Parmi les femmes prédisposées génétiquement au cancer du sein, certaines auront la maladie, d'autres non. De nombreuses études épidémiologiques cherchent à identifier les facteurs endogènes ou exogènes qui augmentent le risque de cancer chez ces sujets. Le rôle des expositions cumulatives excessives aux hormones ovariennes dans la progression du cancer du sein a déjà été suggéré, mais il reste à préciser dans le cas des femmes à forte prédisposition génétique.
Des paires de jumelles
Dans cette optique, Hamilton et Mack (Keck Scholl of Medicine, Los Angeles) ont étudié une cohorte de paires de jumelles dans lesquelles au moins une des surs a développé un cancer du sein. Leurs conclusions révèlent que les expositions hormonales ayant lieu au cours de la puberté, et non pas les expositions hormonales cumulées tout au long de la vie, pourraient jouer un rôle dans le déclenchement de la cancérogenèse chez certaines femmes génétiquement prédisposées au cancer du sein.
Hamilton et Mack ont réalisé une analyse multifactorielle complexe à partir d'une cohorte de 1 811 paires de jumelles (759 dizygotes et 1 052 monozygotes). Les jumelles ont été classées dans différentes catégories en fonction de la nature de leur prédisposition génétique au cancer du sein.
Pour ce classement, aucun génotypage n'a été réalisé : les auteurs ont simplement estimé que, lorsqu'un cancer survenait chez deux jumelles, la maladie était a priori héréditaire. En revanche, lorsque la maladie n'était survenue que chez l'une des deux surs, les auteurs ont considéré que le cancer avait toutes les chances d'être apparu de manière sporadique. Ils ont cependant tenu compte de l'histoire familiale et de l'éventuelle bilatéralité du cancer dans le cas d'une non-concordance de la maladie chez les jumelles.
Dans le groupe des jumelles à forte prédisposition génétique au cancer du sein chez lesquelles la maladie a touché les deux surs, il est apparu que la jumelle chez laquelle la puberté a commencé le plus tôt est généralement celle chez qui le cancer est diagnostiqué le plus précocement. Cette corrélation, très forte chez les couples de jumelles monozygotes, est plus faible chez les dizygotes.
Par ailleurs, les auteurs ont pu observer que, dans les couples de jumelles à forte prédisposition génétique à la maladie, et chez lesquels la maladie n'a été diagnostiquée que chez une des deux surs, la précocité de la puberté est fortement associée avec le développement du cancer.
Deux voies, deux génotypes
C'est seulement en étudiant les paires de jumelles à faible prédisposition génétique au cancer du sein que les auteurs ont pu observer un effet de l'exposition cumulative aux hormones ovariennes sur la survenue de la maladie.
Ainsi, pour Hamilton et Mack, il existe deux voies conduisant à l'apparition du cancer du sein : une voie influencée par une forte prédisposition génétique et une exposition aux hormones ovariennes précoces, au moment de l'adolescence ; et une voie qui concerne les femmes non génétiquement prédisposées à ce cancer et qui dépend de l'exposition cumulative aux hormones ovariennes après la puberté (grossesse, âge de la ménopause...). Ces deux voies reflètent certainement deux types de génotypes qu'il reste à identifier.
A. S. Hamilton et T. M. Mack, « NEJM» du 5 juin 2003, pp. 2313-2322.
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