Ancien président (1999-2011) du Comité économique des produits de santé (CEPS, chargé de fixer les prix des médicaments), Noël Renaudin était mercredi l'invité des rencontres du « Café nile », à Paris. L'ancien responsable, qui s'était astreint à un devoir de réserve depuis son départ du comité, n'a cette fois pas mâché ses mots.
Le débat sur le prix des médicaments innovants ? « Il fait rage, sans produire aucun résultat », regrette-t-il. Convaincu qu'il est désormais nécessaire de restreindre l'accès au remboursement de certaines innovations coûteuses, il n'y va pas par quatre chemins : « Oui, les nouveaux médicaments sont trop chers, le nombre d'innovations intéressantes explose, et l'argent est devenu rare. »
Des capitalistes étrangers qui s'enrichissent
Certains industriels en prennent pour leur grade : « On est en train de ruiner la production française et européenne de médicaments au profit de quelques capitalistes étrangers qui s'enrichissent, le système dysfonctionne. » À ses yeux, la faute en revient surtout aux pouvoirs publics, accusés de ne pas vouloir sélectionner les innovations qui arrivent sur le marché. « Aujourd'hui, répète-t-il, l'intérêt général commande de choisir parmi les nouveaux médicaments » ceux qui seront pris en charge par l'Assurance-maladie.
La proposition de régulation internationale du prix du médicament formulée par François Hollande lors du G7 de mai dernier ? Noël Renaudin n'y croit pas. Une négociation sur les prix menée par des pays « prêts à tout pour accueillir l'innovation » « ne changera rien ».
ATU en question
Le système n'est pas soutenable, met en garde Noël Renaudin qui avance quelques pistes : renoncer au dispositif – selon lui inflationniste – de l'AMM conditionnelle ; limiter le remboursement des médicaments sous autorisation temporaire d'utilisation (ATU) à leur prix de production ; mettre fin aux contrats de performance (qui permettent à un laboratoire d'obtenir pour son innovation un prix satisfaisant, mais révisable en fonction de ses résultats dans la vraie vie). Ces contrats sont aujourd'hui plébiscités par les industriels « qui peuvent ainsi mettre sur le marché des produits qu'ils ne sortiraient pas forcément sans ce dispositif ».
Noël Renaudin enfonce le clou. « Notre système de santé a aujourd'hui plus besoin d'argent pour financer la dépendance que pour rembourser les médicaments. »
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