C'EST « UNE MOLECULE bien connue, un produit dopant classique depuis une vingtaine d'années », commente Jacques de Ceaurriz, directeur du Lndd de Châtenay-Malabry, qui risque de mettre un terme définitif à la carrière du jeune Argentin : l'étiléfrine, un sympathomimétique vasoconstricteur, indiqué pour le traitement de l'hypotension artérielle et utilisé par les sportifs pour augmenter leur force contractile, leur débit et leur travail cardiaques, a été décelée dans les urines de Mariano Puerta lors de l'expertise réalisée le 5 juin dernier, après sa défaite en finale du tournoi de Roland-Garros contre l'Espagnol Rafael Nadal.
Selon le correspondant à Buenos Aires du journal « l'Equipe », la contre-expertise demandée par le champion, réalisée au Lndd, a confirmé la présence de cette substance. Le Dr de Ceaurriz indique que les examens ont été effectués il y a trois semaines et, comme c'est la règle, les résultats ont été notifiés à la Fédération internationale de tennis, à l'Idtm (International Doping Tennis Management) ainsi qu'au Cpld (Conseil de prévention et de lutte contre le dopage). Le joueur doit maintenant comparaître devant un tribunal composé de trois membres indépendants qui devront dire s'il peut se prévaloir de « circonstances atténuantes ». Son entourage allègue la nécessité qu'il avait eue, au mois de juin, de « soigner une grippe » survenue à l'époque des faits.
Positif en 2003 au clenbuterol.
Il y a deux ans, il avait déjà été frappé d'une suspension de neuf mois, entre le 1er octobre 2003 et le 1er juillet 2004, après un contrôle positif au clenbuterol, un stéroïde anabolisant. Ce précédent expose le joueur, qui, à 27 ans, semblait promis à de hautes destinées tennistiques, à une suspension à vie. Une telle mesure constituerait une première dans les annales du tennis professionnel.
L'événement serait d'autant plus retentissant qu'il frapperait l'actuel dixième joueur mondial au classement ATP, passé de la 400e place au début 2004 à la neuvième, au mois d'août dernier. Il s'ajouterait à une liste déjà longue de joueurs argentins convaincus de pratiques dopantes, après les condamnations de Guillermo Canas (suspendu deux ans en 2005), Martin Rodriguez (privé de ses points ATP et de ses primes en 2003), Guillermo Coria (suspendu sept mois en 2001) et Juan Ignacio Chela (suspendu trois mois en 2000).
Conseiller scientifique du Cpld, le Pr Michel Rieu confirme que la procédure engagée relève de la fédération internationale, le Cpld étant destinataire des procès-verbaux d'analyse pour le cas où la fédération, en première ligne pour prononcer les sanctions, ne réagirait pas dans un délai de quatre mois. « L'étiléfrine, précise-t-il, dont la durée de vie est assez brève, ainsi que la fenêtre de détection, expose à des risques de myocardite et à des troubles du rythme. » En France, elle est disponible uniquement sous forme intraveineuse. Mais elle reste commercialisée dans d'autres pays d'Europe sous forme de gouttes et de comprimés.
C'est la deuxième fois en moins de trois mois que des résultats positifs en provenance de Châtenay-Malabry « transpirent » dans les médias, court-circuitant les instances ad hoc. Le 23 août, « l'Equipe » avait révélé que des échantillons d'urine de Lance Armstrong, septuple vainqueur du Tour de France, prélevés lors du Tour 1999, contenaient de l'EPO. L'analyse effectuée aposteriori à des fins scientifiques par le Lndd ne respectait pas les protocoles légaux des contrôles antidopage. Le président du Comité international olympique, Jacques Rogge, avait estimé que le cycliste texan n'avait pas à prouver son innocence dans cette affaire. Il avait cependant souhaité que l'Agence mondiale antidopage (AMA) impose des règles strictes en matière de contrôles rétroactifs, se déclarant pour sa part favorable à ce type d'investigations.
Tenu au respect de l'anonymat des échantillons qu'il analyse, le Lndd aurait-il été alors été pris en défaut ? Dans le cas d'Armstrong, le président de l'AMA, Richard Pound, l'a lui-même disculpé de ces accusations, en désignant Hein Verbruggen, alors président de l'Union cycliste internationale, comme l'auteur de la fuite.
En ce qui concerne l'affaire Puerta, les informations ont été divulguées depuis Buenos Aires, ce qui oriente clairement l'origine des informations vers l'entourage de Puerta, ou les instances de la fédération argentine, les uns et les autres ayant reçu il y a quelques jours la notification de la contre-expertise du Lndd.
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