La consultation migraine
LE Dr Dominique Valade est formel. « Si un patient souffre de migraine depuis plusieurs années, c'est qu'il a été mal traité, déclare t-il, soit avec des médicaments inefficaces, soit de façon désordonnée. A ma consultation, poursuit-il, un patient sur trois est en abus médicamenteux et, malheureusement, il a subi une pléthore d'examens complémentaires qui n'ont servi à rien ! Il n'y a, en France, aucune stratégie thérapeutique dans le traitement du migraineux. »
Or, des recommandations de l'Anaes existent, reste à savoir comment elles sont suivies. Une étude auprès des médecins devrait, en 2005, nous renseigner.
Explications indispensables.
La première règle à respecter dans une prise en charge optimale du patient migraineux est de consacrer un temps suffisant aux explications sur la maladie, ce qui pour un grand nombre de patients n'a jamais été le cas.
« Le corps médical n'est pas forcément responsable du manque d'informations, tient à préciser D. Valade. En effet, un migraineux sur deux n'a jamais consulté pour ce motif. » Typiquement, le patient parle de sa migraine lors d'une consultation pour un autre motif, demande sans grande conviction un médicament pour le soulager, acceptant sa maladie avec fatalisme, d'autant qu'on lui a souvent affirmé qu'elle était héréditaire et surtout sans solution. Il faut dire aussi que lorsque le migraineux a une crise, il est prêt à tout, mais lorsque la crise s'arrête, il remet ses bonnes intentions et sa volonté de se faire prendre en charge à une prochaine fois !
« Une fois des explications claires apportées, le patient n'est plus demandeur d'examens complémentaires, souligne D. Valade, ce qui représente une source d'économies importantes. Mais il faut savoir prendre du temps non seulement pour expliquer la maladie mais également pour combattre les idées reçues. La première consultation pour migraine dans mon service dure trois quarts d'heure. »
Le deuxième temps, essentiel lui aussi, est d'expliquer au patient qu'il existe deux types de traitement : le traitement d'urgence et le traitement de fond.
Handicap.
Premier principe de la stratégie thérapeutique : tout patient doit avoir droit à un traitement d'urgence. Soit celui-ci est non spécifique à type d'anti-inflammatoires non stéroïdiens (Ains), soit il est spécifique, à type de triptans. « Il n'y a pas d'autres traitements d'urgence, affirme D. Valade. Tous les autres sont trop susceptibles d'être les vecteurs de céphalées chroniques par abus médicamenteux. »
Quant au traitement de fond, la première question est de savoir qui doit en bénéficier. « Tout d'abord, le patient qui le demande, répond D. Valade. Et ceux pour qui le handicap est important ».
Un patient qui souffre, dans l'année, de quatre accès de dix minutes chacun, parfaitement calmés par un triptan, n'a pas besoin d'un traitement de fond car il n'y a pas de handicap. En revanche, celui qui est cloué au lit trois jours par mois présente un handicap considérable.
Plus que le nombre de crises, c'est donc le handicap suscité qui motive un traitement de fond.
Celui-ci doit être ajusté en fonction des autres pathologies présentées par le patient. Exemples : les bêtabloquants sont évidemment contre-indiqués en cas d'asthme associé ; l'amitriptiline (Laroxyl) est indiqué en cas de dépression conjointe.
Douze mois au minimum.
« Il faut aussi, insiste D. Valade, expliquer au patient qu'il est inutile de revenir consulter dans le mois qui suit la mise en route du traitement de fond, sauf effets indésirables ; en effet, celui-ci ne commence à faire effet qu'au bout de trois à quatre mois. C'est une notion que tous les médecins doivent connaître. » Il faut également prévenir le patient que ce traitement n'est pas un traitement à vie et qu'il sera arrêté quand le seuil des crises deviendra tolérable, en général au bout de douze à dix-huit mois. C'est avec des objectifs de traitement clairs que la maladie sera mieux supportée. « Les gens vivent d'espoir, conclut D. Valade, mais cet espoir doit être justifié. »
D'après un entretien avec le Dr Dominique Valade, responsable du centre d'urgences des céphalées, hôpital Lariboisière, Paris.
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