Edward Milligan (1886-1972) et Clifford Morgan (1901-1986) ont mis au point à Londres leur hémorroïdectomie tripédiculaire ouverte. Elle consiste à réséquer les trois principaux paquets hémorroïdaires et laisser les plaies ouvertes (figure 1) pour une cicatrisation postopératoire progressive. Elle a pour intérêt d’être définitive dans la plupart des cas et son taux de complications est faible. Cependant, elle pose le problème des douleurs postopératoires ainsi que la contrainte des soins locaux et l’asthénie qui imposent un arrêt d’activité de 2 à 3 semaines (1). Cela a conduit à une seconde révolution, à savoir l’émergence des techniques mini-invasives à la fin du vingtième siècle.
De l’anopexie à la mucopexie
Ainsi, l’anopexie, mise au point par un sicilien, Antonio Longo, vers 1998, consiste à « lifter » les hémorroïdes internes vers le haut via la résection d’une collerette de muqueuse et de sous-muqueuse du bas rectum, suivie d’une anastomose agrafée à l’aide d’une pince circulaire. Une multitude d’études ont confirmé son intérêt thérapeutique. Cependant, des complications ont été rapportées, certes exceptionnelles mais graves (cellulite pelvienne, péritonite, rétropneumopéritoine…) et donc inacceptables pour une pathologie bénigne. L’intérêt des opérateurs s’est donc porté vers la technique des ligatures artérielles sous contrôle doppler.
Cette technique a été proposée aux États-Unis par un japonais, Kazumasa Morinaga, vers 1995. Elle consiste à ligaturer les artères sous-muqueuses rectales à visée hémorroïdaire par des points transfixiants pariétaux. Cependant, en raison d’une efficacité insuffisante sur le prolapsus, le geste de Morinaga et al. a été complété par la mucopexie, mise au point à Bologne par Pier Paolo Dal Monte et al. vers 2002. Elle consiste à « lifter » les hémorroïdes internes vers le haut via des surjets longitudinaux au niveau du bas rectum. Les études ont montré que cette technique était aussi efficace que l’anopexie. En revanche, ses complications sont peu fréquentes et minimes.
Hémorroïdoplastie et HeLP
L’hémorroïdoplastie au laser, initialement décrite par un turc, Ahmet Fatin Karahaliloglu, vers 2007, consiste à coaguler les hémorroïdes internes à l’aide d’une fibre laser introduite par voie sous-muqueuse. La HeLP (pour Hemorrhoidal Laser Procedure), mise au point par une Italienne, Raffaele Salfi, consiste à coaguler les artères à visée hémorroïdaire par voie endoluminale à l’aide d’une fibre laser apposée sur la muqueuse rectale. Ces deux techniques sont séduisantes par leur bonne tolérance mais la littérature sur leur efficacité clinique est encore préliminaire.
Absence de plaie et douleurs modérées
Les techniques mini-invasives ont pour avantages l’absence de plaie nécessitant des soins locaux et le caractère modeste des douleurs postopératoires. Par conséquent, l’arrêt d’activité est en général inférieur à une semaine. Ceci étant dit, ces techniques ne traitent pas les marisques. Surtout, elles peuvent se solder par un échec précoce ou une récidive de la pathologie, d’autant plus fréquente que le prolapsus était important en préopératoire. Ces techniques peuvent donc nécessiter un nouveau geste chirurgical, éventualité rare après une hémorroïdectomie tripédiculaire (2).
En pratique, les techniques mini-invasives peuvent être proposées en cas de prolapsus modéré et/ou de saignements ayant résisté au traitement instrumental, a fortiori s’il s’agit de patients redoutant les douleurs postopératoires et/ou n’ayant pas la disponibilité pour l’arrêt d’activité imposé par les suites de l’hémorroïdectomie. En revanche, cette dernière reste indiquée en cas de volumineux prolapsus, de thromboses externes récidivantes, a fortiori en cas de marisques résiduelles gênantes, et/ou chez les patients désireux d’un geste définitif (3).
(*) Groupe hospitalier Paris Saint-Joseph, institut Léopold Bellan, service de proctologie médicochirurgicale (Paris)
(**) Hôpital européen Georges-Pompidou, service de gastroentérologie (Paris)
(1) de Parades V, et al. Une brève histoire du traitement de la pathologie hémorroïdaire : de l’Égypte antique à nos jours… Presse Med 2011;40:960-5
(2) Fathallah N, et al. Les techniques mini-invasives : un vent nouveau en chirurgie hémorroïdaire. Sang Thrombose Vaisseaux 2016;28:231-5
(3) Higuero T, et al.Guidelines for the treatment of hemorrhoids. J Visc Surg 2016 ; 153 : 213-8.
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