Le Big Data (Megadonnées chez les Canadiens) désigne l’exploitation de milliards de données pour en tirer des principes d’actions commerciales ou d’intérêt général. L’Open Data, sujet sur lequel le ministère de la Santé a lancé le débat à l’automne, consiste quant à lui à réfléchir aux données de santé qui doivent être partagées, entre qui et pour quoi faire. Ces débats semblent aujourd’hui encore assez éloignés du quotidien des hôpitaux. Néanmoins, l’enjeu des données est aussi le leur et ce, plutôt à court terme.
Producteur et consommateur de données
L’hôpital est en effet un producteur et un fournisseur de données « car soigner, c’est produire une masse d’informations qui relèvent notamment de la biologie des patients et qui sont rassemblées, entre autres, dans le dossier patient, explique le Dr Vincent Leroux, médecin de santé publique aux hôpitaux de Saint-Maurice, professeur à l’École centrale de Paris et vice-président de Centrale Santé. Plus ces informations vont être informatisées, plus elles vont être possiblement mises en partage. » « Les hôpitaux publics et privés participent déjà, sur le plan légal, à la création et au partage de données anonymisées, car ils les transmettent dans le cadre du Programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI), rappelle Jeanne Bossi, secrétaire générale de l’Agence des systèmes d’information partagés (Asip) de santé. Ils produisent et fournissent également des données via la recherche épidémiologique ou biomédicale que peuvent mener les médecins chercheurs. » Mais l’hôpital est aussi un consommateur de données économiques et sensibles. « Il se doit d’avoir une lecture de l’environnement et sa manière d’exploiter les données constitue le système nerveux de la santé », estime le Dr Leroux.
Transformer les données en connaissances
Quels usages les hôpitaux peuvent-ils faire de ces données ? « Pour mieux soigner aujourd’hui, il faut avoir une connaissance plus fluide et plus pertinente afin de trouver le bon traitement, le bon sujet et le bon système de soins, affirme le Dr Leroux. Il s’agit d’un moyen d’intégrer la nécessaire interprofessionnalité. » Et d’expliquer : « Lorsque des données sont collectées, il faut les transformer en connaissances et en actions, ce qui implique également une réflexion médicale sur la pratique. L’objectif est de savoir pour comprendre, de comprendre pour apprendre et d’apprendre pour agir. Toutes ces questions sont devant nous. »
Si le questionnement éthique et déontologique est déjà posé, il n’en reste pas moins que, souligne le Dr Leroux, « le questionnement professionnel n’est pas simple car les données peuvent impacter la déontologie mais aussi les pratiques professionnelles et médicales ». Comme l’indique l’Asip Santé, les établissements ont à portée de mains des indicateurs leur permettant de s’interroger sur le développement de leur service ou sur des coopérations à mettre en place. Les données peuvent aussi être exploitées dans les domaines de la prévalence, de la veille ou encore de la sécurité sanitaire. « L’hôpital est un acteur historique de soins et aujourd’hui, on parle de parcours de soins. L’hôpital va donc être encore plus connecté à son environnement et intégrer son territoire », prédit le Dr Leroux.
Mais l’arrivée de ce flux de données nécessite une réflexion approfondie en amont. Il s’agit d’un sujet de recherche, d’innovation, d’usage et de technologie. Mais aussi d’un facteur de compétitivité par rapport à des projets de recherche. Derrière l’exploitation des données de santé, « il y a un enjeu politique et industriel de connaissances, d’innovation mais aussi de coproduction et de protocoles professionnels », conclut le Dr Leroux.
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