L'insuffisance cardiaque pose un double problème, de santé publique et de pratique médicale. En termes de santé publique, les dépenses engendrées par l'insuffisance cardiaque représentent 1 à 2 % du budget de la santé, avec 120 000 nouveaux cas par an et une population vieillissante. Sur plan médical, des améliorations pronostiques importantes ont été obtenues grâce au progrès de la prise en charge pharmacologique. Certaines formes graves restent cependant réfractaires au traitement médical et justifient une prise en charge chirurgicale, comme notamment la transplantation, qui a toutefois ses limites. C'est dans ce contexte que s'inscrit la transplantation de cellules souches.
Le concept de thérapie cellulaire est fondé sur la recolonisation par des cellules contractiles de zones myocardiques détruites par un infarctus afin d'améliorer la fonction ventriculaire gauche. Ce type de traitement s'adresse aux patients ayant une insuffisance cardiaque chronique, le plus souvent ischémique, ou aux malades à la phase aiguë d'un infarctus myocardique. Ces deux situations peuvent être opposées du point de vue physiopathologique, mais aussi en ce qui concerne le type de cellule approprié.
Le début des essais cliniques
Dans le contexte de l'insuffisance cardiaque chronique, des modèles animaux avaient prouvé la validité du concept de greffe de cellules satellites du muscle. Celles-ci peuvent être mises en culture, proliférer et devenir des myoblastes pour fusionner et reformer des fibres musculaires. Un essai clinique de phase I a été réalisé en 2000 par une équipe multidisciplinaire comportant, outre les chirurgiens, des membres du laboratoire de thérapie cellulaire de l'hôpital Saint-Louis et l'unité 582 de l'INSERM. Les résultats encourageants de ce travail ont ouvert une nouvelle voie de recherche thérapeutique. Depuis cette date, un essai clinique prospectif randomisé international est cordonné par le pôle cardio-vasculaire de l'hôpital européen Georges-Pompidou. Il permettra de déterminer si les zones greffées acquièrent une meilleure contractilité, d'évaluer l'impact de la greffe sur la fonction ventriculaire gauche globale et enfin de préciser la tolérance, notamment rythmique, de ce type de traitement.
Différentes approches testées dans l'IDM
En ce qui concerne l'infarctus myocardique en phase aiguë, des travaux ont été récemment réalisés, essentiellement en Europe, et en particulier en Allemagne. Dans le contexte de l'urgence, l'emploi de cellules musculaires périphériques n'est pas adapté, car un délai de deux à trois semaines de culture doit être respecté. C'est pourquoi certaines équipes ont proposé l'injection intracoronaire de cellules médullaires, obtenues par ponction de la crête iliaque ou du sang périphérique. Il s'agit d'études non randomisées dont les résultats semblent prometteurs. Le concept de ces travaux est séduisant, mais l'interprétation de leurs résultats est délicate en raison de leur méthodologie. D'autres équipes ont tenté de mobiliser les cellules progénitrices d'origine médullaire par administration d'un facteur de croissance (le Granulocyte Colony Strimulating Factor [GCSF]). En effet, une étude animale préliminaire avait montré la validité du concept : à la suite de ce traitement, les cellules souches sont plus nombreuses dans le sang circulant et sont attirées au niveau du muscle myocardique. Ces études utilisant le GCSF seraient concluantes. Elles portent toutefois sur de très petites séries de patients et doivent être rapprochées de travaux négatifs portant sur le primate non humain. Par ailleurs, l'injection de GCSF induit une hyperleucocytose. Or il a été montré que celle-ci est un facteur de mauvais pronostic en phase aiguë d'infarctus. Il est donc licite de s'interroger sur la tolérance clinique de l'utilisation de GCSF dans ce contexte. Enfin, il semble admis que l'efficacité clinique de la thérapie cellulaire est liée au nombre de progéniteurs se logeant dans le tissu myocardique. Dans le cadre de la mobilisation des progéniteurs médullaires, il serait utile de valider ce point.
D'autres approches thérapeutiques seraient envisageables. Elles font appel aux cellules souches embryonnaires, mais leur utilisation thérapeutique se heurte à des questions éthiques. L'emploi de cellules souches cardiaques pourrait enfin ouvrir des perspectives considérables, si leur présence dans le myocarde adulte est confirmée.
D'après un entretien avec le Pr Philippe Ménasché, hôpital européen Georges-Pompidou
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