Congrès-Hebdo
Le Pr S. Hirsch rappelle que les interrogations ne concernent pas les patients symptomatiques dont le nombre de CD4 est inférieur à 200 et la charge virale supérieure à 100 000 copies : la quasi-totalité des études montre que ces patients doivent être traités et que cela modifie le pronostic.
A l'autre extrême, il y a débat pour savoir si l'on doit traiter les patients asymptomatiques qui ont plus de 350 CD4 : la plupart des études disent qu'il faut traiter entre 350 et 200 CD4 et les consensus vont dans ce sens. Ainsi, en France, le rapport Delfraissy ne recommande pas de traiter quand le nombre de CD4 dépasse 350, « sauf cas particuliers ».
Cependant, plusieurs études plaident pour un retour à des traitements plus précoces. Ainsi, F.J. Palella (Chicago) a présenté une étude à long terme suggérant que les patients traités entre 350 et 500 CD4 ont une mortalité moindre (- 40 %) et plus de chance de négativer leur charge virale que les patients traités entre 200 et 350 CD4. F.J. Palella mais aussi les Prs S.D. Holmberg (CDC Atlanta), K.A. Liechtenstein (Denver) et D.V. Havlir (San Francisco) font remarquer que de toute façon, la restauration immunovirulogique est plus rapide et meilleure quand le taux de CD4 est plus élevé en début de traitement. Ces auteurs vont plus loin, en faisant remarquer que certains arguments mis en avant pour différer le traitement doivent être pour le moins relativisés : l'étude HOPS (HIV Outpatient Study), notamment, a montré qu'un taux bas de CD4 est facteur de toxicité des traitements et, en particulier, de lipodystrophies.
Par ailleurs, la même étude montre que le nombre des comprimés pris par les patients chaque jour a notablement diminué. De plus, d'autres études suggèrent que le développement des résistances est plus important quand les CD4 sont bas à l'instauration des traitements. Enfin, les auteurs font remarquer que l'accroissement significatif de l'arsenal thérapeutique fait moins craindre l'épuisement des recours, en cas de traitement précoce.
Entre 200 et 350 CD4
Il reste, souligne le Pr S. Hirsch, que les consensus s'en tiennent à un début de traitement entre 200 et 350 CD4/mm3. Dans cette fourchette relativement large, on prendra en compte plusieurs facteurs : la rapidité du déclin des CD4, la charge virale (tout le monde est d'accord pour traiter à plus de 100 000 copies), les désirs et la tolérance du patient au traitement.
Le Pr S. Hirsch remarque un paradoxe : si la décision de commencer ou non le traitement repose sur des études rétrospectives ou de cohorte - et l'on ne voit pas comment cela changerait - on observe une multiplication des essais contrôlés, comparant les protocoles de première ligne. En effet, chez les patients asymptomatiques, de nombreuses associations sont actuellement proposées. Le Pr S. Hirsch passe en revue les essais les plus récents présentés dans ce domaine, à commencer par l'essai ACTG 384 qui confirme que toutes les associations n'ont pas la même puissance. Dans cette étude, l'association AZT + 3TC + éfavirenz apparaît comme le « gold standard » auquel devrait se comparer les nouvelles options thérapeutiques.
Par ailleurs, toute association n'apporte pas un gain d'efficacité comme le montre l'étude 2NN présentée à Boston. Dans cet essai qui porte sur 1 216 patients naïfs on constate, en effet, qu'en association à deux analogues nucléosidiques (d4T, 3TC), la névirapine (NVP) et l'éfavirenz (EFV) font quasiment jeu égal mais que l'association de deux non nucléosidiques augmente le nombre des échecs thérapeutiques (p < 0,001), des effets secondaires (p < 0,001) et des arrêts de traitement.
Le Pr S. Hirsch mentionne également les résultats encourageants rapportés, toujours chez les patients naïfs, avec le ténofovir (inhibiteur nucléosidique acyclique) et avec le lopinavir.
L'atazanavir
Enfin, le Pr S. Hirsch mentionne l'atazanavir, antiprotéase toujours en cours d'évaluation, qui réunit plusieurs atouts pour le traitement de première ligne des patients naïfs : une monoprise quotidienne (facteur d'observance) et un profil lipidique original et favorable (cholestérol total et LDL, triglycérides), ce qui est particulièrement important dans le cadre d'un traitement précoce et prolongé. Par ailleurs, l'analyse phénotypique et/ou génotypique de 26 échappements virologiques à l'atazanavir montre que la résistance à cette antiprotéase correspond à un profil de mutation unique (ISOL), distinct de celui des autres antiprotéases. De plus, des essais in vitro suggèrent que cette originalité permet non seulement de respecter l'efficacité des autres antiprotéases mais peut-être d'augmenter - voire de restaurer (R.J. Colonno et coll.) - la sensibilité à ces alternatives. Une propriété qui serait, elle aussi, déterminante en première intention.
En conclusion, le Pr Hirsch constate que la prise en charge initiale des infections à VIH asymptomatiques chroniques est encore loin d'être « standardisée », même si les démarches se rapprochent progressivement. Mais l'important n'est-il pas que, globalement, ces « tâtonnements » aient permis de transformer le pronostic de la maladie ?
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