Si l'on se fie aux données relevées chez les indiens Pima, les enfants nés de mère dont le diabète de type 2 existait pendant la grossesse, ont eux-mêmes un risque majoré de diabète. D'autres travaux vont d'ailleurs dans la même direction. Mais l'apparition de l'affection métabolique est-elle liée à un facteur génétique transmis par la mère ou à l'exposition au diabète in utero ? La seconde piste est tout à fait vraisemblable, révèle l'équipe de Jean-François Gautier (CIC/INSERM, hôpital Saint-Louis, Paris) dans le « Lancet ».
Pour arriver à cette conclusion, les chercheurs français ont dû faire preuve d'ingéniosité : exclure le facteur génétique de leur analyse et isoler le seul risque environnemental. L'équipe a examiné les dossiers de 352 adultes diabétiques de type 1 afin d'identifier des descendants (fils ou fille), dont un seul des deux parents était atteint, avant sa naissance. Ainsi 15 enfants (âge moyen : 24 ans) ont pu être étudiés, nés d'une mère sous insuline pendant sa grossesse. L'astuce pour éliminer le facteur génétique a été de les confronter à 16 rejetons (âge moyen : 22,7 ans) de père diabétique de type 1. Ces descendants au même risque que les autres de porter des gènes de susceptibilité sont indemnes de l'exposition intra-utérine.
Les marqueurs prédictifs du risque de diabète de type 2 ont été évalués chez les 31 sujets : sensibilité à l'insuline et insulinosécrétion en réponse à l'injection I. V. et à la prise orale de glucose, pourcentage de masse grasse. S'y est ajouté le dosage du polypeptide pancréatique, marqueur de la commande parasympathique du pancréas.
Une tolérance au glucose anormale
Les scientifiques français n'ont enregistré aucune différence entre les deux groupes en ce qui concerne le pourcentage de masse grasse et la sensibilité à l'insuline. En revanche, 5 des 15 sujets exposés in utero, mais aucun témoin, avaient une tolérance au glucose anormale (p = 0,02). Ce que démontrent les chiffres. L'insulinosécrétion précoce, après une charge orale en glucose, était de de 8,6 UI/mmol pour les 5 sujets concernés, 14,2 pour les 10 autres du même groupe et 17,7 chez ceux nés de père diabétique. Après charge I. V. en glucose, la sécrétion moyenne d'insuline était, dans ces trois groupes, respectivement de 4,7 ; 5,5 et 7,5 pmol/kg/min.
L'aire sous la courbe du polypeptide pancréatique, 2 heures après la charge orale en glucose, était de 1 007 chez les 5 sujets intolérants au glucose, de 2 829 chez les 10 personnes tolérantes au glucose et de 3 224 chez les 16 contrôles.
L'origine génétique du trouble de la tolérance étant exclue, le rôle de « l'exposition in utero à un environnement diabétique est associé à une sécrétion d'insuline défectueuse, facteur métabolique prédictif du diabète de type 2 », concluent les chercheurs.
Parmi les mécanismes physiologiques explicatifs, les chercheurs évoquent un possible dysfonctionnement parasympathique. Ce que corrobore la baisse du taux de polypeptide pancréatique.
« Lancet » vol. 361, 31 mai 2003, pp. 1839-1840 (éditorial) et 1861-1865.
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