L E cessez-le-feu entre Israël et les Palestiniens a été rebaptisé « trêve » avant de sombrer de nouveau dans la violence ordinaire. Imitant son adversaire, le Premier ministre israélien, Ariel Sharon, passe beaucoup de temps dans les capitales européennes. Il n'a peut-être pas tort dès lors qu'il s'est rendu compte que l'intifada bis entre dans le cadre d'une campagne de communication.
En revanche, M. Sharon n'a pas exprimé, depuis qu'il a été élu, une seule idée qui contienne un espoir de règlement politique du conflit. Chassez le naturel, il revient au galop : il prend appui sur la violence des Palestiniens pour justifier la sienne et si, au lendemain de l'attentat de Tel-Aviv, il joué la carte de la « retenue », le voilà qui promet aujourd'hui de lutter contre l'Autorité palestinienne avec tous les moyens dont il dispose et de laisser entendre qu'il veut se débarrasser de Yasser Arafat.
Ce projet aurait un sens si l'alternative à M. Arafat n'était pire. Si le président de l'Aurorité palestinienne disparaissait politiquement, il serait remplacé par un extrémiste du Hamas ou par l'un de ses lieutenants du Fatah pressés d'en découdre. M. Sharon a d'ailleurs été mis en garde par les Etats-Unis et par l'Europe à propos de ce projet, qu'il s'est hâté de rengainer. Ce qui le prive de toute perspective politique à court terme car, loin de négocier avec M. Arafat, il refuse de geler la colonisation et va même jusqu'à faire détruire des maisons palestiniennes dont il juge la construction « illégale » ; alors que toutes les colonies israéliennes sont en contradiction avec le droit international, tel qu'il a été édicté par les résolutions des Nations unies.
Sans doute M. Sharon se croit-il l'obligé des colons qui l'ont élu. Peut-être croit-il pouvoir, après son éclatante victoire électorale, faire ce qui lui chante. Mais il aurait tort de penser que les Israéliens souhaitent autre chose que leur sécurité. Ils ont pensé que l'ancien général ferait reculer la menace de l'intifada. Mais il est clair qu'il ne peut ni empêcher les attentats, ni porter de nouveaux coups à l'Autorité palestinienne sans encourir les foudres des Etats-Unis et, accessoirement, des Européens. Les sondages d'opinion montrent que les Israéliens n'ont aucun préjugé sur les méthodes propres à assurer leur sécurité, y compris les méthodes politiques. Et qu'ils sont parfaitement conscients des effets néfastes de la répression.
Certes, M. Sharon tire avantage de l'effondrement du camp de la paix en Israël. Mais le prochain attentat grave en Israël ruinera sa crédibilité.
Il est donc regrettable qu'il n'ait pas mené sa réflexion jusqu'au bout. Il a pu constater que, lorsqu'il s'abstient de riposter à une provocation, il y gagne en respectabilité, tandis que M. Arafat subit les pressions des chancelleries. Et que lorsqu'il se livre à de nouvelles provocations, comme la destruction des maisons palestiniennes, c'est M. Arafat qui y gagne en crédit moral.
Enfin, le chef du gouvernement israélien ne peut pas continuer, comme il le fait en ce moment, à exiger un arrêt des violences préalable à toute discussion : l'expérience a cent fois démontré que le formalisme retarde les solutions au Proche-Orient et que la négociation avec l'ennemi n'est pas une preuve de faiblesse. En refusant les propositions de M. Barak, les Palestiniens se sont enfermés dans la violence, et c'est malheureusement, aujourd'hui, le seul atout qui leur reste. Mais s'ils commencent à négocier, ils ne pourront pas poursuivre leurs actes de harcèlement contre Israël.
Le Premier ministre israélien dispose d'excellentes cartes pour faire avancer les chances de la paix : sa réputation, fondée sur l'usage de la force, rassure les Israéliens qui ne critiqueront pas le plus faucon d'entre eux s'il fait un geste de paix ; il est admis que le Likoud, la formation de droite qu'il dirige, dispose d'un champ plus large que la gauche israélienne pour signer des traités diplomatiques, comme avec l'Egypte. M. Sharon ne peut donc pas se contenter d'entrer dans un conflit qui pourrait durer encore un siècle ; il faut bien qu'il associe son nom à un projet de solution et il ne peut pas y avoir de solution sans concessions.
Ce qui implique, bien sûr, qu'il trahisse ses plus chauds partisans, l'extrême droite et une partie des colons, ce que Menahem Begin a fait avant lui et qui n'est donc pas impossible. Voilà un homme qui a une chance d'entrer dans l'histoire malgré de bien mauvaises lettres de créance et qui préfère casser des murs, et du Palestinien.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature