En Sardaigne, la forte prévalence à la fois de la sclérose en plaques (SEP) et du diabète de type 1 est-elle le fruit du hasard ou d'une prédisposition génétique particulière ? Pour y répondre, les neurologues de la clinique spécialisée de Cagliari ont enquêté auprès des 1 090 personnes concernées par la SEP en Sardaigne (chiffre pratiquement exhaustif en raison de l'existence d'une unique clinique spécialisée sur l'île), de leurs parents (n = 2 180) et de leur fratrie (n = 3 300). Tous les candidats de la cohorte (parents, grands-parents, arrière-grands-parents) devaient être nés et avoir vécu en Sardaigne. L'enquête a consisté à établir une généalogie verticale et horizontale à partir des cas index, c'est-à-dire des patients ayant une SEP confirmée par des critères cliniques et biologiques. L'âge, le sexe, l'existence d'un diabète de type 1 et l'existence d'une SEP étaient les éléments recherchés afin de procéder secondairement à l'analyse statistique de la prévalence des deux maladies.
SEP : entre 3 et 5 fois plus de diabète
Chez les personnes atteintes de SEP, la prévalence du diabète s'est révélée trois fois supérieure à celle des membres de leur famille en bonne santé et cinq fois supérieure à la prévalence du diabète dans la population générale. Les mères des cas index avaient trois fois plus de risque d'être diabétiques que les femmes de la population générale et deux fois plus que les pères. Les cas index femmes (n = 750) avaient également une plus forte prévalence de diabète que leurs surs. L'âge au moment du diagnostic de la SEP et le sexe étaient, en revanche, non liés à la prévalence du diabète (d'où exclusion de ces critères dans l'analyse en régression logistique). Après analyse multivariée, la relation entre la SEP et le diabète en Sardaigne s'est confirmée : la présence d'un cas de SEP au sein d'une famille augmente le risque de diabète de type 1 (ratio de 3,41). Ce dernier est maximal (multiplié par 6) pour les personnes porteuses d'une SEP, dont un autre membre de la famille est également atteint, comparativement à la fratrie en bonne santé d'une personne atteinte de SEP.
Un résultat étonnant
« Un résultat étonnant, commente dans son éditorial un spécialiste d'une université de Seattle, car la prédisposition génétique connue dans la SEP protège du diabète de type 1,mais cette observation n'est pas entièrement nouvelle, et il existe des similitudes physiologiques évidentes entre le diabète de type 1 et la SEP. » Les deux affections sont en effet considérées comme des maladies auto-immunes mettant en jeu les lymphocytes T et conduisant, dans un cas, à la destruction de la myéline, dans l'autre, à celle des cellules bêta des îlots de Langerhans. « L'explication de cette particularité sarde se trouve dans l'haplotype de susceptibilité de la SEP, dit encore l'éditorialiste, qui n'est pas le même que celui des populations d'Europe du Nord préalablement décrit.L'haplotype le plus représentatif de la cohorte est-il aussi en cause dans la susceptibilité à d'autres maladies auto-immunes, telles que la maladie coeliaque, fréquente en Sardaigne ? Quelle est la part des facteurs liés au HLA et des facteurs non liés au HLA ? » De nombreuses réponses restent à trouver.
Maria Giovanna Marrosu et coll., « The Lancet », vol. 359, 27 avril 2002.
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