IL N’EST PAS difficile d’accumuler les arguments en faveur d’une accélération de la campagne électorale. Le quinquennat, qui a abrégé le mandat présidentiel, exige que les principaux mouvements politiques se dotent le plus tôt d’un chef de file ; en cultivant le débat et en essayant de rédiger le programme avant de désigner son candidat, le PS nie une contrainte inéluctable de la Vè République : le patron, une fois qu’il est incontesté, n’est pas vraiment lié par la plate-forme du parti et, loin de s’adapter à elle, il la modifie en fonction de ses propres convictions ou besoins. La politique qu’engagerait la gauche si elle l’emportait en 2012 ne serait pas la même si Dominique Strauss-Kahn, Ségolène Royal ou Martine Aubry l’incarnent.
La cote formidable de DSK.
En même temps, le délai exigé, pour son confort personnel, par DSK, est sans précédent : on n’a jamais vu à ce jour un candidat non déclaré demander qu’on lui permette de finir un mandat à l’étranger avant de se présenter à la présidence de la République. Et si Mme Aubry lui a concédé ce délai, au risque d’indigner bon nombre de militants, c’est parce que sa propre décision est suspendue à celle de DSK. Mme Royal, comme d’habitude, a mis les pieds dans le plat, mais, cette fois, elle a la logique de son côté.
Le directeur du Fonds monétaire international tire néanmoins son privilège d’une formidable cote de popularité. Tous les sondages indiquent qu’il écrase ses concurrents au PS et qu’il distancerait largement Nicolas Sarkozy. Personne n’ose, à gauche, le critiquer parce qu’il représente, pour l’opposition actuelle, une chance qu’elle ne saurait négliger. S’il se décide, fût-ce en novembre 2011, c’est-à-dire juste avant Martine Aubry, il est probable qu’il laminerait ses concurrents et concurrentes. Pour le moment, et, paradoxalement, parce qu’il ne dit rien, il est irrésistible. Dès qu’il ouvrira la bouche, il aura mangé son pain blanc et sera ralenti dans sa course.
LES MANOEUVRES ACTUELLES AU SEIN DU PS NE L’AFFAIBLIRONT PAS EN 2012
L’idée de Mme Royal, c’est qu’en commençant plus tôt que lui sa campagne, elle parviendra à lui prendre des électeurs. Cependant, conformément au schéma qu’il applique actuellement, moins il lui apportera la contradiction, plus il sera crédible. Elle risque donc de bénéficier d’un avantage illusoire, qui disparaîtra quand DSK entrera en lice.
L’autre question porte sur la volonté de DSK de faire campagne. De toute évidence, il n’est pas à l’aise dans les batailles de tréteaux. Il n’a pas envie de discutailler sur des points mineurs qui lui apparaissent comme indignes de sa stature, il n’a pas envie de perdre un match oratoire, ni envie de prendre des coups. Il peut craindre le culot de Mme Royal, qui a déjà tenté de l’humilier en lui proposant un job de Premier ministre comme si elle était déjà élue président. Car, comme n’importe qui, il a un passé qui n’est pas exempt d’affaires susceptibles d’être rappelées par la droite. Il n’est pas impossible que son aversion pour les miasmes et remugles du combat politique soit plus forte que les chances, très sérieuses, qu’il a d’accéder à la magistrature suprême. En outre, il connaît M. Sarkozy. Il sait que celui-ci se battra avec autant de détermination qu’en 2007. Il sait que, malgré son avance, et comme le dit le président lui-même, l’élection se jouera à 50-50, le clivage idéologique entre les deux France ayant été creusé par la crise économique et financière.
Toutes ces choses sont vraies aujourd’hui, elle seront vraies dans un an. Les candidatures précoces, sinon le respect pour les électeurs, n’obligent ni DSK ni Mme Aubry, à se déclarer plus tôt ; les mouvements tactiques de Mme Royal décrivent un caractère que nous connaissons bien désormais et qui ne nous surprend plus : elle croit plus à l’offensive qu’à la guerre des tranchées, mais elle le fait avec une telle arrogance que sa crédibilité ne cesse de s’amenuiser. Le seul risque que pose le comportement de Mme Royal, c’est qu’elle parvienne à faire émerger une candidature « mineure », notamment celle de François Hollande, qui monte dans les sondages et ne se présente pas seulement pour témoigner mais parce qu’il croit avoir ses chances. Si DSK ne se présente pas, il n’est pas dit que l’électorat de gauche ne préférera pas un Hollande qui maîtrise fort bien ses dossiers à une Aubry compassée et à une Royale fantasque.
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