S I le psoriasis modéré peut être contrôlé par des topiques, nombreux sont les patients chez lesquels il faut recourir à des traitements plus agressifs - ultraviolets, immunosuppresseurs - dont on connaît les effets délétères. De plus, le psoriasis récidive habituellement peu de temps après l'arrêt des immunosuppresseurs.
On sait maintenant que les lymphocytes T sont impliqués dans de nombreuses maladies auto-immunes, y compris le psoriasis ; ce qui a conduit à de nouvelles approches d'inactivation des lymphocytes. Une de ces approches est de bloquer l'interaction entre le récepteur CD2 (exprimé dans tous les sous-groupes de lymphocytes T) et son ligand LFA-3. La protéine recombinante alefacept (Amevive, Biogen) empêche cette interaction ; il s'en suit une inhibition de l'activation des cellules T et une apoptose de sous-groupes critiques de ces cellules. Il était légitime de tester cette molécule dans le psoriasis en plaques : dans les lésions, la plupart des cellules sont des CD4 et des CD8 mémoires (CD45RO+).
Le « Alefacept clinical study group » américain a donc conduit une étude multicentrique randomisée contre placebo en double aveugle. Dans ce travail, 229 patients ayant un psoriasis en plaques ont reçu l'alefacept par voie I.V. (0,025, 0,075 ou 0,150 mg/kg) ou un placebo, cela une fois par semaine pendant douze semaines, avec un suivi supplémentaire de douze semaines.
Avant traitement, le score moyen de sévérité et d'extension des lésions était compris entre 14 et 20 dans les deux groupes (0 = pas de psoriasis ; 72 = maladie la plus sévère possible).
Réduction du score de gravité et d'extension
Les résultats sont encourageants :
- l'alefacept s'est montré bien toléré et non immunogène ;
- la réduction du score a été plus importante dans les groupes alefacept (35 %, 53 % et 53 % dans les groupes 0,025, 0,075 et 0,150 mg) que dans le groupe placebo (21 % ; p < 0,001) ;
- douze semaines après l'arrêt du traitement, 28 patients qui avaient reçu l'alefacept seul étaient encore sans (ou presque sans) lésion ;
- l'alefacept a réduit dans le sang périphérique le nombre des lymphocytes T effecteurs mémoire (CD45RO+), et cette réduction était corrélée à l'amélioration du psoriasis.
« Un traitement par alefacept pendant douze semaines est associé à une amélioration du psoriasis chronique en plaques ; quelques patients ont une réponse clinique prolongée après l'arrêt du traitement. L'alefacept cible de façon sélective les lymphocytes T effecteurs mémoire CD45RO+, ce qui suggère qu'ils ont un rôle dans la pathogénie du psoriasis », concluent les auteurs.
« On a besoin de nouveaux traitements dans le psoriasis », souligne un éditorialiste (Richard Granstein, New-York). « Bien que les résultats de l'étude alefacept soient prometteurs, il est trop tôt pour dire comment cet agent peut être au mieux combiné avec d'autres traitements ou quelle activité il aura contre le rhumatisme psoriasique ou le psoriasis pustuleux. »
D'autres traitements dirigés contre les cellules T sont en cours de développement : l'anticorps monoclonal humanisé contre CD11a (hu 1124), le CTLA-4-Ig (porteur de fusion), agents immunomodulateurs (infliximab et etanercept, tous deux dirigés contre le TNF alpha).
« Aucun de (ces) nouveaux traitements (...) n'est encore approuvé par la FDA dans le psoriasis (...). Le développement d'agents qui interfèrent avec des étapes spécifiques de la pathogénie des maladies comme le psoriasis représente une approche rationnelle dans la quête de médicaments plus sûrs et plus efficaces. Si ces hypothèses sont confirmées, l'alefacept pourra devenir un exemple de succès de cette approche », conclut l'éditorialiste.
« New England Journal of Medicine » du 26 juillet 2001, pp. 248-255 et 284-287.
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