D EPUIS des années, la prison, avec ses pratiques sexuelles non protégées, ses injections de produits psychoactifs et ses tatouages réalisés dans les pires conditions, est le lieu de tous les dangers pour la santé.
Certes, des actions de prévention pour écarter les contaminations en tous genres existent depuis 1985 et ont été renforcées en 1994, avec la réforme de la prise en charge de la santé en milieu pénitentiaire. Mais les mesures préconisées sont insuffisamment connues, pas toujours effectives et parfois pas assez efficaces, constatent les auteurs d'une enquête demandée par les pouvoirs publics, remise récemment à Bernard Kouchner et Marylise Lebranchu, garde des Sceaux.
Dans les prisons, les prévalences du VIH et du VHC sont respectivement de 3 à 4 fois et de 4 à 5 fois supérieures à celles du milieu libre. Les régions les plus touchées, à l'instar de ce qui est observé au sein de la population générale, sont l'Ile-de-France, Provence-Alpes-Côte d'Azur et les départements d'Outre-mer. Bien sûr, cette situation est à mettre en relation avec la forte proportion d'usagers de drogues par voie intraveineuse incarcérés. En outre, les pratiques sexuelles, contraintes, consenties ou prétendument consenties semblent nombreuses, et l'utilisation du préservatif « est peu fréquente ».
Le partage de matériel, rasoirs ou brosses à dents, constaté par la mission d'enquête, constitue également un mode de transmission possible des infections, principalement du virus de l'hépatite C.
Or, les dispositifs de prévention mis en uvre depuis plus de 15 ans sont largement insuffisants, qu'il s'agisse de l'éducation pour la santé, de la formation des personnels pénitentiaires, de la prise en charge de la toxicomanie ou encore du dépistage et de la vaccination. Environ la moitié des personnes incarcérées n'a jamais eu de dépistage du VIH ; pour le VHC, c'est encore moins fréquent ; et, en ce qui concerne le VHB, la plupart n'ont pas eu recours à la vaccination ou n'ont pas reçu toutes les injections utiles.
Dépistage et vaccination
C'est pourquoi la Mission Santé-Justice demande, en tout premier lieu à « inciter davantage aux dépistages des différents virus et à la vaccination contre le VHB ». Elle conseille de mettre en place une consultation de dépistage et de prévention annuelle pour chaque prisonnier. En outre, il faut faciliter le développement des traitements prophylactiques. Il faut par exemple sensibiliser le personnel d'encadrement « aux procédures à appliquer à la suite d'une exposition au sang ». Pour les usagers de drogues par voie injectable, il faut diffuser plus largement le protocole d'utilisation de l'eau de Javel à des fins de décontamination. De même, il est impératif de rendre plus accessibles les traitements de substitution et les préservatifs avec du lubrifiant. Mais la mise en place de programmes expérimentaux d'échange de seringues est jugée « prématurée ».
Il ne peut donc pas y avoir de réduction des risques sans que « des progrès ne soient rapidement enregistrés en matière d'hygiène individuelle et collective, de restauration et d'équipement des cellules ». Enfin, la mise en place, à l'essai, d'« unités de vie familiales » devrait permettre de « restaurer les prisonniers dans leur vie affective et, pour les hommes, dans leur identité virile ».
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature