Pendant les quarante minutes de plaidoiries des deux parties en présence, le Dr Didier Poupardin n’a pas bronché. Il est resté debout, digne mais légèrement voûté, son manteau à la main, aux côtés de son avocate Me Carole Yturbide. Le Tribunal des affaires sociales de sécurité sociale (TASS) jugeait ce mercredi après-midi le médecin généraliste de Vitry-sur-Seine, aujourd’hui à la retraite, pour non-respect de l’ordonnancier bizone.
Dans la salle surchauffée, bien trop petite pour accueillir les nombreux soutiens du médecin (amis, syndicats, politiques, associations de gauche), le report de la décision au 24 octobre (en délibéré) a bien moins agacé que le réquisitoire de l’avocate de la Caisse du Val-de-Marne, contre qui se bat le Dr Poupardin depuis 2009. La Sécu reproche en effet au médecin d’avoir rédigé entre 2007 et 2008 des ordonnances non-conformes à la législation, sans différencier les molécules prescrites dans le cadre d’une affection longue durée (ALD) des prescriptions « classiques ».
2 612 euros réclamés au médecin
Pour les 38 « anomalies » confirmées (il y en avait 51 au début du procès) par un récent rapport d’expertise, la Sécu réclame au Dr Poupardin 2 612 euros et une pénalité de 4 000 euros. Au vu de ce « rapport défavorable », « la caisse a eu tout à fait raison de venir devant vous réclamer ce remboursement », a affirmé Me Rachel Lefebvre sous les grondements de la salle, avant de demander « l’application stricte de la législation ». « Ici, ce n’est pas un lieu pour faire un débat politique et social », a-t-elle encore lancé, finissant d’enflammer l’auditoire. Évoquant la « cabale » subie par son client, Me Yturbide a répliqué en demandant que la CPAM soit déboutée et qu’une nouvelle expertise soit lancée.
Une action « scandaleuse » et « grotesque »
Dans la salle, l’audience a beau être terminée, personne ne semble pressé de sortir. Pour Raymonde Motte, qui a rencontré le Dr Pourpardin il y a plus de dix ans au bureau départemental du Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (MRAP), cette action en justice est « scandaleuse ». « On lui reproche de voir le patient dans sa totalité, dans son humanité, quand on y pense, c’est grotesque », explique-t-elle.
Le Dr Jean-Paul Hamon, président de la Fédération des médecins de France, dénonce quant à lui une « chasse aux sorcières ». Jean-Marc Bourjac, soutien plus surprenant de par son statut de président honoraire de la CPAM du Val-de-Marne (et maire-adjoint de Vitry), reproche à la caisse son « manque d’ouverture d’esprit ».
Appel à la relaxe
Ici et là, plusieurs voix réclament en vain « la relaxe » du Dr Poupardin. Le principal intéressé, stoïque, semble à mille lieux de toute cette agitation. Est-il inquiet pour l’avenir ? Il se dit en tout cas « peu surpris » du réquisitoire de la CPAM à son encontre. « L’expertise médicale, menée par le vice-président de l’Ordre de Paris, m’était a priori défavorable. J’ai fait mon travail de médecin en remettant en question la pertinence de l’ordonnancier bizone dans notre exercice. La suite n’est plus de mon ressort. »
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