PAR LES Drs FABRICE MICHEL et MARC LEONE et LE Pr CLAUDE MARTIN*
LES EFFETS pharmacologiques de la dopamine sont dose-dépendants. A moins de 5 µg/kg/min, ils se traduisent par une vasodilatation par action sur les récepteurs DA1 et DA2 rénaux, mésentériques et coronaires. Elle entraîne une augmentation de la filtration glomérulaire, du débit sanguin rénal et de l'excrétion de sodium (1). Entre 5 et 10 µg/kg/min, la dopamine agit sur les récepteurs bêta 1-adrénergiques. Elle augmente la contractilité myocardique et la fréquence cardiaque.
Au-delà de 10 µg/kg/min, la dopamine stimule les récepteurs alpha 1-adrénergiques, ce qui provoque une vasoconstriction artérielle et une augmentation de la pression sanguine. La dopamine permet d'augmenter la pression artérielle moyenne, chez des patients présentant une hypotension persistante après optimisation de la volémie par augmentation du volume d'éjection systolique, et la fréquence cardiaque (2, 3). La dose moyenne de dopamine nécessaire pour restaurer la pression sanguine était de 15 µg/kg/min. La dopamine peut améliorer la contractilité du ventricule droit des patients qui présentent une défaillance ventriculaire droite. Au-delà de 20 µg/kg/min peut apparaître une augmentation des pressions des cavités cardiaques droites.
La noradrénaline.
Agoniste alpha-adrénergique puissant, la noradrénaline a des effets agonistes bêta-adrénergiques moins prononcés. Les doses de noradrénaline employées varient en moyenne de 0,2 à 1,3 µg/kg/min. La posologie initialement utilisée peut être de 0,01 µg/kg/min et la posologie la plus élevée rapportée dans la littérature est de 3,3 µg/kg/min (4). Ainsi, de fortes doses de noradrénaline peuvent être nécessaires pour traiter les patients en choc septique. Cela est peut-être secondaire à un phénomène de désensibilisation avec internalisation des récepteurs alpha-adrénergiques (5). La noradrénaline augmente la PAM par ses effets vasoconstricteurs avec peu de modification de la fréquence cardiaque ou du débit cardiaque. Une augmentation du débit cardiaque de 10 à 20 % et une augmentation du volume d'éjection de 10 à 15 % ont été observées (3, 4). La noradrénaline augmente la filtration glomérulaire par augmentation des résistances des artérioles rénales (3). Comparativement à la dopamine, la noradrénaline dans le traitement du choc septique s'est montrée plus efficace pour améliorer le débit urinaire, la clairance de la créatinine et la clairance osmolaire (4, 6). L'adjonction de dobutamine à la noradrénaline permet d'augmenter de 20 % l'index cardiaque des patients en choc septique avec une augmentation du flux sanguin et de la consommation en oxygène splanchnique, accompagnées d'une amélioration de l'activité métabolique au niveau hépatique (7).
L'adrénaline.
Chez les patients en défaillance hémodynamique qui ne répondent ni à l'expansion volémique ni à l'administration de catécholamines habituelles, l'adrénaline peut améliorer les paramètres hémodynamiques. L'adrénaline élève la PAM en augmentant l'index cardiaque par augmentation du volume d'éjection avec un effet plus modéré sur les résistances vasculaires systémiques et sur la fréquence cardiaque (8).
L'adrénaline diminue le débit sanguin splanchnique qui peut potentiellement être abaissé par l'ajout de dobutamine.
L'adrénaline est responsable d'une augmentation de la fréquence cardiaque des patients en choc septique sans augmentation significative du taux d'ischémie myocardique ou d'arythmie à l'électrocardiogramme. Les effets de l'adrénaline sur les pressions de l'artère pulmonaire ou sur les résistances vasculaires systémiques sont minimes aux cours du sepsis (8). L'association noradrénaline-dobutamine n'a pas montré de supériorité sur l'adrénaline.
Vasopressine, terlipressine.
La vasopressine (hormone antidiurétique) et son analogue, la terlipressine sont des molécules dont l'action vasoconstrictrice est médiée par des récepteurs spécifique V1. Elles ont permis de restaurer l'hémodynamique dans le choc septique chez des patients chez lesquels les amines étaient inefficaces (9, 10). Les deux molécules diffèrent par leur durée d'action, beaucoup plus prolongée pour la terlipressine (6 heures contre 10 minutes).
Le puissant effet vasoconstricteur de ces molécules peut être responsable d'effets secondaires délétères dans l'état de choc (baisse du débit cardiaque, phénomènes ischémiques). Leur action sur la perfusion splanchnique reste débattue. L'utilisation de la vasopressine se fait en perfusion continue (doses recommandées de 0,01 à 0,04 UI/min), alors que la terlipressine a été proposée, soit en bolus (de 1 à 2 mg à renouveler toutes les 6 heures si nécessaire), soit en perfusion continue.
L'optimisation de la pression de perfusion d'organe est un objectif important à atteindre durant le traitement du choc septique. Une utilisation adéquate des agents vasopresseurs peut permettre de restaurer le flux sanguin des organes si l'expansion volémique a été préalablement correctement effectuée. Les amines vasopressives sont le traitement clé de la défaillance hémodynamique des patients en choc septique, elles peuvent éventuellement être associées à un agent inotrope tel que la dobutamine.
* Département d'anesthésie et de réanimation et centre de traumatologie, hôpital Nord, Marseille.
(1) Hoogenberg K, Smit AJ, Girbes AR. Effects of low-dose dopamine on renal and systemic hemodynamics during incremental norepinephrine infusion in healthy volunteers. Crit Care Med 1998;26(2):260-5.
(2) Marik PE, Mohedin M. The contrasting effects of dopamine and norepinephrine on systemic and splanchnic oxygen utilization in hyperdynamic sepsis. Jama 1994;272(17):1354-7.
(3) Martin C, Papazian L, Perrin G, Saux P, Gouin F. Norepinephrine or dopamine for the treatment of hyperdynamic septic shock? Chest 1993;103(6):1826-31.
(4) Martin C, Eon B, Saux P, Aknin P, Gouin F. Renal effects of norepinephrine used to treat septic shock patients. Crit Care Med 1990;18(3):282-5.
(5) Chernow B, Roth BL. Pharmacologic manipulation of the peripheral vasculature in shock: clinical and experimental approaches. Circ Shock 1986;18(2):141-55.
(6) Redl-Wenzl EM, Armbruster C, Edelmann G, Fischl E, Kolacny M, Wechsler-Fordos A et coll. The effects of norepinephrine on hemodynamics and renal function in severe septic shock states. Intensive Care Med 1993;19(3):151-4.
(7) Reinelt H, Radermacher P, Fischer G, Geisser W, Wachter U, Wiedeck H et coll. Effects of a dobutamine-induced increase in splanchnic blood flow on hepatic metabolic activity in patients with septic shock. Anesthesiology 1997;86(4):818-24.
(8) Moran JL, O'Fathartaigh MS, Peisach AR, Chapman MJ, Leppard P. Epinephrine as an inotropic agent in septic shock: a dose-profile analysis. Crit Care Med 1993;21(1):70-7.
(9) Albanese J, Leone M, Delmas A, Martin C. Terlipressin or norepinephrine in hyperdynamic septic shock: a prospective, randomized study. Crit Care Med 2005;33(9):1897-902.
(10) Dunser MW, Mayr AJ, Ulmer H, Knotzer H, Sumann G, Pajk W et coll. Arginine vasopressin in advanced vasodilatory shock: a prospective, randomized, controlled study. Circulation 2003;107(18):2313-9.
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