UNE EQUIPE BRITANNIQUE de Southampton a mesuré divers paramètres de la fonction pulmonaire chez 131 enfants, 66 garçons et 65 filles, âgés de 5 à 14 semaines, nés à terme, mais dont certains avaient un poids à la naissance inférieur à la normale. En comparant les vitesses de prise de poids, ajustées en fonction de l'âge et du sexe, Jane Lucas et coll. ont découvert que ce n'était pas tant le faible poids à la naissance qui était associé à des capacités respiratoires réduites, mais plutôt la vitesse à laquelle les enfants grossissaient : la fonction expiratoire de ces nourrissons déclinait de 11 % chaque fois que le poids de l'enfant augmentait d'une déviation standard, tandis que la fréquence respiratoire augmentait dans le même temps de 5,1 %.
Gain de poids.
« C'est la première fois qu'est mise en évidence une telle relation entre un gain de poids dans les semaines suivant la naissance et une détérioration de la fonction pulmonaire », a déclaré à Glasgow Jane Lucas. Il est peu vraisemblable que des modes d'alimentation différents soient responsables de cette découverte, dans la mesure où les enfants nourris au sein ou au biberon avaient des fonctions respiratoires similaires. « Nous pensons plus volontiers que cette augmentation de poids observée après la naissance chez certains nourrissons pourrait correspondre à un effet de rattrapage et pourrait être la conséquence d'une croissance retardée durant les derniers mois de la grossesse. Cela voudrait dire que les poumons du fœtus n'auraient pas atteint leur dimension normale, ce qui aurait contribué à détériorer la fonction respiratoire », a poursuivi la scientifique britannique.
Il est possible aussi que le gain pondéral postnatal affecte lui-même la fonction pulmonaire des nourrissons. Cela rejoindrait le fait qu'obésité et asthme soient souvent associés, et que les enfants qui ont un faible poids à la naissance grossissent plus vite que les autres, et deviennent plus facilement obèses par la suite.
Rattrapage.
C'est ce même effet de rattrapage qui était au centre de la deuxième étude, présentée au Congrès de l'ERS par l'équipe d'Elianne Vrijlandt, de l'hôpital pédiatrique Beatrix de Groningen (Pays-Bas).
Ce travail prospectif de grande ampleur, entrepris sur une période exceptionnelle de dix-neuf ans, a porté dès 1983 sur 690 enfants nés à moins de 32 semaines ou dont le poids à la naissance était inférieur à 1 500 g. Cette cohorte représente près des trois quarts des prématurés nés cette année-là aux Pays-Bas et qui ont survécu à leur hospitalisation initiale.
Les résultats que l'équipe néerlandaise a présentés à Glasgow, à la suite de l'envoi à tous les participants du questionnaire type de l'étude européenne Ecrhs, révèlent que, par delà les affections directement liées à la prématurité, comme le syndrome de détresse respiratoire (RDS) néonatale, les enfants nés avant terme ont un système respiratoire qui est significativement affaibli à l'âge adulte.
Vulnérabilité.
« Notre étude montre que les anciens prématurés souffrent plus souvent de sifflements respiratoires que les autres jeunes adultes (25,3 % contre 20,4 %), notamment à l'occasion d'un rhume, et qu'ils sont également plus nombreux à déclarer manquer de souffle au cours d'un effort (20,8 % contre 13,1 %) », a précisé Eliane Vrijlandt. « Mais c'est surtout pour l'asthme que les comparaisons sont très frappantes. Qu'il s'agisse en effet des crises d'asthme survenues durant les douze derniers mois ou de la prévalence générale d'un asthme, les chiffres sont environ trois fois plus élevés chez les anciens prématurés », a ajouté la scientifique néerlandaise.
Cette vulnérabilité accrue des anciens prématurés pourrait être en rapport avec un moins bon développement du tractus respiratoire au cours des premières semaines de vie, a-t-il été expliqué au congrès. Le calibre des voies aériennes pourrait être plus petit chez les anciens prématurés, ce qui aurait favorisé les phénomènes de constriction et d'hyperréactivité bronchique.
En revanche, les anciens prématurés semblent être très fortement protégés contre des affections à composante allergique : deux fois moins de rhume des foins que les sujets témoins (8,7 % contre 18,7 %) et près de quatre fois moins d'eczéma (8,9 % contre 36,2 %). Les médecins néerlandais expliquent ce phénomène par ce que l'on nomme depuis quelque temps l'« hypothèse hygiéniste », les anciens prématurés ayant probablement été plus souvent victimes d'infections dans leur petite enfance, en raison de leur fragilité. Cette fragilité aurait ainsi contribué, paradoxalement, à les prémunir contre le développement de certaines maladies allergiques.
D'après les communications de J. Lucas (université de Southampon, Royaume-Uni) et d'Elianne Vrijland (Hl Beatrix de Groningen, Pays-Bas), Congrès de l'ERS, Glasgow.
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