LES CINEASTES chinois trouvent souvent leur inspiration dans un épisode de leur histoire personnelle, totalement dépendante de l’histoire collective. Wang wiaoshuai, 39 ans, était adolescent au début des années 1980 et vivait dans une région rurale de l’Ouest, dans la province de Guizhou. Comme ceux de son héroïne, ses parents avaient dû quitter Shanghai dans les années 1960 pour aller s’installer sur la «troisième ligne de défense». A cette époque, le gouvernement chinois, craignant un conflit avec l’Union soviétique, avait demandé aux usines les plus importantes stratégiquement de s’installer à l’intérieur du pays et avait appelé les ouvriers des grandes villes à aller y travailler. La vie y était très dure. Aussi, quand la Chine commença à s’ouvrir sur le monde, avec une toute relative libéralisation, bien des ouvriers déracinés se mirent à rêver de retourner dans leur cité d’origine.
C’est le cas du père de Qinghong, qui ne veut pas que ses enfants connaissent le même sort que lui et rêve pour eux d’études universitaires. Mais la jeune fille, qui a toujours vécu à Guiyang, y a ses amis et y connaît ses premiers émois amoureux, ne partage pas ses rêves. «Quand nous avons quitté Guiyang, se souvient le réalisateur, je pleurais dans la voiture.» Dans le contexte historique, le conflit des générations prend une allure particulière. Wang Xiaoshuai montre bien les transformations en marche de la société chinoise, et leur poids sur les destinées individuelles. Lui-même a connu des difficultés avec le Bureau du cinéma et ses deux premiers films n’étaient pas autorisés. Heureusement, «les choses ont évolué dans le bon sens dans l’industrie chinoise du cinéma» et il peut travailler à peu près librement. On a vu notamment en France « Beijing Bicycle », récompensé au festival de Berlin en 2001.
Le film de deux heures prend son temps pour décrire ces jeunes pris entre leur désir de vivre au présent et les regrets et les rêves de leurs parents. Le portrait de Qinhong (Gao Yuan Yuan) est particulièrement réussi. Un épisode de l’histoire chinoise personnifié avec émotion. Touché, le jury du dernier festival de Cannes lui a décerné son prix.
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