E LISABETH GUIGOU a annoncé des mesures immédiates et des orientations dans une double direction : une meilleure reconnaissance du rôle des professionnels de santé libéraux dans le système de soins et une meilleure gestion du système de soins de ville.
Plusieurs dispositions trouveront leur traduction dans le prochain projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2002 et dans le projet de loi de modernisation du système de santé (PLMSS), dont Bernard Kouchner a affirmé qu'il serait examiné en conseil des ministres fin août. Un « comité de pilotage », comprenant les directions ministérielles et les caisses, et dont la première réunion se tiendra au début de septembre, assurera le suivi de la mise en uvre des propositions.
Voici les principales mesures acquises et les pistes de travail annoncées à l'issue de ce deuxième « Grenelle ».
Création d'un Observatoire de la démographie et des métiers de santé
La mise en place de cette instance est « consensuelle ». Elisabeth Guigou estime que l'observatoire peut être mis en place « rapidement » (dans le cadre du PLMSS), dès que sa composition et ses missions auront été « précisées ».
Zones rurales : aides à l'installation
Sur ce point, la ministre veut avancer « sans délai ». Elle a souhaité la « mise en place d'une aide à l'installation » pour les professionnels de santé libéraux, principalement les généralistes et les infirmiers, qui s'installent dans les territoires où « se pose un problème d'accès aux soins ». La création de cette aide à l'installation sera examinée dans le cadre du PLFSS 2002.
Elisabeth Guigou a demandé au directeur de l'hospitalisation et de l'offre de soins de conduire, avec les caisses, « une action dans une dizaine de départements » pour identifier la réalité des besoins (en concertation avec les professionnels de santé libéraux).
Zones urbaines sensibles : un état des lieux des actes de violence que subissent les médecins
Le gouvernement est « préoccupé » par les questions de sécurité auxquelles sont confrontés les professionnels de santé. Elisabeth Guigou a diligenté une mission de l'IGAS « pour établir un état des lieux concernant les professionnels qui font face à des actes de violence », qu'ils exercent en libéral ou en établissement de santé ou médico-social (voir page 13). Elle a promis « différentes initiatives » dans ce domaine.
Compétence : étendre l'évaluation aux paramédicaux
Le système de formation médicale continue, moribond depuis le plan Juppé, sera, comme prévu, réformé dans le PLMSS.
Concernant l'évaluation des pratiques, la ministre a souhaité étendre aux paramédicaux et aux dentistes le dispositif prévu pour les seuls médecins libéraux par le décret de décembre 1999 et qui commence seulement à entrer en application. Le PLMSS prévoira la création de l'office des professions paramédicales, dont l'une des missions consistera, à terme, à évaluer les professionnels concernés. Elisabeth Guigou a également demandé au directeur général de la santé de faire des propositions pour améliorer ce dispositif d'évaluation.
Bonnes pratiques : une charte de qualité et davantage d'« entretiens confraternels »
Elisabeth Guigou veut amplifier l'action du service médical des caisses en développant les « entretiens confraternels » entre les médecins-conseils et les praticiens libéraux (comme cela a déjà été le cas pour le diabète).
Par ailleurs, elle envisage la rédaction d'une « charte de qualité » assurant la transparence sur les procédures du service médical des caisses avec « une dizaine d'engagements clairs ».
Prévention collective : une rémunération spécifique dans le cadre conventionnel
Pour la ministre, un engagement des médecins, dans des actions de prévention collective, dans le cadre du système conventionnel, pourrait faire l'objet « d'une mise en uvre rapide par le biais d'avenants conventionnels », avec une rémunération spécifique à la clé.
Urgences : vers un forfait pour la gar de
« Il faut aller vers une garde de santé libérale », estime Elisabeth Guigou. Des « propositions concrètes » seront mises en uvre à l'automne dans ce domaine. Comme l'ont suggéré les « sages », il pourrait s'agir de la rémunération de l'astreinte libérale (pour indemniser les médecins obligés de rester chez eux à attendre d'éventuels appels) ou encore d'un forfait global rémunérant l'ensemble de la garde (modulé en fonction de la charge de travail).
La ministre considère par ailleurs que la création de maisons de garde, qui se multiplient déjà, peut être une « solution adaptée ».
Coordination des soins : concertation lancée sur le dossier médical de synthèse
Après l'échec du carnet de santé mis en place en 1996, la mission des sages a proposé la création d'un dossier médical de synthèse, avec la possibilité pour chaque patient de choisir le praticien qui le tiendra. Elisabeth Guigou ne rejette pas cette idée mais estime qu'une « concertation » est nécessaire sur ce point.
Quant aux réseaux, une mission chargée d'évaluer les dispositifs existants et de formuler des propositions sera désignée prochainement. Selon la ministre, son travail pourrait se concrétiser en deuxième lecture du PLMSS.
Objectif de dépenses : un conseil national de la santé et une approche pluriannuelle
Elisabeth Guigou veut « mieux articuler les objectifs financiers avec les priorités de santé ».
Le PLMSS prévoira une disposition permettant au Parlement de débattre annuellement des priorités de santé publique, « en amont du PLFSS ».
La proposition des « sages » de créer un conseil national de la santé pour éclairer le gouvernement sur les choix sanitaires à opérer et les conséquences en matière d'objectifs de dépenses a été acceptée. L'instauration de cette structure, dont la composition reste à préciser, sera proposée dans le PLMSS. Quant à la fixation pluriannuelle (et non plus annuelle) des objectifs de dépenses en fonction du PIB, autre suggestion des « sages », c'est également une piste de réflexion que retient la ministre. Mais, précise-t-elle, cette perspective appelle « des travaux techniques » et exige également un « débat politique ».
En clair, le système de régulation actuel n'est pas supprimé dans l'immédiat, mais Elisabeth Guigou a admis la nécessité de le remplacer à l'issue d'une phase de concertation. « Nous verrons comment le PLFSS pourra ouvrir la voie à une nouvelle méthode de régulation », a-t-elle résumé.
Vers un cadre conventionnel « à étages »
La nouvelle architecture conventionnelle est, elle aussi, renvoyée à un texte législatif « dès l'automne prochain ». Mais le principe d'une réforme est acquis et Elisabeth Guigou veut y travailler « très vite ». « Toutes les propositions plaident pour un système différencié », a résumé la ministre, même si elle n'a pas encore trouvé de consensus sur les modalités.
Elisabeth Guigou s'est dite « intéressée » par les hypothèses d'un « socle conventionnel » de base complété par différents étages.
Augmentation du C : à l'étude
Interrogée sur le principe d'une augmentation de la valeur de l'acte de médecine générale, Elisabeth Guigou ne s'est guère avancée. « Si nous pouvons aller dans cette voie, nous le ferons. »
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