APRES PLUS de quinze années de procédure, le procès de l'hormone de croissance extractive contaminée aura lieu devant la 31e chambre du tribunal correctionnel de Paris du 6 février au 31 mai 2008. Il se tiendra tous les mercredis matin à 9 heures, et les jeudi et vendredi après-midi à 13 h 30, sauf durant la semaine du 19 avril au 4 mai. Sept responsables de la fabrication et de la diffusion de l'hormone de croissance contaminée doivent comparaître. Dans ce dossier ouvert en 1991 et instruit par Marie-Odile Bertella-Geffroy, plusieurs lots d'hormone infectée par la maladie de Creutzfeldt-Jakob (MCJ) ont été découverts. Comme dans le scandale du sang contaminé, enquêtes et instruction judiciaire ont révélé que des stocks suspects continuaient d'être écoulés en 1985 et 1986, malgré des mises en garde, notamment sur les «risques infectieux potentiels, en particulier d'une possible contamination par la MCJ». D'après un rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas), 2 305 enfants au moins ont reçu l'hormone extractive avant son remplacement par des produits issus du génie génétique. En 1992, l'Igas évoque des prélèvements d'hypophyses sur des cadavres dans les années 1980, au mépris des précautions les plus élémentaires, dans des morgues de services de maladies infectieuses. Or, en 1980, le Pr Luc Montagnier, virologue à l'Institut Pasteur, publie des recommandations en la matière. Puis, en 1985, la relation est établie entre l'hormone de croissance extractive et le décès d'un Américain de la MCJ. Et, au cours de l'instruction, Marie-Odile Bertella-Geffroy mettra au jour des dysfonctionnements dans la collecte d'hypophyses, effectuée par l'association France-Hypophyse (FH), ainsi que dans la fabrication de l'hormone par un laboratoire de l'Institut Pasteur.
Homicide involontaire et tromperie aggravée.
Les personnes renvoyées en correctionnelle sont des dirigeants de France-Hypophyse, de Pasteur et des médecins. Ce sont le Pr Jean-Claude Job, ex-patron de France-Hypophyse, chargé de la collecte ; le Pr Fernand Dray, ancien responsable de la production d'hormone de croissance au laboratoire Uria de l'Institut ; Marc Mollet et Henri Cerceau, de la pharmacie centrale des Hôpitaux de Paris (PCH) ; le Pr Jacques Dangoumau, de la direction de la Pharmacie et du Médicament au ministère de la Santé ; et les Drs Micheline Gourmelen et Elisabeth Mugnier, respectivement médecins prescripteur et collecteur. Tous sont poursuivis pour homicide involontaire et tromperie aggravée, à l'exception du Dr Gourmelen, qui répondra uniquement de la première qualification. Le Pr Fernand Dray est, quant à lui, l'objet de poursuites pour importation, exportation et fabrication illicite de médicaments, pour corruption, recel et prise illégale d'intérêt. Il aurait tiré avantage financier de la société belge Techland en contrepartie de commandes d'hypophyses, puis d'hormones, passées pour l'Institut Pasteur. Il importait de Belgique des hypophyses et en réexpédiait les résidus afin que Techland les exploite et en tire d'autres produits. Les prévenus encourent cinq ans de prison pour homicide involontaire, quatre ans pour tromperie aggravée et dix ans pour corruption.
La plupart des 60 parties civiles ont reçu une indemnisation de la solidarité nationale versée par le ministère de la Santé. «Si bien que leur demande n'est pas pécuniaire», souligneMe Bernard Fau, défenseur de plusieurs d'entre elles. Selon le dernier bilan du réseau national de surveillance (29 juin 2007). Depuis 1991, année des premiers décès enregistrés, 109 personnes sont mortes de MCJ iatrogène due à l'hormone de croissance contaminée.
Entre 1982 et 1986, un millier d'enfants atteints de nanisme hypophysaire ont été traités par de l'hormone de croissance prélevée sur des cadavres.
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