DE NOTRE CORRESPONDANTE
TOUT EN APPLIQUANT localement les différents plans nationaux prévus par la loi de santé publique du 9 août 2004, chaque région devrait mettre en œuvre des programmes adaptés à ses besoins particuliers en matière de santé publique. Pour cela, la Drass Paca a dressé un état des lieux chiffré et procédé à la consultation de ses différents partenaires institutionnels et des intervenants de terrain dans chacun des vingt-cinq « territoires de proximité » découpés par le nouveau schéma régional d'organisation sanitaire (Sros).
De cette vaste consultation, il ressort qu'il est bien difficile de maintenir la santé physique et mentale de populations de plus en plus précarisées. La région Paca compte en effet deux fois plus de Rmistes pour mille habitants que l'ensemble du pays. « Avant de parler santé, il faut résoudre d'autres problèmes », disent en substance les professionnels et les bénévoles sanitaires et sociaux, qui évoquent les logements insalubres, la mauvaise alimentation, la souffrance psychique, la violence et les conduites à risque liées aux conditions de vie. Beaucoup dénoncent aussi les difficultés d'accès aux soins pour les personnes les plus fragiles, et particulièrement aux soins dentaires : trop de dentistes refusent de recevoir les bénéficiaires de la CMU.
Beaucoup de besoins, pas assez de moyens.
Dans le cadre de la préparation de ce plan régional, des ateliers santé ont été organisés dans les six grandes villes des Bouches-du-Rhône, et leur bilan confirme les constats des consultations locales : les professionnels soulignent les problèmes de santé liés à des conditions de vie difficiles, signalent les résurgences de tuberculose, le saturnisme, la difficulté de suivi des grossesses et de prise en charge des troubles du comportement et du langage des enfants, en raison notamment des délais importants d'attente dans les centres médico-psychologiques.
Le manque de médecins, d'infirmières et de psychologues scolaires, qui empêche une démarche de prévention digne de ce nom a également été souligné. Le directeur du CHU de Nice a pour sa part relevé la contradiction entre la demande aux acteurs de santé de s'engager dans la prévention et la nouvelle tarification des hôpitaux à l'activité, qui ne prend pas en compte cette dimension.
Ce constat est aggravé par le vieillissement de la population dans une région qui développe davantage les infrastructures touristiques que gériatriques et où l'on constate de grandes disparités d'offres de soins entre les villes de la côte et l'arrière-pays. A quoi s'ajoute un taux de cancers, et notamment de cancers professionnels, souvent révélés après l'âge de la retraite, particulièrement élevé (voir encadré).
Pour tous ces maux, la Drass fait des propositions, avec trois grandes priorités : meilleure prise en charge de la souffrance psychique, du vieillissement et de la précarité. Elle cite aussi la nécessité d'agir sur les comportements individuels face au tabagisme, à l'alcool, à la violence, aux conduites addictives et au VIH, le soutien à la parentalité, l'amélioration de l'accès aux soins de proximité et une meilleure prise en compte des situations d'urgence et de précarité. Avec une recommandation : « Anticiper la crise et développer une culture du risque par la formation et l'information. » Des mots qui risquent de sonner creux s'ils ne s'appuient pas sur le financement de réalisations concrètes. Or, le directeur de la Drass a d'ores et déjà indiqué que les priorités devraient « tenir compte des ressources et des moyens disponibles ».
La région fait cavalier seul
Le conseil régional Paca a refusé d'entrer dans le groupement régional de santé publique institué par la loi d'août 2004 pour décliner sur le terrain les priorités nationales. Elle entend notamment protester contre le « flou » de la loi et le manque de moyens qui lui sont donnés en matière de formation des professionnels de santé et des travailleurs sociaux, seul domaine de compétence-santé délégué aux régions.
En revanche, la région Paca va au-delà de ses compétences et dotations de décentralisation pour répondre à un besoin de santé particulièrement aigu : la prévention des risques du travail. Elle s'appuie en cela sur l'expérience menée depuis de nombreuses années par le centre de santé mutualiste de Port-de-Bouc (Bouches-du-Rhône), qui recense les postes à risque des entreprises de pétrochimie voisines. Les médecins peuvent s'y référer pour le dépistage et la prise en charge de salariés ou d'anciens salariés de ces entreprises. Sur 2 500 personnes exposées qui ont consulté depuis 1995, 500 cas de maladies professionnelles, dont une soixantaine de cancers, ont été reconnus. Peu à peu généralisée, cette « cartographie des risques » est en train d'être étendue aux entreprises à risque d'Avignon, Toulon et la vallée de l'Huveaune, près de Marseille, en collaboration avec l'observatoire régional de la santé.
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