Pouvoir d’achat : pas de surprise

Publié le 29/06/2012
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Crédit photo : AFP

L’OPINION croyait-elle que la tourmente qui a dévasté l’Irlande, emporté la Grèce, secoué l’Espagne et le Portugal s’arrêterait à nos frontières ? La baisse attendue du pouvoir d’achat en France n’est que la conséquence logique du plan de réduction des déficits publics engagé il y a à peu près un an par le gouvernement Fillon. Nous l’avons répété à satiété : le recours à l’emprunt étant devenu prohibitif, la diminution de la dépense publique est désormais l’instrument unique du redressement de nos comptes. Le gouvernement de Jean-Marc Ayrault estime que les perspectives annoncées par l’INSEE justifient a posteriori les mesures qu’il vient de prendre : retour de la retraite à 60 ans pour ceux qui ont commencé à travailler tôt, hausse de l’allocation de rentrée scolaire pour les familles, hausse du SMIC de 2 %. Ces décisions auront pour effet à très court terme d’atténuer les effets de la crise sur le consommateur. Elles sont néanmoins en contradiction absolue avec l’effort exigé des Français en les mettant partiellement à l’abri du sacrifice. Le pouvoir raconte une fiction : les hausses des prélèvements obligatoires atteindront tout le monde, riches et pauvres compris, même si les premiers souffriront moins que les derniers.

Une goutte d’eau

On observe même, dans le cas du régime de retraites, une sorte de raisonnement absurde : la hausse de 0,5 % des prélèvements sociaux (qui financera la retraite à 60 ans et, d’ailleurs, se traduira, pour les cotisants, par une baisse de leur pouvoir d’achat) rapportera plus, dit-on, que ce que coûte la mesure. Elle produirait un excédent de quelque 460 millions. Hélas ! C’est une goutte d’eau par rapport aux 6 milliards d’euros de déficit prévu du régime général des retraites en 2012.

Lors de la première crise financière, celle de 2008, un journaliste américain demandait à Christine Lagarde, alors ministre de l’Économie, pourquoi la France résistait mieux au choc des subprimes que le reste de l’Europe. Elle invoqua le puissant amortissement du « filet social ». En réalité, pour faire face aux effets délétères de la crise, le gouvernement Fillon a emprunté massivement sur les marchés et augmenté la dette nationale de quelque 500 milliards, ce qui a permis de maintenir les prestations sociales. C’est quand l’endettement a menacé de couler le pays qu’il s’est ravisé et a commencé à faire des économies. Aujourd’hui, le gouvernement de la gauche refuse avec obstination de se tourner vers la seule réduction des dépenses, en prévoit de nouvelles et augmente les prélèvements sociaux alors que leur taux, à plus de 45 % du PIB, est l’un des plus élevés d’Europe. Cette course à la dépense assortie de taxes supplémentaires n’est pas sans rappeler le credo démocrate aux États-Unis : spend, spend, tax, tax. Sauf que nous n’avons pas la croissance qui nous permettrait de redistribuer les revenus.

Non seulement le pouvoir d’achat va baisser en France, mais la consommation va entrer dans un cercle vicieux. Les Français, en effet, sont peu désireux de puiser dans leur épargne pour combler leur manque à gagner. Effarés par le niveau des prélèvements obligatoires, ils veulent garder de l’argent pour faire face à une maladie ou à une retraite insuffisante, ou simplement pour payer les impôts nouveaux qui toucheront ceux qui ont pu épargner. En vérité, il était temps d’adopter un moratoire sur les impôts et cotisations en attendant une réforme fiscale qui aurait amélioré un système injuste. On fait exactement le contraire.

RICHARD LISCIA

Source : lequotidiendumedecin.fr