PRATIQUE
• Troubles de la marche
Il s'agit d'une octogénaire adressée aux urgences en raison de l'aggravation récente de troubles de la marche. Cette femme est née en 1920. Ses antécédents sont relativement chargés, avec une hypertension artérielle, des troubles du rythme cardiaque, un ulcère gastrique, une hernie hiatale et une maladie arthrosique sévère, puisqu'elle a déjà fait l'objet il y a quinze ans de la mise en place d'une prothèse totale du genou droit, il y a sept à huit ans d'une prothèse totale de hanche bilatérale et il y a quatre à cinq ans d'une prothèse totale de l'épaule droite.
Depuis un an, elle se plaint de troubles de la marche qui ont été rattachés à un possible syndrome du canal lombaire étroit : importance du terrain arthrosique, caractère mécanique des rachialgies, et sensation de jambes en coton avec fourmillements...
• QCM 1 : le syndrome du canal lombaire étroit se traduit habituellement par toutes les affirmations suivantes, sauf une, laquelle ?
a) Une claudication intermittente douloureuse.
b) Une sensation de fatigabilité des membres inférieurs à la marche.
c) Des radiculalgies atypiques bilatérales des membres inférieurs.
d) Une réduction progressive du périmètre de marche.
e) L'effet antalgique de l'hyperextension.
• Réponse QCM 1 : e
Le syndrome du canal lombaire étroit ou rétréci est fréquent chez le sujet âgé, habituellement responsable d'une sensation de fatigabilité, de lourdeur des membres inférieurs, apparaissant à la marche et conduisant progressivement à une réduction du périmètre de marche. On constate parfois des radiculalgies, souvent atypiques, tronquées, mais bilatérales. La position en antéflexion peut soulager les malades (classique signe, dit du caddy). Le principal diagnostic différentiel est celui d'une claudication intermittente d'origine vasculaire, d'où l'importance de l'examen des pouls périphériques.
• Suite de l'observation
Depuis trois semaines, les troubles de la marche s'aggravent avec majoration des rachialgies, d'où la prescription d'un antalgique majeur. Les troubles de la marche avec somnolence sous antalgiques majeurs sont responsables de plusieurs chutes et incitent son médecin à adresser l'intéressée aux urgences.
L'état général apparaît conservé (apyrexie). Les dorsolombalgies sont plutôt mécaniques, sans irradiation particulière. La patiente rapporte, en outre, une tendance à la constipation (mais elle est sous sulfate de morphine depuis quelques jours) et une aggravation de la perte des urines (certes, chez une octogénaire...). L'examen rachidien est normal et l'examen neurologique est assez pauvre, avec toutefois un déficit moteur assez global et modéré aux membres inférieurs, des réflexes ostéotendineux faibles et symétriques et un Babinski bilatéral.
• QCM 2 :suspectant un possible syndrome de compression médullaire lente débutant, quelle(s) étiologie(s) devez-vous de principe évoquer chez une telle patiente ?
a) Métastases rachidiennes.
b) Tassement vertébral ostéoporotique.
c) Myélopathie cervicarthrosique.
d) Décompensation aiguë d'un syndrome du canal lombaire étroit.
e) Spondylodiscite infectieuse.
• Réponses QCM 2 : a-c-e
De principe, il faut évoquer la possibilité de métastases révélatrices, notamment d'un cancer du sein (responsabilité du tassement vertébral et/ou d'une épidurite néoplasique). Classiquement, l'ostéoporose n'est jamais responsable de troubles neurologiques déficitaires. L'imagerie aujourd'hui permet une bonne analyse sémiologique différentielle entre un tassement vertébral d'origine maligne versus un tassement d'origine bénigne, notamment ostéoporotique (respect ou non du mur postérieur ; caractère homogène ou non de la trame osseuse. La myélopathie cervicarthrosique serait fréquente, mais, en pratique, il est toujours difficile de retenir la responsabilité des signes observés par les radiographies. D'où l'intérêt, aujourd'hui, des examens complémentaires, comme l'IRM, les explorations neuro-électrophysiologiques. Le syndrome du canal lombaire étroit n'est jamais responsable d'un syndrome pyramidal. Il existe cependant une association possible entre canal lombaire étroit et canal cervical étroit (sujet habituellement plus jeune dans le cadre de rétrécissements canalaires d'origine congénitale). Une spondylodiscite est toujours possible, bien que rare, avec rôle pathogène de la destruction corporéale et/ou de l'épidurite.
• QCM 3 : chez cette patiente, les radiographies standards sont interprétées comme normales. Quel examen demandez-vous alors ?
a) Scanner cervical et encéphalique.
b) Scintigraphie osseuse couplée technétium-gallium.
c) IRM cervico-encéphalique.
d) Electromyogramme des membres inférieurs.
e) IRM dorsolombaire.
• Réponse QCM 3 : e
L'IRM rachidienne est aujourd'hui l'examen de choix pour explorer en urgence toute suspicion de syndrome de compression médullaire. Dans le cas présent, l'IRM va conduire à suspecter un mal de Pott D8-D9. Le diagnostic d'infection tuberculeuse sera confirmé par la ponction biopsie discovertébrale retrouvant des granulomes épithélioïdes et gigantocellulaires, et l'isolement de Mycobacterium tuberculosis. En outre, les explorations complémentaires retrouveront une milliaire tuberculeuse associée (radiographie et scanner thoraciques évocateurs avec présence de BK dans les expectorations).
• QCM 4 : le mal de Pott (une ou plusieurs affirmations vraies) :
a) ne s'observe aujourd'hui que chez des sujets qui ont « échappé » à la vaccination par le BCG ;
b) s'associe toujours à une autre localisation tuberculeuse ;
c) est volontiers responsable de signes neurologiques radiculaires et/ou médullaires ;
d) est aujourd'hui de bon pronostic, notamment chez le sujet âgé ;
e) nécessite en moyenne douze à dix-huit mois d'antibiothérapie.
• Réponses QCM 4 : c-e
En l'absence de contexte de transplantation (immigration), le mal de Pott s'observe aujourd'hui volontiers chez des sujets âgés, antérieurement vaccinés par le BCG. Dans près de la moitié des cas, il n'y a aucune autre localisation tuberculeuse. La spondylodiscite tuberculeuse, ou mal de Pott, s'accompagne volontiers de signes neurologiques, mais qui ne justifient que très rarement aujourd'hui une solution chirurgicale (évolution volontiers favorable sous simple traitement médical). Chez le sujet âgé, le mal de Pott conserve encore un sombre pronostic avec fréquente altération de l'état général, association des complications liées au décubitus prolongé. L'antibiothérapie reste au minimum de douze mois et, bien souvent, de dix-huit mois.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature