DU POINT DE VUE de la majorité, Nicolas Sarkozy est devenu le meilleur d'entre tous. Le chef de l'Etat n'a pas vraiment réussi à freiner son ascension. M. Sarkozy ne souffrira pas personnellement de l'abandon du ministère de l'Economie. C'est sûr : sauf coup de théâtre, il sera le candidat de la droite à la présidentielle de 2007. A Avoriaz, au cours du week-end dernier, le ministre a été consacré par l'UMP. Jean-Pierre Raffarin et lui ont salué les militants la main dans la main, comme s'ils s'entendaient comme larrons en foire, et le Premier ministre a prononcé un étrange discours sur la loyauté, « consubstantielle au parti majoritaire » qu'il ne peut appliquer qu'à lui-même. Il est en effet loyal au président de la République au point d'en oublier sa propre dignité. Il est loyal jusqu'à la mort politique. Il a été maintenu dans ses fonctions dans un pays qui a majoritairement exigé son départ ; rongé par les déclarations de M. Sarkozy qui, depuis la rentrée, dit tout le contraire de ce que dit M. Raffarin, il a avalé plus d'une couleuvre, notamment lorsqu'il a dû renoncer à l'étalement de la hausse du Smic sur deux ans qu'il avait annoncée prématurément ; la nomination du nouveau président d'EDF donne lieu à un de ces conflits feutrés qui caractérisent le pouvoir, chacun avançant son poulain dans l'attente de la décision présidentielle, puisque M. Raffarin ne peut pas imposer le sien ; M. Sarkozy doit quitter l'Economie en novembre, mais il annonce à TF1 une révolution sur les droits de succession, comme s'il refusait de partir avant d'avoir engagé l'essentiel de ses réformes. M. Raffarin a été raillé par toute la classe politique quand il a annoncé qu'il se présenterait aux élections sénatoriales de ce moisci, tout en prétendant que sa candidature ne signifiait nullement qu'il s'apprêtait à quitter Matignon.
Qu'est-ce qui oblige M. Raffarin à rester dans des fonctions où il a perdu son autorité et sa crédibilité, sinon son excessive loyauté au président, qui le garde là où il est pour y nommer Dominique de Villepin ou un autre le moment venu ? Pourquoi M. Raffarin se prête-t-il à ce jeu indigne des chaises musicales ? Pourquoi ne devance-t-il pas un limogeage assuré par une démission volontaire ? Pourquoi cet homme qui n'a pas démérité, pas seulement au plan de la fidélité, mais aussi dans sa conception du changement, feint-il d'ignorer, à l'instar de M. Chirac, le verdict des urnes ?
Sa constance dans l'adversité fera l'objet de quelque étude historique. Le Premier ministre n'est pas seulement modeste, il est humble. Pourtant, il vaut mieux que le sort qui lui a été réservé, mieux que les calculs de M. Chirac, mieux que la stratégie de conquête du pouvoir de M. Sarkozy. Et il vaut mieux que le discours inaudible sur la loyauté qu'il a prononcé.
> R. L.
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