Élection présidentielle

Quel programme pour l’hôpital ?

Publié le 24/04/2012
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S’il est question de santé lors de cette campagne à l’élection présidentielle 2012, notamment d’euthanasie, de recherche sur les cellules souches, ou encore de “bouclier santé”, il est un peu moins question d’hôpital. Tout juste la proposition de Nicolas Sarkozy de poster des médecins libéraux à l’entrée des urgences hospitalières a-t-elle ramené l’attention du public sur les établissements de santé. A croire que les candidats négligent les hôpitaux, au profit de thèmes plus porteurs. Mais, à l’examen des différents programmes des présidentiables, force est de constater que les propositions affluent à l’endroit des établissements de santé, et que les clivages sont bien tranchés. Analyse, candidat par candidat, du programme réservé aux cliniques, CH, CHU, CHR et CHS.

François Hollande, parti socialiste (PS) : « Je réformerai la tarification pour mettre fin à l’assimilation de l’hôpital avec les établisssements privés. »

Mesure phare : François Hollande a annoncé qu’il mettrait fin à la convergence public/privé.

Financement : Le candidat PS propose une réforme du mode de financement des hôpitaux, qui modérerait la T2A, tout en relevant les Migac.

Organisation : François Hollande veut réhabiliter le service public hospitalier.

Amont : Il est favorable au développement de pôles de santé de proximité, lesquels permettraient également de lutter contre les déserts médicaux.

Urgences : François Hollande souhaite que chaque Français puisse accéder aux urgences en moins de 30 minutes. Mais il ne dit pas comment.

IVG : Il propose la création d’un centre IVG dans chaque hôpital.

Les réactions : La FHP-MCO a exprimé sa plus vive désapprobation des propositions du candidat socialiste, et « exprime sa vive inquiétude au sujet du flou le plus total du programme santé du candidat socialiste à l’élection présidentielle, François Hollande, de sa tonalité anti-libérale et de son orientation en faveur du “tout public”».

Nicolas Sarkozy, Union pour un mouvement populaire (UMP) : « Quel est le problème de l'hôpital ? Il y a trop de gens qui viennent aux urgences. »

Proposition phare : installer une maison médicale à l’entrée de chacune des urgences hospitalières.

Organisation : Nicolas Sarkozy propose la création d’un portail Internet pour établir en temps réel le nombre de lits disponibles. A l’échelle territoriale, l’UMP propose par ailleurs la création de communautés sanitaires de territoire, ersatz des communautés hospitalières de territoire (CHT), étendues à l’ensemble des acteurs de la filière de soins (offre privée, médecins libéraux, professions paramédicales) et à l’ensemble des secteurs (hôpital public, privé, ambulatoire, médico-social...). Pour ce faire, l’UMP incite également au renforcement des prérogatives de l’Agence nationale d’appui à la performance hospitalière (Anap), qui apporte son expertise en matière de réorganisation hospitalière.

Ressources humaines : L’UMP s’engage pour une nouvelle politique de rémunération dans les établissements de santé. Le parti présidentiel souhaite la mise en place d’un mécanisme collectif d’intéressement, pour récompenser les efforts de travail en réseau, de performance ou de qualité.

Financement : L’UMP admet que la T2A « atteint aujourd’hui ses limites et peut conduire à des phénomènes inflationnistes ». L’UMP souhaite ainsi prendre en compte, dans le financement des hôpitaux, la pertinence des actes, et attribuer un bonus/malus « pour moduler l’application des tarifs prévus ».

Amont : Dans le programme de l’UMP, le cap de 1 000 maisons de santé libérales est fixé à l’horizon 2017.

Les réactions : « Depuis dix ans, les rares maisons médicales de gardes qui ont été créées n’ont jamais donné les résultats escomptés : coûteuses, sans effet sur la fréquentation des urgences. » Association des médecins urgentistes de France (Amuf).

Jean-Luc Mélenchon, Front de gauche : « Le Front de gauche est opposé à tout partenariat public-privé. »

Mesure-phare : La suppression des agences régionales de santé (ARS).

Organisation : Arrêt des fermetures des hôpitaux de proximité, des maternités et des centres de soins IVG. Abrogation de la loi HPST. Melenchon préconise également la mise en réseau des hôpitaux.

Financement : Suppression de la tarification à l’activité (T2A).

Amont : Le front de gauche fera la promotion des centres de santé.

François Bayrou, Modem : « Nous devons rendre confiance aux médecins hospitaliers et de ville en reconnaissant la primauté de l’acte médical sur les contraintes administratives. »

Mesure phare : Modifier la loi HPST pour « passer d’une logique purement gestionnaire et administrative à une construction en réseau sur le territoire qui donne la priorité aux patients et aux médecins ».

Amont : François Bayrou veut instaurer des services médicaux de proximité (urgences, maternité, soins ambulatoires).

Nathalie Arthaud, Lutte ouvrière (LO) : « Les cliniques privées [en Lorraine] poussent comme des champignons, et les malades subissent des dépassements d’honoraires de plus en plus insupportables. »

Mesure phare : Suppression des franchises médicales et du forfait hospitalier.

Organisation : Expropriation des cliniques privées. Contrôle de tout le secteur de la santé, dont l’hospitalisation, par les travailleurs du secteur, les usagers et la population.

Philippe Poutou, Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) : « 846 maternités ont fermé depuis 1975, 179 centres IVG ces dix dernières années, c’est catastrophique. Il faut stopper immédiatement ce démantèlement. »

Mesure phare : L’expropriation, sans indemnité ni rachat des actionnaires des cliniques, et leur transformation en hôpital public.

Financement : Le NPA préconise la suppression du forfait hospitalier et des franchises. Il se prononce pour l’abrogation de la tarification à l’activité (T2A), des dettes des hôpitaux, et l’interdiction de l’exercice libéral à l’hôpital.

Ressources humaines : Création de 120 000 emplois dans les hôpitaux publics et mise en place d’un plan d’urgence emploi formation.

Organisation : Suppression de la loi HPST « qui organise le regroupement des services hospitaliers, les fermetures des services hospitaliers de proximité, et la privatisation des services ».

Création d’un service public de santé organisé en trois niveaux :

- premier niveau : le centre de santé « pivot du dispositif de soins », accessible à l’ensemble de la population 24 heures/24. Ces centres, pluridisciplinaires, répondront aux urgences et aux soins de premier recours.

- deuxième niveau : les hôpitaux de proximité, disposant d’un service d’urgences, d’une maternité et d’un service de chirurgie.

- troisième niveau : les centres hospitaliers disposant de plateaux techniques diversifiés et spécialisés.

Gouvernance : Autogestion de l’hôpital par les hospitaliers, les patients et leurs représentants.

Marine Le Pen, Front national : « La tarification à l’activité à l’hôpital a eu au moins le mérite de privilégier la qualité des soins par rapport à leur quantité. »

Mesure phare : Fermeture des petites structures n’assurant pas une qualité de soins suffisante.

Organisation : présence de centres hospitaliers ou médicaux pluridisciplinaires sur tout le territoire. Maintien des structures de taille moyenne. Renforcement de la tutelle du ministère sur les agences régionales de santé.

Financement : Gel du montant du forfait hospitalier.

Amont : Développement des maisons de santé.

Jacques Cheminade, Solidarité et progrès : « La tarification à l’activité favorise les cliniques privées. »

Mesure phare: Retour au budget global.

Financement : Suppression de la T2A.

Organisation : Rétablissement d’un taux de 15 % de lits inoccupés, augmentation du nombre de lits de soins de suite et de réadaptation, et de lits de moyen-long séjour.

Ressources humaines : Augmentation de la rémunération des médecins dans les filières déficitaires (médecine générale, anesthésie, obstétrique, gynécologie et échographie). Augmentation du numerus clausus. Augmentation de 20 % du salaire des infirmiers. Formation permanente et gratuite du personnel des hôpitaux.

Amont : Création et développement de pôles et maisons de santé.

Nicolas Dupont-Aignan, Debout la République : « La comptabilité analytique, promise dans les établissements publics depuis vingt ans, doit enfin être réalisée. »

Mesure phare : Instauration de la notion d’équipes médicales.

Financement : Tarification des consultations longues, des annonces de diagnostic, des actions thérapeutiques, des évaluations des états de santé. Déconcentration budgétaire.

Amont : Création d’une maison médicale par canton, regroupant médecins et soignants libéraux.

Éva Joly, Europe Écologie-Les Verts : « Garantir la gratuité, c’est aussi éviter que certains préfèrent les urgences plutôt que la médecine de ville. »

Mesure phare : Fin de la convergence tarifaire public/privé.

Financement : Éva Joly propose un moratoire sur la T2A.

Aval : Créer des maisons et des pôles de santé.

Jean-Bernard Gervais

Source : Décision Santé: 284