Les pédiatres de l'hôpital de Poissy, en région Ile-de-France, sont partis d'un constat simple : au cours des premiers jours de vie, on pratique chez les nouveau-nés des tests sanguins réguliers par ponction veineuse ou par piqûre cutanée afin de contrôler des paramètres essentiels de la santé de l'enfant, la glycémie, par exemple. Bien que ces gestes soient douloureux, on n'emploie encore actuellement que de façon épisodique les traitements pharmacologiques analgésiques disponibles. La principale raison avancée à ce choix thérapeutique est liée aux effets indésirables potentiels de tels médicaments chez les tout-petits. C'est pour cette raison que des moyens non pharmacologiques sont actuellement à l'étude. Différentes possibilités ont été proposées : la prise de solutions orales sucrées, la mise en place d'une sucette ou encore le contact peau à peau.
Une étude chez 180 bébés nés à terme
Afin de comparer ces différentes méthodes entre elles et d'évaluer l'intérêt de pratiquer les tests sanguins chez un enfant prenant le sein, l'équipe du service de pédiatrie a mis en place une étude sur 180 enfants nés à terme. Elle a constitué quatre groupes de 45 enfants : dans le premier de ces groupes, la ponction veineuse était réalisée chez un enfant prenant le sein depuis plus de 2 minutes ; dans le deuxième, chez un enfant tenu dans les bras de sa mère ; dans le troisième, chez un enfant ayant reçu deux minutes auparavant 1 ml d'eau stérile (placebo) par voie orale ; enfin, dans le dernier, chez un enfant ayant reçu deux minutes auparavant 1 ml de glucose à 30 % par voie orale et suçant une sucette physiologique adaptée à son âge.
Deux échelles d'évaluation de la douleur
Les enfants ont tous été filmés durant le geste invasif et les investigateurs ont mesuré leur rythme cardiaque et leur saturation en oxygène. Les parents étaient tous consentants pour l'expérimentation, mais ils n'en connaissaient pas le but précis. Deux expérimentateurs indépendants ont visionné les vidéos de l'ensemble des enfants et ils ont codifié la douleur exprimée par les enfants selon deux échelles distinctes : l'échelle de douleur aiguë du nouveau-né (cotant de 0 à 10) et l'échelle de douleur des enfants prématurés (allant de 0 à 18). Enfin, ils ont évalué le degré d'éveil de tous ces enfants.
« Les scores estimés par les investigateurs ont été respectivement de 1, 10, 10 et 3 selon la première échelle utilisée et de 4,5, 13, 12 et 4 selon la seconde. Sur les 45 enfants nourris au sein durant l'examen, 16 n'ont pas montré de signes de douleur et 35 ont été cotés par un score minimal correspondant à une douleur légère », explique le Dr Ricardo Carbajal. Les auteurs reconnaissent aussi que le fait de leur donner le sein a eu, chez l'ensemble des enfants, un caractère apaisant, puisque leur degré d'éveil était systématiquement moindre par rapport à celui des enfants des trois autres groupes. Dans ces conditions, ils ne peuvent conclure à un effet directement analgésique de l'alimentation au sein, mais à une conjonction d'événements favorables à un ressenti moindre de la douleur.
« BMJ », vol. 325, 4 janvier 2003.
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