PAR LE Dr GABRIEL THABUT *
LA BRONCHOPNEUMOPATHIE chronique obstructive (BPCO) est la première indication de transplantation en France et dans le monde, représentant environ 40 % des transplantations réalisées en 2006 d'après le registre international de transplantations pulmonaires (1,2). Parmi les différentes complications pouvant émailler l'évolution des patients après transplantation, la majorité sont communes à toutes les transplantations pulmonaires quelle que soit l'indication, alors que certaines complications se développant sur le côté natif sont l'apanage des patients BPCO recevant une greffe monopulmonaire infection, complication d'une bulle – saignement, infection, distension, pneumothorax – (1). D'après les données du registre international, la survie médiane est de 5 ans, avec une survie à 1 an de 80,6 % et une survie à 3 ans de 63,8 % (2). Ces résultats sont légèrement supérieurs à ceux observés chez les patients souffrant d'hypertension artérielle pulmonaire ou de mucoviscidose. D'un point de vue fonctionnel, les tests spirométriques après greffe bipulmonaire montrent des valeurs normales ou subnormales du VEMS, alors qu'après greffe monopulmonaire ils se situent en règle entre 40 et 50 % de la théorique. Malgré ces résultats, les patients greffés en unipulmonaire peuvent mener, en dehors de toute complication, une vie normale. Les tests d'effort après greffes bipulmonaire et monopulmonaire montrent surtout des résultats comparables en termes de distance parcourue lors du test de marche et en termes de consommation en oxygène atteinte au maximum de l'effort (45-50 % des valeurs théoriques). Compte tenu des complications potentielles de la greffe et de la survie observée, il importe de sélectionner soigneusement les patients BPCO candidats à la transplantation pulmonaire.
Ni trop tôt, ni trop tard.
Certains critères de sélection ont été assouplis, voire abolis au fil du temps : une corticothérapie systémique, la présence d'une ostéoporose, les antécédents de chirurgie thoracique, la dépendance de la ventilation mécanique, l'impossibilité de déambuler et de réaliser un réentrainement à l'effort, la colonisation préalable des voies aériennes par des bactéries multirésistantes ou par aspergillus ne sont plus des contre-indications formelles à la transplantation pulmonaire.
La transplantation pulmonaire est indiquée chaque fois que la BPCO se complique d'une insuffisance respiratoire terminale avec une espérance de vie limitée et/ou une qualité de vie médiocre. Compte tenu des résultats au long cours de la transplantation pulmonaire (voir supra-), il n'est pas raisonnable d'inscrire les patients trop tôt dans le cours évolutif de leur maladie. Les inscrire trop tard leur fait, en revanche, courir le risque de décès sur liste. Le critère classique d'inscription est la survie prévisionnelle inférieure à 2 ou 3 ans, mais il est très difficile de prédire cette survie de façon fiable pour un patient donné. Il faut noter que le bénéfice de la transplantation pulmonaire sur la survie des patients BPCO reste débattu. Il existe néanmoins des études récentes démontrant que la transplantation pulmonaire est à même d'améliorer la survie de patients correctement sélectionnés. Indépendamment du bénéfice sur la survie, plusieurs études ont démontré une amélioration de la qualité de vie après transplantation pulmonaire chez les patients BPCO. La qualité de vie des patients est donc un critère majeur de sélection en vue d'une transplantation. Le degré de dyspnée d'effort, la rapidité de la dégradation au fil du temps, la fréquence et la sévérité des épisodes de décompensation, la profondeur de la désaturation en oxygène du sang artériel à l'effort seront des éléments importants de la décision d'inscription. Pour les patients ayant une maladie emphysémateuse prédominante, la chirurgie de réduction de volume pulmonaire, quand elle est envisageable, doit être discutée avant la transplantation.
Quel type de d'intervention faut-il proposer aux patients BPCO : transplantation mono- ou bipulmonaire ? Si les deux procédures aboutissent à des capacités d'effort voisines, des études menées à partir du registre international de transplantation pulmonaire ont démontré que la survie après transplantation bipulmonaire était légèrement supérieure à la survie après transplantation monopulmonaire, cette différence étant comprise entre 4 et 6,3 % à 5 ans (3). Cet avantage semble disparaître chez les patients de plus de 60 ans, et une attitude raisonnable est de proposer des transplantations bipulmonaires aux patients de moins de 60 ans et de réserver les transplantations monopulmonaires aux patients plus âgés.
* Service de pneumologie B et transplantation pulmonaire, hôpital Bichat, Paris. (1) Arcasoy SM, et coll. N Engl J Med 1999;340(14):1081-91. (2) Trulock EP et al. J Heart Lung Transplant 2007;26(8):782-95. (3) Thabut G et al. Lancet 2008;371(9614):744-51.
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