DEUX PARTIES. Dans la loge d'un opéra. Un père et son ami médecin attendent une cantatrice qui doit interpréter, une fois de plus, « la Reine de la nuit » dans « la Flûte enchantée », de Mozart. Elle finira par arriver. On entendra son chant par le retour son. Puis on sera, après la représentation, dans un restaurant, avec les mêmes.
On sait qu'il y a eu d'autres soirs, on sait qu'il y en aura d'autres, même si la chanteuse annule deux récitals ce soir-là. Père et fille, fille prisonnière du père, aveugle, impotent, fasciné. Fille perdue incapable de faire autre chose ou de s'échapper. Le tiers ici, le médecin, qui répète sa leçon de dissection. Anatomie d'un corps comme celle de l'âme, mystère des muscles et des humeurs, scalpels qui séparent. Drôle de truc que cette pièce, disons-le abruptement, ici traduite par Michel-François Demet. C'est l'une des plus désespérantes de Thomas Bernhard, car il fouille et fouaille, il découpe, il analyse et l'on tombe à chaque fois sur le néant : rien n'existe vraiment ni la voix ni l'âme. Et la beauté suprême du chant mozartien s'élève sur le terreau de l'abjection, de la dépendance, de l'atroce solitude.
Emmanuel Daumas a réuni trois immenses interprètes dont il serait cuistre de tenter de cerner l'extraordinaire présence : Roland Bertin dans la partition presque muette du père, pas de mots mais des gestes, des mouvements, une densité du corps et quelque chose de vaporeux, une bonté et une bonté vénéneuse pourtant, Dominique Valadié avec la rigueur palpitante du personnage, Michel Fau avec ce qu'il y a de folie en ce médecin ivre de savoir et manipulateur cruel, imposent la terrible désespérance de Bernhard.
Théâtre de l'Athénée, à 19 h le mardi, 20 h du mercredi au samedi. Jusqu'au 10 novembre. Durée : 2h sans entracte. Texte à L'Arche (01.53.05.19.19). Puis en tournée en Rhône-Alpes : les 13,14, 15 novembre à la MC2 Grenoble, le 18 décembre au théâtre de Bourg-en-Bresse, etc.
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