De notre correspondante
EN L'ABSENCE de toute cardiopathie structurelle, un petit pourcentage de jeunes athlètes présentent des anomalies électrocardiographiques prononcées, notamment des ondes T négatives diffuses et profondes. Une question diagnostique se pose : ces anomalies représentent-elles la première expression d'une cardiomyopathie génétique, qui peut éventuellement poser des risques à long terme, ou ne sont-elles que l'expression bénigne de l'entraînement athlétique intensif ? Plusieurs études n'ont pu répondre à cette question.
Pelliccia et coll. ont examiné, à partir de la base de données de l'Institut de médecine et science du sport à Rome (Italie), les ECG de dépistage de 12 550 athlètes italiens qui avaient été évalués à l'institut entre 1979 et 2001.
Ils ont identifié chez 1 % de cette vaste population d'athlètes (soit 123 sujets sur 12 550) de nettes anomalies de la repolarisation à l'ECG, c'est-à-dire des ondes T négatives profondes (au moins 2 mm) et diffuses (dans au moins trois dérivations excluant D3, et principalement dans les dérivations précordiales antérieures et latérales V2 à V6).
Or, parmi ces 123 athlètes, 84 ne présentaient initialement aucun signe de maladie cardiaque structurelle (à l'échocardiographie et après d'autres tests diagnostiques).
Le devenir de 81 de ces athlètes (ceux évalués au moins deux fois) a donc été examiné et comparé à celui d'un groupe témoin de 229 autres sportifs à l'ECG normal, appariés pour l'âge, le sexe et la durée de suivi.
Ces 81 athlètes (63 hommes, 18 femmes) étaient âgés en moyenne de 23 ans à la première évaluation (de 15 à 38 ans) et de 32 ans à la dernière évaluation (de 17 à 63 ans) et pratiquaient divers sports de compétition (football, aviron, course etc.), 70 % à un niveau national ou international. Quatorze athlètes avaient participé aux jeux Olympiques. Les résultats, après un suivi moyen de 9 ans, montrent que 5 des 81 sportifs (6 %) porteurs d'anomalies de la repolarisation ont développé ultérieurement une cardiomyopathie (aux âges de 24, 27, 32 et 50 ans).
Plus préoccupant encore, 2 de ces 5 athlètes ont encouru un accident cardiaque majeur (taux de 0,3 % par an) sans signe avant-coureur. L'un a survécu à un arrêt cardiaque dû à une myocardiopathie hypertrophique ; l'autre est mort subitement à l'âge de 24 ans d'une cardiomyopathie ventriculaire droite arythmogène. A l'inverse, aucun des 229 athlètes témoins avec ECG normal n'a déclaré une cardiomyopathie ou présenté un accident cardiaque au cours des neuf ans de suivi moyen.
Un risque extrêmement accru.
Les auteurs peuvent conclure ainsi : «Les anomalies marquées de la repolarisation sont rares, mais elles sont associées à un risque extrêmement accru d'apparition ultérieure de cardiopathie structurelle... Cela souligne l'importance de conduire un examen diagnostique plus approfondi et de poursuivre la surveillance clinique chez les athlètes entraînés qui présentent de tels ECG.»
«Inversement, la découverte d'un ECG normal lors du dépistage avant la participation aux compétitions peut être considérée comme une preuve raisonnablement fiable d'exclusion d'une maladie cardiaque potentiellement létale».
« New England journal of Medicine », 10 janvier 2008, p. 152, Pellicia et coll.
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