Les praticiens connaissent déjà Prevenar, polyoside pneumococcique qui est le fruit d'une recherche approfondie d'ordre technique, immunologique et épidémiologique. Il a fallu en effet réaliser la conjugaison complexe de sept polyosides du pneumocoque avec la même protéine, dans le but d'induire une réponse immunitaire à mémoire de type thymodépendant et d'obtenir de cette manière une réponse immunitaire satisfaisante chez l'enfant de moins de 2 ans. Une mise au point qui, on le devine, n'a pas été simple.
Par ailleurs, le choix des sept sérotypes inclus dans Prevenar est le fruit d'un vaste programme épidémiologique mondial réalisé afin de cibler les pneumocoques les plus virulents et/ou les plus résistants aux antibiotiques. Cette dernière caractéristique est d'autant plus importante en France que la prévalence de la résistance aux antibiotiques des pneumocoques y est très élevée. Or, selon les données du Centre national de référence, Prevenar couvre plus de 95 % des souches résistantes en France et plus de 80 % de celles qui sont isolées en pédiatrie, notamment chez les enfants de moins de 2 ans.
En pratique, Prevenar s'est révélé comme fortement immunogène quel que soit l'âge, et son efficacité préventive a été confirmée par deux grandes études, américaine et finlandaise. La participation des équipes françaises au développement du vaccin a été très active. Il fallait préciser notamment l'efficacité et la tolérance de Prevenar chez les enfants les plus à risque d'infections graves à pneumocoques.
Le bénéfice attendu est double ; tout d'abord, réduire le nombre des infections invasives à pneumocoques (environ 200 par an en France), d'autant que ces méningites s'accompagnent d'une mortalité élevée (10 %) et de séquelles définitives graves chez près d'un tiers des survivants ; ensuite, on espère participer à la réduction de la résistance des pneumocoques aux antibiotiques.
Un vaste suivi épidémiologique en France
Toutes ces raisons ont conduit les autorités américaines, européennes et françaises à reconnaître à ce vaccin un fort pouvoir innovant. Dans notre pays, Prevenar a obtenu un remboursement à 65 %, au prix européen.
Déjà plus de 40 millions de doses de Prevenar ont été administrées à travers le monde, ce qui fournit un recul considérable en termes de pharmacovigilance. Pourtant, Wyeth a signé une convention avec la direction générale de la Santé, prévoyant un programme de suivi épidémiologique de grande envergure (100 000 enfants sur trois ans) et commençant en 2003. Le suivi permettra de préciser encore la tolérance mais aussi les effets de la vaccination sur la fréquence des infections à pneumocoque et la résistance de ce germe aux antibiotiques. Tout ce qui vient d'être dit montre que l'attribution du prix Galien à Prevenar était plus que justifiée car la prévention des méningites, mais aussi des septicémies, bactériémies et pneumonies à pneumocoques n'est pas anecdotique.
Vfend, une grande innovation réservée à l'hôpital
L'autre lauréat est beaucoup moins connu des praticiens libéraux : en effet, le Vfend, ou voriconazole, est réservé à l'usage hospitalier et/ou d'usage restreint. Pourtant, ce nouvel antifongique systémique de la famille des triazolés représente une avancée importante dans le traitement de nombreuses mycoses mortelles : aspergillose invasive, infection invasive grave à Candida et infections fongiques graves à scedosporium et fuzarium.
Le voriconazole, indiqué chez l'adulte et chez l'enfant de plus de 2 ans, peut être administré en première intention au patient immunodéprimé, atteint d'infections évolutives pouvant menacer le pronostic vital. Par ailleurs, Vfend est la seule spécialité disponible à la fois par voie intraveineuse et par voie orale, ce qui le rend particulièrement maniable chez les sujets fragiles, notamment en pédiatrie. En outre, il peut être prescrit en association avec la plupart des anti-infectieux et immunosuppresseurs, ce qui est particulièrement important chez les greffés, les cancéreux et les malades atteints de sida.
Bien entendu, les bénéfices de Vfend ont été confirmés par diverses études cliniques : on a ainsi montré que, dans les aspergilloses invasives, le voriconazole réduisait de 31 % le risque relatif de décès à trois mois par rapport au traitement de référence (p = 0,02) et augmentait significativement le taux de réponse clinique à trois mois (p < 0,0001). Enfin, Vfend est mieux toléré avec un maintien significativement prolongé du traitement (73 jours contre 12 jours). Autrement dit, Vfend devient le traitement de référence de l'aspergillose invasive ; cette raison ainsi que des réponses favorables obtenues dans les candidoses résistantes au fluconazole et les infections à scedosporium et fuzarium justifient l'attribution d'une ASMR de niveau I et... celle du prix Galien.
Lequel récompense Pfizer, connu pour ses grands médicaments de médecine de ville, mais qui, aujourd'hui, est distingué pour un médicament destiné à une population cible évaluée entre 1 300 et 1 600 patients par an par la commission de transparence. Un fait à souligner.
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