LA DYSFONCTION érectile est définie comme « l'incapacité persistante ou répétée d'obtenir et/ou de maintenir une érection suffisante pour permettre une activité sexuelle satisfaisante ». Il est habituellement admis que le diagnostic est retenu lorsque les troubles ont une durée minimale de trois mois.
La fréquence de ce symptôme est très élevée. Sa prévalence moyenne est cependant variable, selon les populations étudiées et les critères retenus, estimée entre 12,9 et 28 %. Toutes les études ont mis en évidence une augmentation régulière de la prévalence de la dysfonction érectile avec l'âge, considéré comme un facteur de risque indépendant.
La dysfonction érectile peut être par ailleurs à l'origine d'une souffrance, réduisant la qualité de vie, dont les scores sont significativement altérés dans tous les domaines.
Une consultation portant sur la dysfonction érectile peut être l'occasion d'un bilan de santé. En effet, son association avec des comorbidités est fréquente. C'est notamment le cas du diabète, la prévalence de la dysfonction érectile chez ces patients variant de 20 à 67,4 % selon les travaux. Concernant les maladies cardio-vasculaires, il est actuellement admis que la dysfonction érectile est un marqueur de la dysfonction endothéliale. Sa prévalence augmente ainsi en cas de maladie cardio-vasculaire ou de dyslipidémie. Il en va de même des troubles mictionnels du bas appareil urinaire, souvent liés à une hypertrophie bénigne de la prostate.
Par ailleurs, des traitements efficaces de la dysfonction érectile sont disponibles, en particulier par les inhibiteurs de la phosphodiestérase de type 5 (Ipde5).
L'interrogatoire, au service du dépistage.
Le dépistage de la dysfonction érectile s'impose donc dans le cadre de l'activité du médecin généraliste. Mais ce symptôme est sous-déclaré, notamment en France, et sous-traité. En effet, comme l'ont montré P. Desvaux et coll. en 2004, même si une prise en charge efficace des dysfonctions érectiles est possible, elle se heurte à des difficultés d'accès aux soins. Les raisons de ces difficultés sont psychologiques ou économiques et impliquent le patient et le partenaire tout comme le praticien.
Les recommandations en vigueur, disponibles sur le site de l'association interhospitalo-universitaire de sexologie (www.aihus.fr), précisent que le diagnostic positif de dysfonction érectile est un diagnostic d'interrogatoire. La plainte du patient, souvent exprimée de manière peu claire ou détournée, doit être reformulée sous forme de question simple et directe. Par exemple, les recommandations proposent la question : «Donc, vous avez un problème d'érection (ou de manque de rigidité) pendant les rapports?» Une écoute du malade active, sans préjugé et qui respecte la confidentialité, permet de mettre le patient en confiance.
Le diagnostic des autres troubles sexuels est également de l'ordre de l'interrogatoire. Des questions simples recherchent l'existence d'un trouble du désir, de l'éjaculation ou de douleurs lors des rapports, de même que des anomalies morphologiques. L'association d'une dysfonction érectile à un autre trouble sexuel constitue un facteur de complexité pour sa prise en charge, de même que le caractère primaire de cette dysfonction, c'est-à-dire son existence depuis le début de la vie sexuelle. Dans ces situations complexes, un avis spécialisé, psychiatrique ou psychosexologique, est nécessaire.
Le consensus de Princeton précise la stratégie chez les hypertendus.
Dans certains cas, la dysfonction érectile peut être liée à une prise médicamenteuse. Il est alors nécessaire de vérifier le rapport chronologique entre la mise en oeuvre du traitement considéré comme suspect et le début des troubles sexuels pour en vérifier l'imputabilité éventuelle. Si les troubles sexuels sont apparus après la prescription d'un traitement antihypertenseur, le consensus de Princeton prévoit que «chez le coronarien, avéré ou potentiel, comme le diabétique, la décision d'interruption du traitement n'est envisageable qu'après une évaluation cardio-vasculaire par un cardiologue.» En revanche, «chez l'hypertendu jeune sansfacteur de risque, le bêtabloquant peut être arrêté avec les précautions habituelles pour une autre molécule», «sans avis cardiologique préalable». Bien entendu, l'absence de restauration de la fonction érectile après arrêt du traitement doit faire discuter sa responsabilité.
La mise en route d'un traitement, par exemple par Ipde5, suppose un suivi par le médecin traitant, ainsi qu'une information sexuelle concernant la physiologie de l'érection, le mécanisme des pannes et celui de l'anxiété de performance. Afin de dédramatiser la situation, des explications concernant la prévalence de la dysfonction érectile et l'évolution de la sexualité avec l'âge sont utiles. Des conseils de régime alimentaire, un sevrage du tabagisme et d'éventuelles autres substances addictives sont nécessaires, comme la lutte contre la sédentarité.
Au total, la prise en charge de la dysfonction érectile suppose une reformulation de la question du malade. Le médecin doit laisser de la place au silence et à la communication visuelle. Concernant le traitement antihypertenseur, enfin, l'étude TOMHS a permis d'étudier les effets à long terme des antihypertenseurs sur la fonction sexuelle. Comme l'a souligné le Pr Costa, les nouvelles molécules cardiosélectives induisent peu de dysfonction érectile.
« Prise en charge en 2007 d'un trouble de l'érection en médecine générale : quel rôle propre pour le spécialiste en médecine générale ? », session présidée par le Pr Pierre Costa (CHU, Nîmes), avec la participation du Dr Eric Marchesseau (médecin généraliste, Cabestany).
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