continuons à dépister et ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain.
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