DÉBUT SEPTEMBRE, l’hospitalisation privée a appris par voie de presse que le ministère de la Santé s’apprêtait à baisser les tarifs de l’ensemble des cliniques françaises, en raison d’un dérapage de leurs dépenses observé en début d’année.
Furieuse, la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP) a tenté d’obtenir l’annulation de cette menace, faisant valoir que cette décision ne tient pas compte de l’évolution de l’activité des établissements. Les discussions ont duré trois semaines. Elles se soldent pour les intéressés par deux nouvelles. Une bonne : les établissements privés spécialisés en psychiatrie et en soins de suite et de réadaptation (SSR) échappent à la sanction. Et une mauvaise : les cliniques MCO (médecine, chirurgie, obstétrique) verront leurs tarifs diminuer de 3,1 % d’octobre à décembre, à l’exception des tarifs ayant fait l’objet d’une réévaluation ces derniers mois (notamment en obstétrique et en soins palliatifs), lesquels restent inchangés. Soit une baisse tarifaire moyenne de 2,6 % dans le champ MCO privé.
L’objectif, explique le ministre de la Santé, est de «préserver l’équilibre des comptes sociaux». «Cette régulation, ajoute Xavier Bertrand, ne remet en cause ni la réforme de la tarification à l’activité [T2A] , ni le principe d’un objectif de dépense médecine chirurgie-obstétrique (Odmco) unique», commun aux deux secteurs hospitaliers, public et privé.
Mais pour la FHP, l’argumentaire n’est guère recevable. «On va se battre pour obtenir une régulation commune aux deux secteurs», indique son président, Ken Danis.
« On n’est pas chez les marchands de tapis ».
Sur le terrain, la mesure passe mal. «En année pleine, une baisse tarifaire de 3% représente 1,37million d’euros de recettes en moins pour mon établissement», explique le Dr Joseph Bakhos, qui dirige l’une des plus grosses cliniques de France, la clinique de l’Anjou, à Angers. Des investissements devront être repoussés. «Imposer cela sans concertation est inacceptable, tempête le Dr Bakhos. Hors de question d’accepter le cadeau fait aux SSR et à la psychiatrie: l’affaire a été mal négociée, on n’est pas chez les marchands de tapis.»
La clinique de l’Anjou, avec l’ensemble des cliniques des Pays de la Loire, s’est lancée dans une grève administrative illimitée. D’autres régions font de même. Le Dr Richard Bataille, président de la FHP Pays de la Loire, s’en explique : «Le 19septembre, on n’a pas fait la grève des soins, comme le demandait la FHP nationale, car les cliniques n’ont pas les moyens de s’arrêter. Mais on reste très mobilisé localement. Chaque semaine, on se rend à l’ARH [agence régionale de l’hospitalisation] , et on demande la preuve de notre dérapage en volume d’actes, et les chiffres du secteur public. Car on ne peut pas nous reprocher de travailler trop si les hôpitaux travaillent moins.»
Rude période pour les cliniques qui, en quelques mois, voient s’accumuler les décisions défavorables : une double baisse tarifaire, la réintégration de dispositifs médicaux dans leurs tarifs, sans oublier la polémique, cet été, sur les actes frontières. L’année 2006 est la plus noire pour l’hospitalisation privée depuis vingt-cinq ans, assure même le président d’un syndicat régional de la FHP. A mots couverts, certains chefs d’établissement s’interrogent : «Sommes-nous bien défendus au plan national?»
Mais pour le président de la FHP Pays de la Loire, le fond du problème est ailleurs. «La FHP n’a pas de marge de manoeuvre car il n’y a plus, comme avant, de négociation possible sur nos tarifs avec le ministère de la Santé, dit le Dr Bataille . La T2A devait amener plus de transparence, mais on s’assoit sur la loi: il n’y a ni convergence tarifaire entre les hôpitaux et les cliniques, ni fongibilité des enveloppes hospitalières public-privé, sinon les hôpitaux devraient également voir leurs tarifs baisser de 3%. Il y a un vrai problème de régulation. Or là, ça crève les yeux qu’à l’approche des élections, on essaye de faire plaisir à l’hôpital.»
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