Le Pr Michel Kazatchkine, nouveau directeur exécutif

Pourquoi le Fonds est unique

Publié le 12/02/2007
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CRAVATE VERTE, élégant dans son costume sombre, il est arrivé tout sourire dans les locaux de l’Anrs (Agence nationale de recherches sur le sida et les hépatites virales). A peine de retour de Genève, c’est donc à l’Agence, dont il fut le directeur pendant sept ans (1998-2005), que le nouveau directeur exécutif du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, qu’il a consacré sa première visite, y recevant un hommage appuyé.

Et c’est en ami que le Pr Jean-François Delfraissy l’accueille et le félicite «avec chaleur et même avec une certaine forme de tendresse». Avant cela, il a salué «la juste reconnaissance d’un parcours sans faute. Son engagement professionnel et humain en faveur des personnes atteintes, au Nord comme au Sud, est un exemple pour les médecins et les chercheurs que nous sommes».

Le nouveau directeur du Fonds se dit fier d’avoir reçu, en plus du soutien officiel du président de la République et de la diplomatie française, celui «du réseau d’amis, de collègues, singulièrement ceux de l’Anrs, des associations et de toute la communauté qui depuis des années lutte contre le sida dans notre pays et dans les pays en développement». Après une élection longue et difficile, il tient à souligner combien l’institution dont il prend la tête est devenue depuis quelques années sa «passion», une passion à laquelle «j’espère donner le maximum de moi-même dans les prochaines années», poursuit-il. Le Fonds, insiste-t-il, est unique, d’abord par sa taille et son ampleur. Multilatéral, il rassemble toute la communauté internationale avec pour objectif de démontrer que l’on peut avoir un impact sur les épidémies. «Make the difference», tel est son slogan.

Légitimité internationale.

La deuxième spécificité du Fonds est sa légitimité internationale. Son mécanisme de fonctionnement original, notamment au niveau de son conseil d’administration, où donateurs et bénéfi- ciaires sont représentés à parts égales, en fait un exemple. «Celui qui représente les personnes vivant avec la maladie a le même poids au vote du conseil d’administration du fonds mondial que les Etats-Unis d’Amérique, qui apportent 750millions de dollars en 2007», explique le Pr Kazatchkine. Un nouveau type de gouvernance internationale qui, espère-t-il, fera des émules, à l’heure où l’on parle de construire une Agence de l’environnement.

La troisième spécificité du Fonds est d’avoir révolutionné l’aide au développement : ce sont les pays bénéficiaires (gouvernement, secteur privé, société civile, malades) qui construisent eux-mêmes leurs programmes et les soumettent au Fonds. Environ 40 % de ces programmes sont approuvés et financés chaque année. En cinq ans, le Fonds s’est engagé à hauteur de 7 milliards de dollars pour 440 programmes dans 136 pays du monde, soit la plupart des 139 pays éligibles, pays pauvres ou émergents.

Cependant, en dépit de cette réussite, beaucoup reste à faire. En particulier, pour atteindre les objectifs du millénaire d’ici à 2015, de 8 à 10 milliards de dollars par an seront nécessaires. Or, actuellement, le budget du Fonds n’est que de 2 milliards de dollars par an. La prochaine réunion de constitution des ressources du Fonds pour la période 2008-2010 devrait débuter en mars prochain. «Nous devons fixer un objectif fort, de 4 à 6milliards par an dans les toutes prochaines années, c’est-à-dire que nous devons doubler, voire tripler, la capacité du Fonds», souligne Michel Kazatchkine. Un objectif qui conduira probablement son futur directeur, lequel devrait prendre ses fonctions en mars-avril, à revoir le mode de travail. C’est une des priorités qu’il s’est fixées dans les prochains mois. La pérennisation des ressources et le renforcement des liens avec Unitaid figurent aussi parmi ses objectifs.

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> LUTTE CONTRE LE SIDA, LA TUBERCULOSE ET LA PALUDISME : le Pr Kazatchkine à la tête du Fonds (12/02/07)

> Dr LYDIA ARCHIMÈDE

Source : lequotidiendumedecin.fr: 8104