Le mouvement de protestation des professions de santé

Près d'un médecin sur deux est victime d'épuisement émotionnel

Publié le 22/01/2002
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Souvent évoqué pour expliquer la grande colère des généralistes, le découragement et le sentiment de dévalorisation qu'éprouvent de nombreux médecins libéraux trouvent une éclatante confirmation dans l'étude que vient de publier l'Union régionale des médecins libéraux de Bourgogne et qu'a réalisée Didier Truchot, maître de conférences en psychologie sociale à l'université de Reims et membre de la Société européenne de psychologie de la santé.

Le burn out, rappelle l'URML, est syndrome psychologique combinant un « épuisement émotionnel » (« la personne est vidée nerveusement » et « n'est plus motivée par son travail »), la dépersonnalisation (qui se caractérise par des « attitudes impersonnelles, négatives, cyniques envers les patients ») et la réduction de l'accomplissement personnel ( « la personne s'évalue négativement, son estime de soi diminue »).
Selon l'enquête par questionnaire à laquelle ont participé 394 médecins libéraux de Bourgogne, 47,2 % de médecins souffrent d'épuisement émotionnel, 41 % de réduction de l'accomplissement personnel et 33 % de dépersonnalisation. « Les analyses statistiques, commente l'URML, démontrent, s'il le fallait, que les médecins libéraux constituent un groupe professionnel particulièrement frappé par le burn out. »
La comparaison de cette étude avec d'autres enquêtes indique notamment que l'épuisement émotionnel des médecins est supérieur à celui des aides-soignantes et des travailleurs sociaux et presque deux fois plus élevé que celui des pompiers. L'épuisement émotionnel, note l'étude de Didier Truchot, dépend en partie de la charge de travail (nombre d'actes) des médecins mais surtout des relations avec les patients qui viennent en tête (68,5 %) des situations ayant provoqué « stress, tension et ras-le-bol ».
Parmi les attitudes des patients jugées stressantes, l'agressivité arrive en tête (16 %), suivie des demandes de visites non justifiées (13 %), des cas de patients complexes, des demandes excessives assimilées à un harcèlement, du manque de respect, des chocs émotionnels, des visites non payées, etc.
En revanche, les menaces de poursuites judiciaires à l'encontre du praticien ne sont citées qu'en fin de liste.
Dans beaucoup de cas, la relation avec le patient, selon les médecins interrogés, est déséquilibrée. 55 % d'entre eux estiment qu'ils apportent plus aux patients qu'ils n'en reçoivent, 27 % d'entre eux estiment en revanche que leur relation avec le patient est bénéficiaire et 17 % pensent qu'elle est équilibrée. « Les traitements statistiques, note l'étude, montrent qu'une relation déséquilibrée a une influence très significative sur l'épuisement émotionnel et la dépersonnalisation (...) Les relations inéquitables renvoient à l'idée d'un métier dévalorisé. » Un métier aujourd'hui en pleine crise.

B. K.

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7050