Utilisation du préservatif féminin

Proposer des essais de pose

Publié le 08/03/2004
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DEPUIS UNE quinzaine d'années, plusieurs études ont montré l'innocuité quasi totale du préservatif féminin en polyuréthane, de même que son efficacité au moins égale à celle du préservatif masculin. « En France, il a été commercialisé courant 1998-1999, mais il demeure peu diffusé et mal connu des personnels de santé », affirment pourtant les auteurs de l'étude publiée dans le « BEH ».
Pendant deux ans (199-2001), ils ont suivi des volontaires, hommes et femmes, recrutés à Paris dans deux centres de diagnostic et de traitement gratuits des maladies sexuellement transmissibles (MST) et trois centres de dépistage anonyme et gratuit du VIH (Cdag). En dépit de ses difficultés dues, en particulier, à la lenteur des inclusions, à la petite taille de l'échantillon (102 personnes incluses : 91 femmes et 11 hommes, dont 8 personnes en couples), du nombre élevé de personnes perdues de vues (10 après le premier entretien), aux problèmes éthiques soulevées par la présence de personnes séropositives au VIH, l'étude a permis de préciser les facteurs qui influencent l'utilisation du pfp.
Avant l'enquête, seulement 5 % (5/102) des personnes recrutées avaient déjà utilisé le pfp et 56 % (58/102) en avaient entendu parler. Elles en ont appris l'existence par les médias pour près de la moitié d'entre elles, par une ami ou le partenaire, par un/une enseignante ou par le centre de planning familial. Pas une fois, les médecins et les pharmaciens ne sont cités.

82 femmes et 10 hommes.

Le suivi proprement dit a donc porté sur 92 personnes (82 femmes et 10 hommes, dont 8 en couple), qui ont reçu des échantillons, avec une explication préalable sur le mode d'emploi et le conseil d'effectuer des essais de pose pour se familiariser avec la technique. Parmi les personnes suivies, 62 (54 femmes et 8 hommes) ont utilisé une ou plusieurs fois le pfp, en majorité des femmes plutôt jeunes (moins de 35 ans).
Des 82 femmes suivies, 56 ont fait des essais de pose (2 ou 3), à l'issue desquels seulement 29 ont décidé de l'utiliser (25 l'ont utilisé d'emblée sans essai de pose). Le temps mis pour le premier essai est de 6 minutes en moyenne et diminue dès le deuxième essai. Une femme sur six, essaie le pfp en présence de son partenaire. La position allongée sur le dos est la plus la souvent adoptée. Plus de la moitié (34/56) choisit de garder en place le pfp pendant 60 minutes en moyenne.
Les raisons évoquées pour un arrêt d'utilisation sont : la réticence ou l'appréhension, l'absence de partenaire, s'il existe, son refus ou sa non-coopération, une mauvaise image du pfp (pas érotique, moins bien que le préservatif masculin). Les auteurs notent qu'au cours des entretiens « de fortes appréhensions ont surgi chez des femmes se représentant leur sexe comme n'étant pas conforme à des caractéristiques esthétiques ou anatomiques circulant dans les médias ou données parfois sans précision par le corps médical ("on m'a dit que je suis sèche", "vagin large", "utérus rétroversé").  »
Une majorité (61 %, soit 38/62 dont 4 hommes) des utilisateurs jugent le pfp « agréable » ou « assez agréable ». Plusieurs femmes disent que la sensation est la même qu'avec un préservatif masculin. L'appréciation « désagréable » (environ 20 % des utilisateurs) est liée à l'aspect du pfp ( « trop large, avec des plis »), au refus du partenaire ou au manque de sensation. L'opinion des 17 % restants varie selon la période d'utilisation ou le changement de partenaire.
Certaines femmes ont suggéré des améliorations du pfp quant à sa forme, sa texture, la technique de pose et souhaitent qu'il soit plus accessible surtout en pharmacie et moins cher.

Des recommandations.

Les auteurs formulent plusieurs recommandations. « Il ne faut pas hésiter à montrer le pfp quand on en parle et expliquer les raisons de sa forme », conseillent-ils. De même, il faut proposer aux candidates de commencer par des essais de pose. Ce temps permet de mieux maîtriser la technique, de raccourcir le temps de pose et de profiter de l'occasion pour en parler avec le partenaire. La technique conseillée consiste à placer le préservatif au moment d'une excitation sexuelle plutôt qu'à « froid ». Le pfp ne doit en aucun cas être utilisé comme un préservatif masculin (sur la verge en érection, anneau interne ôté), ce type d'utilisation étant à l'origine de déchirures au niveau de la « soudure » entre les deux films de polyuréthane. Enfin, il faudrait renforcer l'information grâce à des campagnes destinées au public. « Continuer à parler du pfp et le rendre disponible (2 ou 3 échantillons gratuits) pour toute femme consultant dans un centre MST, un CDAG, un centre de planification familiale ou un dispensaire médico-social », insistent les auteurs. L'information et la formation du personnel de santé sur le pfp, en particulier des médecins et des pharmaciens, apparaissent également essentiels.

> Dr LYDIA ARCHIMÈDE

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7494