L'industrie du sexe explose, notamment sur Internet. Ce n'est pas sans répercussions familiales, sociales et financières pour les individus dépendants.
La dépendance à la cyberpornographie est la plus fréquente des addictions sexuelles, surtout chez les hommes, les femmes recherchant généralement un contact moins virtuel. Mais d’autres comportements addictifs sexuels existent : la multiplication des aventures, la masturbation qui peut atteindre 15 épisodes par jour, la fréquentation répétée des prostituées...
Le concept de cette addiction sans drogue (elle est dite comportementale) a été introduit par Carnes en 1980 (1). Certes, introduire la notion de « normalité » dans les pratiques sexuelles, dans le domaine de l'intime, est toujours difficile et répond comme souvent à la loi du plus grand nombre.
Comme toute dépendance, elle est caractérisée par une envie répétée et irrépressible dont la réalisation procure un soulagement passager. La fréquence et l'impossibilité du sujet à se soustraire à son addiction sont parfois source de grandes souffrances. Non seulement il existe un sentiment de culpabilité vis à vis du ou de la partenaire mais également des répercussions importantes dans la vie sociale et professionnelle, car l'activité et l'énergie consacrées aux fantasmes et éventuellement à leur réalisation sont de grands mangeurs de temps. Une étude parue en 2012 (2) rapportait que sur 207 patients souffrant de troubles addictifs sexuels, 17 % avaient perdu au moins une fois leur travail, 27% avaient eu une IST, 39% avaient rompu avec leur partenaire et 78% avaient eu une panne sexuelle.
Une industrie prospère
« Sex » ou « sexe » est le mot le plus tapé sur les moteurs de recherche. En France, il n'existe pas de données précises quant à la fréquence de ce comportement. Mais aux Etats-Unis par exemple, la cyberpornographie en 2006 rapportait 4 milliards de dollars et la fréquence des adeptes en 2008 était estimée entre 3 et 6% avec un ratio de 3 hommes pour une femme. 25 millions d'Américains passent de 1 à 10 heures par semaine accrochés à des sites de sexe et 7 millions plus de 10 heures. Mais c'est la Corée du Sud qui détient la palme des connexions suivie du Japon et de la Finlande. L'industrie du sexe prospère sur Internet !
Il n’y a pas d’évidence entre l’addiction sexuelle et le harcèlement quoique certaines comportements comme le "frotteurisme" peuvent se révéler limites... L’introduction des addictions sexuelles dans le domaine médical permet au patient de sortir d'un environnement coupable. L'addiction n'est plus considérée comme un vice ou un péché mais comme une dépendance qui entraîne souffrances et donc accès aux soins. Parfois, les patients en parlent directement du fait de la souffrance secondaire aux comportements addictifs mais, comme dans toute difficulté sexuelle, la plupart n'osent pas l'évoquer spontanément au médecin qui peut s'aider pour le diagnostic du test de dépistage de l'addiction sexuelle (TDAS-Carnes). Ce test est composé de 25 questions balayant le vécu sexuel des parents, les peurs du patients, ses sentiments de culpabilité, ses souffrances quotidiennes...
Entretien avec le Dr Gilles Formet, sexologue, psychiatre, psychanalyste. Avignon.
(1) Carnes P. Out of the Shadows : understanding Sexual Addiction
(2) Rory C et al. Report of Findings in a DSM-5 Field Trial for Hypersexual Disorder. J Sex Med 2012;9:2868–2877.
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