A l'occasion de leur 100e anniversaire, les Laboratoires Roche organisent une série de soirées-débats qui ont pour but « d'aller vers la société civile et d'en tirer une réflexion, et de rapprocher la science et la société qui sont en train de s'éloigner ». La dernière en date était consacrée au thème « Recherche et vie : contexte éthique et culturel », avec le parrainage de l'INSERM et du ministre de la Santé, et sous le haut patronage de la ministre déléguée à la Recherche.
Un sujet d'actualité au moment de la discussion du projet de loi sur la bioéthique. Recherche sur les cellules souches, OGM, clonage thérapeutique : l'actualité scientifique des derniers mois a montré que les pays européens n'ont pas nécessairement les mêmes approches éthiques sur ces questions. « Il y a une diversité étonnante de critères culturels dans les différents pays d'Europe, remarque Armelle Debru, professeur d'histoire de la médecine à Paris-V. Les raisons en sont d'origines religieuses (les modèles religieux sont très importants en bioéthique), les différences de conception du droit (droit romain écrit et common law) et une expérience différente de l'histoire. » Une analyse confirmée par le théologien catholique Olivier de Dinechin : « La Réforme a divisé l'Europe en deux grandes parties : l'Europe catholique, plus unifiée et hiérarchisée, et l'Europe protestante, qui a développé plus tôt l'idée de libre examen. »
Révolution culturelle
En France, la création du Comité consultatif national d'éthique a marqué un tournant. « L'extraordinaire percée scientifique de notre époque s'est accompagnée d'un grand questionnement, remarque sa vice-présidente, Nicole Questiaux. Lors de la création du comité, on a dit qu'on donnerait des avis et non pas des décisions. » La révolution culturelle de ce type d'organisme a été de promouvoir la pluridisciplinarité : « Un comité d'éthique est une instance démocratique où chacun parle en égal », analyse le sociologue Alain Ehrenberg. Dans d'autres pays, la réflexion éthique s'est déroulée selon d'autres modalités, parfois moins formelles. Par exemple, en Grande-Bretagne, les comités éthiques ont étendu la réflexion sur la définition de l'embryon à un débat vaste et ouvert à l'ensemble de la société civile.
Bonnes peurs et mauvaises peurs
La révolution génomique a introduit de nouveaux questionnements éthiques. « Pour les proches et les personnes atteintes de maladies génétiques, la recherche thérapeutique ne va jamais assez vite et ceux qui ne sont pas concernés brandissent plus rapidement la diabolisation de la science », remarque le Pr Arnold Munnich, directeur de l'unité INSERM 393 et chef de service de génétique à l'hôpital Necker. Face aux progrès de la médecine, il existe certainement de bonnes peurs et de mauvaises peurs. Il reste que ce sont elles qui « permettent de déterminer ce à quoi on tient le plus et ce qu'on redoute par-dessus tout », conclut le Pr Munnich.
Dans le prolongement de ces questionnements éthiques, l'INSERM a récemment créé une mission éthique sous forme de séminaires et d'ateliers de formation. Sa mission principale est de « mettre en évidence ce qui relève de la compréhension de la science et de la prise de décision de la société ».
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