«PARCE QU’IL n’est pas protégé, le visage est tout naturellement la victime de brûlures. Heureusement, elles demeurent le plus souvent superficielles, parce que le visage n’est pas recouvert de vêtements qui s’enflamment et que la peau y est plus épaisse.Ces brûlures connaissent des risques spécifiques. Le premierest respiratoire, d’origine chimique ou thermique; le deuxièmese situe au niveau des cicatrices, dont lesconséquences sont, plus qu’ailleurs, dramatiques. Ces brûlures, enfin, même lorsqu’elles sont superficielles, peuvent s’aggraver secondairement en raison d’une colonisation bactérienne provenant des orifices septiques de la bouche ou du nez.» Ce tableau est mis en place par le Pr Daniel Wassermann, chef du service de soins aux brûlés, à l’hôpital Cochin (Paris).
«Les traitements, poursuit-il, sont très variables et s’appliquent au cas par cas. Mais ils répondent à quelques principes généraux. Si la brûlure, au moins du 2edegré, englobe la totalité de la face, l’hospitalisation est indispensable. En raison, d’une part, du risque respiratoire, avec oedème des voies aériennes supérieures, qui peut conduire à l’intubation, et, d’autre part, du facteur esthétique. Ce risque cicatriciel justifie un recours facile au spécialiste.»
Une croûte crée un masque rigide.
Le Pr Wassermann fait bien le distingo entre les brûlures superficielles, en fait, le 2e degré superficiel, et les 2e profond et 3e degrés.
Le 2e degré superficiel se reconnaît aux phlyctènes sur un « sous-sol » rose, vascularisé. «Nous recommandons d’exciser tous les tissus décollés, puis de pulvériser et tamponner avec une solution de chlorhexidine diluée dans l’eau à 0,05%. L’application est à renouveler toutes les deux à trois heures pendant 24 à 48heures. Une croûte va se former. Elle crée un masque rigide, qui, certes, gêne le patient, mais constitue aussi une protection. En revanche, quelle que soit la profondeur, il ne faut jamais appliquer de crème ou de pommade non antiseptique. Cela favorise en effet l’apparition d’infections et, donc, l’approfondissement.»
Lorsque la lésion est plus grave, c’est le cas du 2e degré profond, quand des plaques de tissu se décollent sur un « sous-sol » blanc, peu vascularisé, ou du 3e degré, avec ses zones de nécrose, une certitude existe : il y aura des cicatrices. Si la décision de greffe, du ressort du spécialiste, peut être discutée face à un 2e degré profond, elle ne fait pas de doute dans le 3e degré. «En attendant une consultation spécialisée, c’est la seule indication à un topique, la sulfadiazine argentique, appliquée quotidiennement seule ou en association avec un pansement de type tulle gras. Ici encore, une notion est constamment vraie: quelle que soit sa profondeur, même 2edegré superficiel, une lésion qui n’est pas cicatrisée au dixièmejour justifie un avis spécialisé toujours en raison du risque de cicatrice.»
Excision suivie d’autogreffes.
Le recours à la chirurgie s’impose devant ces lésions profondes du 2e ou 3e degré. «Il s’agit d’une excision chirurgicale qui enlève couche par couche, par ablation tangentielle, les tissus morts. Elle est suivie d’autogreffes. Ici, deux options sont possibles. Il peut s’agir de greffes réalisées en peau fine, avec pour avantage une cicatrisation facile des sites donneurs, mais un risque élevé de rétraction. Ce type de greffe est plutôt utilisé dans les brûlures du 2edegré profond. Ou bien de greffes de peau épaisse, plutôt réservées aux lésions du 3e
degré, pour lesquelles les sites donneurs cicatrisent plus lentement mais dont les résultats sont meilleurs en raison d’une moindre rétraction.»
La greffe est réalisée le plus tôt possible, selon l’état et l’évolution du patient. Le chirurgien essaie dans la mesure du possible de tenir compte du résultat esthétique final, notamment en greffant de grandes zones. «Une tendance actuelle, dans le 3edegré, est l’utilisation, après excision, d’un substitut dermique, “Integra”. Après application, cette membrane est laissée en place de deux à trois semaines. A ce terme, une autogreffe de peau fine est réalisée sur ce substitut, ce qui permet d’obtenir d’excellentsrésultats au plan esthétique.»
La brûlure une fois traitée, l’éviction solaire est indispensable pendant un an. S’il s’agissait d’un 2e degré superficiel, le patient peut être rassuré quant à l’absence de cicatrice. La peau va rester rouge quelques mois. Une crème hydratante est alors autorisée après cicatrisation. Lorsque la brûlure a été plus profonde, la cicatrice reste très inflammatoire pendant quatre à six mois, elle est considérée comme « mature » au bout de douze à vingt-quatre mois. «Alors seulement une chirurgie réparatrice peut être envisagée.» Au cours de cette période, il ne faut pas négliger l’apport des cures thermales, dont les soins locaux peuvent améliorer la cicatrisation.
Bouche et paupières
Des problèmes spécifiques se posent lors des brûlures du visage au niveau de la bouche et des paupières, en raison du risque de rétraction.
Des soins de kinésithérapie tentent de préserver l’ouverture buccale grâce, notamment, à des orthèses et à des conformateurs.
Au niveau palpébral, en cas de brûlure profonde, l’ectropion lié à la rétraction expose le globe oculaire. C’est le seul cas pour lequel une greffe à visée protectrice est réalisée précocement. Sa rétraction justifie souvent une ou plusieurs greffes ultérieures.
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