Maladie de Parkinson (3/4)

Quand la symptomatologie se complique

Publié le 11/10/2006
Article réservé aux abonnés
1276098205F_Img236892.jpg

1276098205F_Img236892.jpg

Majoration du handicap

Signes associés, signes axiaux, troubles cognitifs et comportementaux: d’autres symptômes apparaissent à des degrés variables au cours de l’évolution de la maladie de Parkinson ou parfois même au stade initial (par exemple, les signes végétatifs, les douleurs, les troubles du sommeil) et entraînent progressivement une majoration du handicap fonctionnel. L’installation des signes axiaux constitue ensuite un tournant évolutif de la maladie car ils sont peu dopasensibles, voire doparésistants. Leur intrication avec des troubles cognitifs et comportementaux, souvent sous-évalués, est très fréquente, ces derniers justifiant des mesures thérapeutiques spécifiques.

Signes neurovégétatifs

Ils restent très inconstants d’un patient à l’autre. L’hypersialorrhée est classique, l’hyperséborrhée donne un aspect de visage pommadé. Les troubles digestifs sont plus fréquents : constipation, motricité gastrique et oesophagienne ralenties, entraînant une symptomatologie de type hernie hiatale avec hoquet.

L’hypotension artérielle orthostatique est souvent tardive, tantôt asymptomatique, tantôt responsable de phénomènes lipothymiques, plus rarement de syncopes lors du lever ; elle est parfois aggravée par les traitements antiparkinsoniens. Les troubles vésico-sphinctériens se traduisent par des impériosités mictionnelles et des incontinences urinaires épisodiques s’associant à des troubles de la libido et une impuissance. Des troubles vasomoteurs des extrémités s’associent à un oedème des membres inférieurs s’accompagnant d’un aspect cyanosé des téguments. Certains troubles neurovégétatifs sont plus rares : dérèglement de la température corporelle, crises sudorales. L’amaigrissement reste aspécifique, cependant, le poids reste un bon indice de surveillance clinique. Un amaigrissement rapidement progressif est très souvent contemporain d’une majoration de la symptomatologie extrapyramidale.

Troubles sensitifs

La description de ces troubles est très variable d’un sujet à l’autre, sous forme de crampes, d’engourdissement, de picotements, de sensations de chaleur ou de froid des extrémités, localisés du côté où la symptomatologie extrapyramidale prédomine, plus fréquents en cas de syndrome dépressif et de troubles du sommeil. La localisation est variable, intéressant la cheville, le poignet, les épaules, le rachis cervical et lombaire (ces douleurs sont influencées par l’absence de mobilité). L’expression clinique des douleurs est dans certains cas déconcertante pour le praticien, faisant craindre une pathologie viscérale associée se traduisant par des douleurs digestives (spasmes abdominaux), thoraciques (sensation d’apnée), orales (douleurs et brûlures endobuccales), voire génitales (douleurs vaginales ou du petit bassin) en l’absence de pathologie locorégionale. De tels symptômes s’intègrent dans le cadre des fluctuations non motrices. Un tableau d’impatience des membres inférieurs est souvent rapporté (paresthésies ou sensations de brûlures des membres inférieurs apparaissant au décubitus, calmées par la marche et responsables parfois d’une insomnie). Les douleurs peuvent être liées également aux symptômes moteurs de la maladie, souvent en étroite relation avec les fluctuations motrices et les dyskinésies ; elles sont alors plus volontiers contemporaines des manifestations dystoniques.

Troubles du sommeil et de la vigilance

Le sommeil peut être perturbé par les troubles sphinctériens (pollakiurie) et par des difficultés motrices nocturnes et des mouvements anormaux (dystonie, crampes). L’insomnie est initiale ou en seconde partie de nuit. Un syndrome des jambes sans repos peut gêner l’endormissement. Les patients souffrent volontiers de cauchemars, avec des rêves animés, correspondant à des troubles du comportement en sommeil paradoxal. Pendant la journée, la somnolence diurne est parfois favorisée par les traitements (agonistes dopaminergiques).

Les signes axiaux

Ces signes moteurs sont tardifs mais peuvent passer progressivement au premier plan, notamment l’akinésie, qui prédomine alors sur la musculature axiale, s’associant à une hypophonie, une dysarthrie, des troubles de la déglutition et de la marche. Celle-ci est perturbée par des épisodes de blocages, de piétinements sur place, de festination, qui, associés à l’instabilité posturale, sont source de chutes répétées, annonçant la période de déclin moteur. Les déformations du rachis accentuent également l’altération du contrôle postural, avec dans certains cas l’installation d’une camptocormie, caractérisée par une flexion majeure du tronc sur le bassin, aggravée par la station debout et la marche, et qui disparaît totalement en décubitus dorsal ou lorsque le patient prend appui sur un support.

Troubles cognitifs

Les déficits cognitifs concernent principalement le traitement des informations visuospatiales, la mémoire, l’attention et les fonctions exécutives (élaboration d’un plan d’action ou d’un concept, capacité de résistance à l’interférence, coordination de différentes actions) qui peuvent évoluer vers une démence dans plus de 40 % des cas.

Troubles du comportement

La dépression est fréquente, de même que l’anxiété, avec même parfois des attaques de panique. L’apathie se caractérisera par une perte d’intérêt et une moindre participation aux activités habituelles, un manque d’initiative, une tendance à l’abandon prématuré des activités entamées, une indifférence à soi et aux autres, ainsi qu’un émoussement affectif.

Le traitement dopaminergique peut provoquer chez certains patients des hallucinations à la fois élémentaires et parfois critiquées (hallucinoses), mais aussi de véritables délires (en particulier de type paranoïaque). La survenue de ces complications peut être l’indicateur d’une évolution vers un état démentiel associé. Le risque de survenue de ces troubles psychiques augmente avec l’âge, la sévérité des troubles moteurs, des signes dépressifs et des troubles cognitifs. Enfin, un syndrome de dysrégulation dopaminergique a été décrit plus récemment, se caractérisant par une addiction sévère à la dopamine, le patient réclamant des doses de plus en plus importantes de traitement, s’associant à d’autres manifestations addictives : hypomanie ; hypersexualité ; jeu pathologique ; manipulation répétitive, examen, collection et rangement interminable d’objets communs.

> Pr LUC DEFEBVRE Chru, Lille

Source : lequotidiendumedecin.fr: 8028