10% de médecins en moins dans dix ans et le même nombre qu’aujourd’hui dans vingt ans. On pourrait résumer ainsi le constat fait par le dernier rapport de l’Observatoire national de la démographie des professions de santé. L’ONDPS qui a fait plancher les services statistiques du ministère de la santé est arrivé à la conclusion qu’en projetant les tendances actuelles*, le nombre de médecins passera de 208 000 aujourd’hui à 188 000 en 2019 (-9,7%), avant de revenir autour des 206 000 en 2030.
Pourtant, à bien y regarder, on ne peut pas se limiter à ce mouvement de yoyo pour décrire les deux prochaines décennies. D’abord parce qu’il faudra beaucoup plus de temps pour retrouver une densité similaire à celle que nous connaissons. Comme l’explique Lucile Olier, de la Drees, la population générale devrait en effet augmenter fortement dans les vingt prochaines année : par exemple, + 30% en Languedoc-Roussillon, + 25% en Midi-Pyrénnées, + 15% en Aquitaine… Résultat : malgré la reprise régulière de la croissance des effectifs médicaux à partir de 2020, en 2030 la densité médicale tournera autour de 292 médecins pour 100 000 habitants, soit moins que les 327 médecins pour 100 000 habitants que nous connaissons actuellement. Il faudrait attendre les années 39-40 pour retrouver la situation actuelle.
Le rapport de l’ONDPS que préside le Doyen Yvon Berland confirme aussi que les disparités régionales seraient peu atténuées en 2030. Mais par rapport à celles auxquelles nous sommes confrontées aujourd’hui, la carte de France serait différente: ainsi, la Bretagne, aujourd’hui dans la moyenne, ou le Limousin, nettement en dessous, pourraient être des zones de fortes densités médicales dans trente ans ; inversement, des régions excédentaires comme Paca ou l’Ile-de-France ont des chances de passer en dessous de la moyenne nationale. Par ailleurs, la France médicale de 2030 se concentreraient davantage qu’aujourd’hui autour des CHU (58% des médecins contre 54%) et un peu moins dans le rural (6% contre 8%). Enfin, outre les médecins en exercice, il faudrait compter aussi avec de gros bataillons d’internes : probablement au-dessus des 40 000 dès 2017 et au moins jusqu’en 2030, contre 20 000 de nos jours.
Le rapport de l’Observatoire table enfin sur des évolutions très différentes selon les disciplines. Il suggère que la tendance sera moins marquée pour la médecine générale, par exemple : on passera de 106 000 diplômés à 96 000 en 2019, point le plus bas pour les effectifs de généralistes, avant de retrouver le niveau actuel en 2030. Les rangs doivent s’éclaircir à l’horizon 2015 dans toutes les autres spécialités. mais ce sera plus marqué dans certaines disciplines: dans cinq ans, il faudra compter sur 36% de médecins du travail, 23% de spécialistes de réadaptation, 18% d’internistes et 17% de psychiatres en moins…
Côté propositions, on retiendra du rapport de l’ONDPS la nécessité de rapprocher les deux outils de régulation que sont le numerus clausus et les ECN : trop souvent, les écarts entre les deux sont trop importants au sein d’une même région, relève le rapport. Mais, c’est en direction de la médecine générale que le Doyen Berland réserve ses propositions les plus marquantes. Il préconise une répartition à 50-50 des postes d’internes entre celle-ci et les autres disciplines. Et surtout, il plaide pour « la création d’une véritable filière spécialisée de médecine générale de premier recours ». L’internat des futurs généralistes passerait alors à 4 ans comme dans les autres spécialités, contre trois seulement actuellement.
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