« QUAND VOUS FUMEZ à côté d'un non-fumeur, il fume aussi. » Avec ce slogan, pour la première fois en France, une campagne télévisée de prévention cible le tabagisme passif. Les deux spots seront diffusés huit cents fois entre le 17 octobre et le 8 novembre. « Cette campagne doit faire prendre conscience aux fumeurs des risques accrus qu'ils font prendre à leur entourage. Il ne s'agit pas d'opposer deux clans, mais plutôt de responsabiliser les fumeurs », explique Philippe Douste-Blazy. Pourtant, le message joue largement sur le registre de la culpabilisation. Plusieurs milliers de cigarettes empilées dans différentes pièces d'un pavillon symbolisent la quantité de cigarettes inhalées passivement par une fillette dans une famille de fumeurs. Dans l'autre, sur le même scénario, c'est un salarié non fumeur qui subit la fumée de ses collègues. « Il s'agit de faire évoluer les représentations sociales sur le tabagisme passif », plaide Philippe Lamoureux, président de l'Inpes (Institut national de prévention et d'éducation pour la santé), qui est chargé de cette campagne.
L'interdiction fait recette.
Qu'en est-il justement de la perception du tabagisme passif par les Français ? Un sondage* réalisé à la demande du ministère au début d'octobre livre des résultats surprenants. Entre deux tiers et trois quarts des personnes interrogées sont en faveur d'une interdiction totale de fumer dans les entreprises (74 %), les restaurants (72 %), les cafés (64 %) et les discothèques (60 %). Et, résultat jugé encourageant, pour la moitié d'entre eux, la raison invoquée est d'ordre sanitaire ( « La fumée est toxique pour les personnes fragiles et les salariés qui passent de longues heures dans ces lieux »), avant la « gêne » ou l'hypocrisie dans l'application actuelle de la loi.
Commentant ces chiffres, le Pr Gérard Dubois, président de l'Alliance contre le tabac, affirme que « partout dans le monde où l'interdiction du tabac dans les restaurants et les bars a été décidée les chiffres d'affaire de ces établissements ont augmenté ». Ce que confirment les sondés : la moitié d'entre eux ne changeraient pas leurs habitudes de sortie en cas d'interdiction du tabac, 28 % iraient plus souvent au café et 18 % moins souvent. Et pour le restaurant, 30 % y iraient plus souvent et 13 % moins souvent.
L'interdiction totale, comme en Suède ou en Irlande, est un pas que ne semble pas prêt à franchir Philippe Douste-Blazy pour l'instant, préférant « la responsabilisation et la liberté individuelle ». En revanche, grâce à la loi de santé publique du 9 août 2004, il souhaite un renforcement des contrôles. La loi donne notamment compétence aux médecins inspecteurs de santé publique, aux ingénieurs du génie sanitaire, aux inspecteurs des affaires sanitaires et sociales, mais aussi inspecteurs du travail pour rechercher et constater le non-respect des mesures de protection des non-fumeurs. Elle élargit également aux associations familiales et de consommateurs le droit d'agir en justice, réservé jusqu'alors aux seules associations de lutte contre le tabagisme. Un bilan sera réalisé d'ici le mois de février.
Enfin, pour aider les entreprises à respecter la loi Evin, le ministère, l'Inpes et l'association Droit des non-fumeurs ont réalisé un kit d'information composé d'affiches, de brochures et de signalétique permettant d'indiquer clairement de distinguer les zones fumeurs. Il sera envoyé à 37 000 entreprises.
Oui à l'interdiction dans les lieux publics
A la demande du ministère de la Santé, TNS Sofres a interrogé les Français (1 008 individus de 15 ans et plus) sur le tabac dans les lieux publics.
Une majorité de Français estiment que la loi sur l'interdiction de fumer hors des zones fumeurs est bien appliquée dans les entreprises (61 %) et les restaurants (58 %), mais ils sont beaucoup moins nombreux à dire qu'elle l'est dans les cafés (28 %) et les discothèques (13 %).
Moyennant quoi ils se prononcent majoritairement pour une interdiction totale de fumer, de 59,5 % de personnes favorables à l'interdiction dans les discothèques à 73,9 % quand il s'agit des entreprises (64,3 % pour les cafés et 71,5 % pour les restaurants).
Les arguments retenus pour prôner l'interdiction totale de fumer dans ces lieux publics : « La fumée est toxique pour les personnes fragiles et les salariés qui passent de longues heures dans ces lieux » (51,6 %) ; « La loi actuelle n'est pas appliquée, une interdiction totale ce serait plus clair e» (24,4 %) ; « La fumée me gêne » (22,8 %).
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