Les facteurs de risques de l'athérome sont nombreux et désormais connus. Il est toutefois intéressant de constater que peu de travaux scientifiques s'intéressent à la sédentarité en tant que telle ; cette variable indépendante étant le plus souvent appréhendée par le biais de la quantité d'activité physique (AP) lors des loisirs ou des activités professionnelles. Or une AP régulière permet de lutter efficacement contre la plupart des risques d'athérosclérose, à savoir : l'obésité, l'hypertension artérielle modérée, les troubles de la tolérance au glucose, l'hyperinsulinisme, certaines dyslipidémies, le tabagisme et les stress émotionnels répétés. Considérée isolément au plan statistique, la sédentarité multiplie par 1,9 le risque de survenue d'infarctus du myocarde (1).
Les arguments en faveur d'un rôle protecteur de l'AP vis-à-vis de l'athérome peuvent être regroupés autour d'études d'observation ou d'études d'intervention (le plus souvent de prévention secondaire).
Le bénéfice sur les lipides et la PA
Les études transversales ou longitudinales font globalement état des mêmes résultats (2). La National Runner's Health Study (8 283 hommes, 1 837 femmes) apporte une contribution originale à la connaissance, en établissant pour la première fois une relation dose-réponse. Ainsi, le HDL cholestérol augmente en moyenne de 0,135 et de 0,115 mg/dl/km couru respectivement chez les hommes et les femmes. Inversement, la triglycéridémie diminue de 0,48 mg/dl/km couru dans les deux sexes. Ces modifications induites par l'exercice sont toutefois plus faibles chez les sujets présentant un BMI et une adiposité élevés, surtout si cette dernière est de type androïde. En revanche, une modification du poids ou de l'adiposité n'est pas forcément nécessaire pour observer ces changements favorables du bilan lipidique. Les effets sur le cholestérol LDL sont, eux, moins nets.
Le bénéfice sur la pression artérielle a également été montré à travers différents travaux : 44 études randomisées (3), incluant au total 2 674 personnes, ont montré que les pressions artérielles systoliques et diastoliques de repos diminuent de respectivement 3,4 et 2,4 mmHg, chez des sujets normotendus pratiquant une activité physique. Les effets les plus importants sont observés chez des sujets hypertendus (réduction de 7,4 et 5,8 mmHg respectivement pour les pressions systolique et diastolique). Il ne semble pas exister dans ce cas d'effet dose-réponse.
Réduction de l'insulinorésistance et du poids
Récemment, une étude menée par le Diabetes Prevention Program (4) fait état, au sein d'une population d'individus à risque pour la survenue de DNID, d'une réduction de 58 % du taux d'apparition de DNID après 2,8 ans d'un programme d'AP générateur d'une perte pondérale de 4 kg et d'un surplus de dépense énergétique de 600 kcal hebdomadaire. Dans la même étude de cohorte, un traitement par metformine, durant la même période, limitait de 3 % la survenue de diabète de type 2.
Par ailleurs, la pratique d'une AP régulière fait partie des stratégies de réduction du surpoids et de ses comorbidités (5). Si ces auteurs rapportent une perte pondérale semblable, d'environ 7,5 kg, après trois mois de prise en charge diététique ou de programme d'entraînement physique, force est de reconnaître que la première modalité est plus facile à mettre en uvre pour un sujet en surpoids que la seconde. En effet, si une réduction de 800 kcal/j est assez aisée au plan diététique, elle représente, en revanche, environ 100 minutes d'exercice continu d'intensité moyenne, auxquelles l'adhésion à long terme est plus aléatoire.
Enfin, les études centrées sur l'influence de l'AP sur le sevrage tabagique sont peu nombreuses (6), mais leurs résultats (préliminaires) sont en faveur de l'effet facilitateur d'une AP régulière sur l'abstinence tabagique, avec une augmentation du taux initial de sevrage.
Le bénéfice dépend de la régularité
Certains effets positifs de l'AP sur les facteurs de risque athéromateux sont le fruit d'une succession d'effets aigus, ce qui implique la nécessité de la répétition de l'effort et la régularité de l'AP. Ainsi, l'impact de l'exercice physique sur les triglycérides et le cholestérol HDL semble persister jusqu'à 72 heures. La réduction des chiffres de pression artérielle induite par un exercice aigu peut, elle, persister jusqu'à 12 heures. Ces observations expliquent le caractère nécessairement répétitif et régulier de l'AP. Elles donnent également du sens aux anciens résultats de l'Harvard Alumni Study (7) qui suggéraient que les effets d'une pratique sportive universitaire ne persistent pas nécessairement toute la vie.
Recommandations pratiques
Si les bénéfices de l'AP régulière sont bien démontrés, il n'est pas facile d'obtenir des patients qu'ils bougent davantage. Des recommandations claires et pratiques peuvent les aider. Globalement, il est recommandé à tout individu, quel que soit son âge, de pratiquer quasi quotidiennement 30 minutes de marche rapide ou tout autre activité physique d'intensité moyenne occasionnant une dépense énergétique supplémentaire hebdomadaire de 1 500 kcal. Les conseils pratiques suivants doivent être dispensés aux patients :
- réduire le temps passé devant la télévision ;
- éviter de rester assis devant de longues périodes ;
- descendre du bus une station plus tôt ;
- garer la voiture à 5 minutes du lieu de rendez-vous ;
- prendre les escaliers ;
- profiter da la pause déjeuner pour marcher 15 minutes ;
- déambuler en attendant le bus ;
- bricoler et jardiner plus souvent ;
- sortir le chien (!) ;
- utiliser plus fréquemment les transports urbains.
IMS, 98000 Monaco.
EA 3162 « Ergonomie sportive et performance », UTV, 83957 La Garde.
e-mail : Stephane.Bermon@unice.fr.
Conférence donnée aux 7es Rencontres de nutrition azuréennes.
Références :
(1) Berlin et al. « Am J Epidemiol » 1990,132 : 612-628.
(2) Leon et al. « Circulation », 2001,104, II414-II415.
(3) Fagard et al. « Med Sci Sports Exerc » 2001, 33 : S484-492.
(4) Knowler et al. « New Engl J Med » 2002, 346 : 393-403.
(5) Ross et al. « Exerc Sport Sci Rev » 2000, 28 : 165-170.
(6) Ussher et al. « Cochrane Database Syst Rev » 2000, CD 002295.
(7) Paffenbarger et al. « JAMA » 1984, 252 : 491-495.
(8) Jolliffe et al. « Cochrane Database Syst Rev » 2001, CD 001800.
(9) Gardner et al. « JAMA » 1995, 274 : 975-980.
(10) Siscovick et al. « New Engl J Med » 1984, 311 : 874-877, 28 : 165-170.
L'activité physique en prévention secondaire
Une métaanalyse récente (8) permet d'affirmer que le réentraînement physique, proposé aux patients coronariens, réduit la mortalité après infarctus du myocarde, sans réduire le risque de récidive d'infarctus. Cela s'opère probablement grâce à une meilleure stabilité électrique (fibrillation ventriculaire) et/ou à une réduction des dommages tissulaires lors de phénomènes ischémiques ultérieurs.
Par ailleurs, l'instauration d'un programme d'AP régulière chez les patients souffrant d'artériopathie avec claudication intermittente permet une amélioration significative du périmètre de marche de respectivement 225 et 397 mètres selon que l'on considère respectivement le seuil d'apparition des douleurs ou le maximum de douleur tolérable (9). Le réentraînement produit des effets comparable, voire supérieurs, aux traitements par pentoxyphyline ou cilostazol.
Enfin, que dire du risque cardiaque lié à l'effort ? L'incidence des décès d'origine cardiaque lors de l'exercice physique est estimé à un décès par an pour 18 000 hommes présumés sains (10). Bien sur, l'exercice physique augmente le risque de mort subite ; de 5 à 10 % des infarctus du myocarde surviennent lors d'un effort intense et inhabituel. Ce risque est d'autant plus important que l'exercice est violent et que la personne est peu entraînée.
Conseils pour augmenter l'activité physique
- Réduire le temps passé devant la télévision.
- Eviter de rester assis devant de longues périodes.
- Descendre du bus une station plus tôt.
- Garer la voiture à 5 minutes du lieu de rendez-vous.
- Prendre les escaliers ;
- Profiter da la pause déjeuner pour marcher 15 minutes.
- Déambuler en attendant le bus.
- Bricoler et jardiner plus souvent.
- Sortir le chien (!).
- Utiliser plus fréquemment les transports urbains.
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