PRATIQUE
Le tableau typique associe un syndrome infectieux sévère avec une fièvre à 39-40°, des frissons, une prostration, pouvant mimer un syndrome pseudo-grippal ; des signes fonctionnels orientant vers le bas appareil urinaire : dysurie souvent marquée (l'oedème prostatique obstruant l'urètre), pollakiurie, brûlures mictionnelles. On note parfois une hématurie, un écoulement urétral ; des douleurs sus-pubiennes ou périnéales.
La rétention aiguë d'urines fébrile, très caractéristique, et les formes septicémiques d'emblée où les signes généraux sont au premier plan constituent des formes cliniques sévères imposant l'hospitalisation.
- Les formes sans signes urinaires ou signes très discrets : le syndrome pseudo-grippal domine le tableau, et s'il n'y a pas de prescription d'antibiotiques, la fièvre persiste. Le toucher rectal est indispensable chez l'homme devant une fièvre ou un syndrome pseudo-grippal.
- Les formes avec peu de signes généraux, où la fièvre est modérée et les signes urinaires au premier plan.
- Les formes décalées : le syndrome pseudo-grippal précède de 24 à 48 heures les signes urinaires ;
- L'association à une épididymite aiguë : accompagnant la prostatite d'emblée, ou de façon décalée. Parfois, c'est l'épididymite qui est la plus manifeste : devant toute épididymite doit être réalisé un toucher rectal à la recherche d'une prostatite associée.
Le diagnostic doit être évoqué devant les signes précédents.
Le toucher rectal, réalisé avec précaution, trouve une prostate augmentée de volume, très douloureuse, chaude, succulente. L'examen s'assure de l'absence de globe vésical.
La numération formule sanguine montre une hyperleucocytose, des prélèvements bactériologiques (ECBU, hémocultures en fonction du tableau) sont pratiqués.
La bandelette urinaire (leucocyturie, hématurie microscopique, nitrites) est intéressante en urgence.
Il s'agit d'une urgence infectieuse, essentiellement en raison du risque d'évolution septicémique, mais également en raison du risque d'évolution vers l'abcédation ou la chronicité.
D'un point de vue urinaire, il faut en premier lieu s'assurer de l'absence de rétention aiguë d'urines : son existence impose un drainage par cathéter sus-pubien ; la mise en place d'une sonde est interdite en raison du risque de décharge bactériémique. En cas de dysurie marquée, une échographie sus-pubienne peut être proposée en cas de doute clinique.
D'un point de vue infectieux, les prélèvements doivent être faits sans retard :
- ECBU (quelques gouttes d'urine peuvent permettre la réalisation d'un test à la bandelette mettant en évidence des nitrites, des leucocytes, une hématurie microscopique) ;
- hémocultures selon l'intensité du tableau ;
- prélèvement d'un écoulement urétral, parfois déclenché par le toucher rectal diagnostic ;
- NFS et créatininémie.
Par ordre de fréquence, les germes les plus souvent en cause sont :
- bacilles Gram négatif : E. coli, Proteus, Klebsiella, Pseudomonas ;
- germes Gram positifs : streptocoques, entérocoques, staphylocoques (seraient plus souvent en cause en cas d'origine hématogène) ;
- plus rarement : Clostridium perfringens, Bacteroïdes fragilis (après biopsies prostatiques surtout) ;
- très rare : gonocoque, cependant en recrudescence ;
- discutés : Chlamydia, Corynebacterium, Mycoplasma.
Les prélèvements faits, l'antibiothérapie doit être débutée sans retard.
Quels antibiotiques utiliser ? Les fluoroquinolones, les céphalosporines de troisième génération, les nouvelles bêtalactamines, les aminosides en association. Le cotrimoxazole n'est pas recommandé en première intention (10 % des E. coli sont résistants).
Traitement des formes sévères
Dans un premier temps, bithérapie parentérale associant jusqu'à obtention de l'apyrexie une fluoroquinolone ou une céphalosporine de 3e génération à un aminoside, avec relais par voie orale secondairement.
Traitements des formes moins graves
Une mono-antibiothérapie (fluoroquinolones, céphalosporine de 3e génération) est suffisante.
L'antibiothérapie doit être poursuivie au minimum un mois, voire 6 semaines.
Les anti-inflammatoires peuvent être prescrits quelques jours en cas de dysurie marquée.
Une bonne hydratation (> 1,5 l/jour) est recommandée.
Des bains de siège chauds apportent parfois un léger bénéfice.
A distance de l'épisode infectieux doit être recherchée une cause favorisante.
En premier lieu urologique : vérification de la filière cervicoprostatique (débitmétrie, échographie des voies urinaires avec mesure du résidu postmictionnel, voire UIV avec clichés mictionnels).
Les causes les plus fréquentes sont : l'hypertrophie bénigne de la prostate, la sténose urétrale, les vessies neurologiques, les tumeurs vésicales infectées, les calculs infectés des voies urinaires, les malformations urétérales ou urétrales.
Des foyers dentaires, cutanés, digestifs ou ORL seront également recherchés en cas de signes d'appel.
L'évolution sous traitement est le plus souvent favorable avec sédation rapide de la fièvre et des troubles mictionnels.
En cas de persistance de troubles mictionnels, le drainage des urines par cathéter sus-pubien peut être indiqué.
En cas de persistance de signes infectieux, on doit rechercher une épididymite et un abcès prostatique. Celui-ci peut être suspecté par l'existence d'une zone fluctuante au toucher rectal et affirmé par l'échographie transrectale sous forme d'une zone hypoéchogène nécessitant alors son drainage soit par voie transrectale, soit par voie transurétrale.
L'éventuelle cause favorisante doit être recherchée afin d'éviter la récidive.
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