Arts
SON INSPIRATION était ethnographique et humaniste. Son geste de sculpteur ancrait dans la matière « les différents types humains » qui étaient « au moment de se fondre dans un seul et même peuple », ainsi qu'il l'exprimait. Sa technique s'affirmait personnelle, généreuse, fastueuse, et tranchait avec les marbres sobres et immaculés de ses congénères exposés aux salons du Second Empire. Charles Cordier fut justement remarqué dans l'un de ces salons en 1848, l'année même de l'abolition de l'esclavage en France, avec la présentation du buste de « Saïd Abdallah, de la tribu de Mayac, royaume de Darfour », un Soudanais qu'il avait rencontré un an auparavant et dont il avait fait son modèle. « Ce fut une révélation pour tout le monde artistique, confia l'artiste. (...) Mon genre avait l'actualité d'un sujet nouveau, la révolte contre l'esclavage, l'anthropologie à sa naissance. » Sept ans plus tard, à l'Exposition universelle de Paris, Cordier dévoilait un couple de Chinois en bronze doré, argenté et émaillé qui fit sensation.
Fasciné par l'ailleurs et par l'orientalisme, mu par une démarche scientifique et par une curiosité toujours en éveil, le sculpteur effectua différentes missions en Algérie (1856), en Grèce (1858) et en Egypte (1866 et 1868). Il en revint avec des images qui devaient donner naissance à « Capresse des colonies », « Femme hydriote », « Juive d'Alger », « Nègre du Soudan », et avec des représentations d'Arabes, mauresques ou mulâtresses, dont il sculpta les traits dans le marbre, rehaussant leurs expressions en exploitant la polychromie naturelle de ce matériau (le marbre-onyx d'Algérie), jouant avec les patines argentées, dorées ou colorées du bronze et utilisant parfois l'émail.
L'exposition, outre les sculptures de Cordier, dévoile une série de bustes du laboratoire d'anthropologie du musée de l'Homme et livre des explications techniques (exemples de patines argentées, procédés d'assemblage des marbres...). Une magnifique page d'ethnographie artistique.
« Charles Cordier, sculpteur. L'autre et l'ailleurs », musée d'Orsay (niveau médian, salles 67 et 68). Quai Anatole-France ou rue de Lille. Paris 7e. Tél. 01.40.49.48.14. Jusqu'au 2 mai.
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