L’HEMORRAGIE du post-partum constitue une complication gravissime qui est responsable en France de 20 % des décès maternels survenant au cours d’un accouchement (1). Dans le cadre d’une session du congrès de la Sfar consacrée à la prise en charge des pièges anesthésiques en obstétrique, le Dr Alexandre Mignon a rappelé les modalités de la prise en charge des patientes avec un placenta praevia et/ou accreta. L’hémorragie, la transfusion, le syndrome de coagulation intravasculaire disséminée (Civd), la prématurité, une augmentation de la morbi-mortalité maternelle sont associés à ces implantations anormales du placenta. Le placenta praevia est un placenta anormalement implanté en avant de la présentation foetale. Il en existe trois types (marginal, partiel, recouvrant) avec un risque majeur d’hémorragie au cours de l’accouchement. Le risque foetal est dominé par la prématurité. Le placenta accreta (1/2 500 accouchements) est un placenta adhérant plus ou moins profondement à la paroi utérine, le plus souvent au niveau d‘une cicatrice de césarienne. Il peut être responsable d’un saignement majeur au moment de la délivrance. La plupart des placentas accreta surviennent sur un placenta praevia. Le risque de placenta praevia s’élève lorsqu’il existe une cicatrice de césarienne et la fréquence des placentas accreta augmente avec le nombre de césariennes. Le diagnostic de placenta accreta, qui n’est parfois évoqué qu’au moment de la délivrance, est en général posé lors de l’échographie du troisième trimestre.
Le Dr Mignon a rappelé les différentes stratégies obstétricales envisageables : l’accouchement par voie basse reste possible si le placenta praevia est non recouvrant, mais l’existence d’un placenta recouvrant impose la césarienne. S’il existe une menace d’accouchement prématuré, la tocolyse est proposée jusqu’à la 38e semaine. Enfin, la survenue d’un saignement doit faire proposer la césarienne. Les modalités de cette prise en charge proposées par le Collège national des gynécologues-obstétriciens de France (Cngof), en partenariat avec la Sfar et l’Anaes sont disponibles sur le site de Sfar (1). Pour l’anesthésiste-réanimateur, l’existence de ces implantations anormales du placenta est synonyme d’une prise en charge anesthésique qui varie notablement selon l’urgence foetale et/ou maternelle.
Il convient de rappeler que le choix de la technique d’anesthésie (anesthésie générale ou locorégionale) n’est pas une simple discussion théorique puisque la femme enceinte n’est jamais considérée à jeun et que l’induction anesthésique comporte toujours un risque d’inhalation. En dehors du contexte de l’urgence (césarienne réglée pour un placenta praevia diagnostiqué en cours de grossesse, césarienne décidée en cours de travail), l’anesthésie locorégionale est possible et est associée à une réduction du saignement et des transfusions. Mais ces travaux sont rétrospectifs et comportent des biais (choix de l’anesthésie locorégionale par les anesthésistes les plus confirmés ou pour les situations les moins graves). La seule étude randomisée, réalisée auprès de 25 patientes ayant un placenta recouvrant, n’a pas mis en évidence de différence sur le saignement. Pour le Dr Mignon, si l’anesthésie locorégionale peut être proposée aux patientes ayant un placenta praevia postérieur avec un faible risque de placenta accreta, l’anesthésie générale est recommandée dans les formes antérieures de placenta praevia-accreta et dans les saignements actifs.
Informer la patiente des risques hémorragiques.
Il a précisé les différentes solutions possibles devant une forme grave de placenta accreta découverte lors de la délivrance. Il est recommandé de ne pas tenter d’extraction forcée du placenta. L’abandon insitu du placenta est une alternative si la patiente est stable, complété par l’administration d’ocytocique, de sulprostone, ou l’embolisation. Lorsque le diagnostic est fait avant l’accouchement, une information sur les risques hémorragiques au cours de l’accouchement est nécessaire permettant de discuter avec la patiente de l’hystérectomie d’hémostase ou des thérapies alternatives envisageables (embolisation du placenta en place) s’il existe un désir de grossesse ultérieure. La gravité potentielle de ces implantations anormale du placenta impose une anticipation des complications hémorragiques lorsqu’on a connaissance de la pathologie (1) et/ou un transfert des patientes vers des centres comportant un plateau médico-technique adapté (soins intensifs maternels, produits sanguins disponibles sur place, gynécologues-obstétriciens et anesthésistes-réanimateurs présents 24 h/24).
D’après la communication du Dr Alexandre Mignon (département d’anesthésie-réanimation, hôpital Cochin, Paris).
(1) Hémorragies du post-partum immédiat – Recommandations pour la pratique clinique. Collège national des gynécologues-obstétriciens de France (Cngof), en partenariat avec la Sfar et l’Anaes, 2004 (http://www.sfar.org).
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