POUR LA première fois dans l'adrénoleucodystrophie, une thérapie génique a été tentée. Cet essai particulier, puisqu'il utilise un virus dérivé d'un VIH inactivé, a été appliqué à deux enfants espagnols. Des résultats préliminaires encourageants à six mois et à un an sont rapportés à l'occasion du Congrès européen de thérapie génique à Rotterdam.
Cette avancée médicale a été réalisée par le Dr Nathalie Cartier- Lacave et le Pr Patrick Aubourg (responsable de l'unité de neurologie pédiatrique, hôpital Saint-Vincent-de-Paul, Paris, avec l'équipe de l'INSERM U745).
L'adrénoleucodystrophie (ALD) liée à l'X est une maladie génétique caractérisée par une démyélinisation progressive du système nerveux central (cerveau et moelle épinière), associée à une insuffisance cortico-surrénalienne (maladie d'Addison). Lorsque la maladie se déclare chez l'enfant, elle atteint des garçons entre 5 et 12 ans, jusque-là bien portants. Dans un premier temps apparaissent des déficits cognitifs modérés, puis, avec l'aggravation de la démyélinisation, les enfants souffrent d'une diminution de l'acuité visuelle, d'une surdité centrale, d'une ataxie cérébelleuse, d'une hémiplégie, de convulsions et de démence conduisant à un état végétatif ou à la mort en quelques années.
Le diagnostic repose sur la mise en évidence d'une augmentation des acides gras à très longues chaînes dans le sang.
En France, plus de 300 familles sont atteintes par cette affection, avec environ 35 nouveaux cas par an. La greffe allogénique de moelle osseuse constitue le seul traitement. Elle permet de stabiliser, voire de corriger les lésions de démyélinisation des formes cérébrales de l'enfant lorsque le traitement est proposé à un stade initial.
Un virus dérivé du VIH.
La tentative de traitement par autotransfusion de cellules génétiquement modifiées a été envisagée à partir de 1993, quand le gène à l'origine de l'ALD a été cloné. Le projet s'est ensuite poursuivi avec l'utilisation d'un vecteur viral peu commun, sous la forme d'un virus dérivé du VIH, intéressant dans cette circonstance car il permet de faire pénétrer un gène thérapeutique dans le noyau de cellules qui ne se divisent pas, comme les neurones.
Dans un premier temps, on a isolé des cellules souches de moelle osseuse dans le sang de deux jeunes patients espagnols atteints d'ALD. Ces cellules ont été mises en contact avec le virus inactivé et porteur du gène thérapeutique dans le laboratoire du Pr Marina Cavazzana-Calvo (hôpital Necker, Paris). Après le feu vert des tests sécuritaires, les cellules ont été réinjectées (autotransfusion) aux enfants dans le service du Pr Alain Fischer.
La protéine déficiente s'exprime.
«Les résultats préliminaires avec six mois et un an de recul sont encourageants, car la protéine déficiente s'exprime dans un pourcentage important des cellules du sang et pendant longtemps», ont commenté les spécialistes.
«S'ils sont confirmés, ces résultats pourraient ouvrir d'autres voies face à des maladies génétiques, comme le drépanocytose, la thalassémie ou encore le cancer», conclut le Pr Aubourg.
D'ici à deux ans, trois autres patients devraient être traités.
Par ailleurs, cet assai démontre que l'on peut utiliser le VIH comme vecteur pour transférer un gène thérapeutique dans des noyaux cellulaires.
Essai réalisé avec le soutien du Téléthon.
L'association ELA
C'est lors d'une rencontre entre un parent, Guy Alba, président fondateur de l'Association ELA (Association européenne contre les leucodystrophies) et le Pr Patrick Aubourg (spécialiste des leucodystrophies en France et dans le monde), que le projet a été lancé. L'association ELA contribue au financement de ces travaux depuis sa création. Elle a contribué à sortir de l'ombre ces maladies rares et redoutables, avec le concours de Zinedine Zidane, son parrain emblématique.
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