DE NOTRE CORRESPONDANTE
ICI, NI BLOUSE blanche ni odeur d'hôpital. Les médecins de ResAdo 82, qui accompagnent des adolescents entre 12 et 21 ans en difficulté, ont volontairement installé leurs bureaux dans un lieu neutre, en plein centre-ville de Montauban. Pourtant, leur mission est bien d'accompagner des ados malades. «Le constat était récurrent: chaque année, une vingtaine d'adolescents en proie à des difficultés psychiques (troubles du comportement, pathologies de l'agir, psychoses, états limites…) ne trouvaient aucune solution dans les structures habituelles, c'est pourquoi ResAdo 82 a vu le jour», raconte Séverine Pavoine, la pédopsychiatre qui anime le réseau aux côtés de Valérie André, psychologue. «Notre mission était d'abord d'aller à la rencontre des institutions du département qui repèrent ces ados sur le terrain. Ce sont eux qui nous les adressent, désormais», expliquent-elles.
Direction de la solidarité départementale, foyer de l'enfance, instituts thérapeutiques éducatifs et pédagogiques, hôpital de Montauban, médecins de ville, protection judiciaire de la jeunesse… Tous ces professionnels travaillent donc ensemble pour accompagner ces jeunes, essayer de leur bâtir un projet individualisé et un parcours de soins. Depuis 2005, date de création du réseau, l'activité est montée en puissance. «Au début, nous tablions sur une trentaine de jeunes suivis chaque année, pour une durée moyenne de deux ans, explique Valérie André. Aujourd'hui, une soixantaine de dossiers sont ouverts et, en 2007, nous avons eu 26 nouveaux cas. Cela prouve que nous sommes repérés», estime-t-elle.
C'est à l'école, à l'hôpital, dans des institutions spécialisées ou, plus rarement, chez les médecins de ville que ces ados sont repérés. Le plus souvent pour des difficultés de comportement qui ne sont que la conséquence de troubles de santé non repérés. «Notre premier travail consiste donc à faire un tableau clinique du patient en présence de chacun des acteurs du réseau. Chacun raconte ce qu'il sait du jeune», explique le Dr Pavoine, qui rencontre ensuite le jeune et ses parents. Puis les choses se mettent en place en toute souplesse. Selon les cas, le jeune rencontre régulièrement les membres du réseau, ou au contraire ceux-ci n'interviennent qu'au second plan dans le cadre d'un travail de guidance. Bien souvent, les jeunes qui sont suivis ont des problèmes lourds, traînés depuis l'enfance. C'est le cas de Virgile, 16 ans aujourd'hui, mais suivi plus ou moins régulièrement et repéré depuis l'âge de 3 ans pour des problèmes de violence physique et verbale. À l'approche de l'adolescence, il avait des idées suicidaires, des troubles de l'anxiété, se mettait en danger. Il a été suivi par le Dr Pavoine pendant plusieurs mois, et a commencé à se soigner «Aujourd'hui, nous ne le voyons plus, mais nous continuons à le suivre à distance grâce au système de guidance. Il est en stage et cela se passe bien», raconte le médecin. Un psychanalyste extérieur intervient dans le processus. «Cette étape est indispensable pour nous, elle nous permet de repérer ce qui fait le ressort psychanalytique de l'histoire; de comprendre pourquoi l'histoire se répète, car ces ados sont souvent en difficulté depuis leur plus tendre enfance. Cela évite ainsi à toute l'équipe de reproduire les mêmes erreurs», souligne Séverine Pavoine.
Travail de fourmi.
La pédopsychiatre reconstitue aussi un dossier médical complet du patient qui retrace le fil de son histoire. «Un travail de fourmi, pour lequel je suis parfois amenée à recontacter des professionnels de santé qui ont croisé le patient dans son enfance. Il est indispensable pour nous de reconstituer ce fil car les consultations seules nous mettent en grande difficulté», explique-t-elle.
La constitution de ce dossier est rendue obligatoire par la loi de 2002 sur les réseaux de santé. Ce dossier confidentiel est consultable par le patient sur demande. C'est aussi un moyen pour l'association de constituer une base de données, de déterminer des profils pour ces jeunes en difficulté et donc d'améliorer le repérage à l'avenir.
Seul bémol dans l'action du réseau : le lien avec les généralistes du département, pour lequel ResAdo 82 reconnaît avoir quelques difficultés. «Le fossé s'est creusé, car les généralistes voient peu ces enfants. Mais nous souhaiterions travailler davantage avec eux à l'avenir, par le biais de la maison des ados (voir encadré). Nous envisageons aussi de proposer des formations ponctuelles spécifiques, à ceux qui sont spécialisés sur le suivi des adolescents et pour les impliquer davantage encore, leur proposer d'être les interlocuteurs privilégiés d'un ado du réseau», annonce Séverine Pavoine.
ResAdo 82, financé par le Fonds d'intervention de la qualité et du contrôle des soins de ville, est régulièrement évalué. Pour Daniel Hacpille, le président de l'association La Raison des ados, qui porte le réseau, le bilan est positif. «Nous sommes de plus en plus sollicités et surtout de plus en plus tôt. En 2007, la moitié des jeunes que nous avons accompagnés avaient moins de 15ans. C'est une évolution notable qui ne peut qu'améliorer la prise en charge», se félicite-t-il.
La maison des ados, un lieu unique
La maison des adolescents de Tarn-et-Garonne a ouvert ses portes à Montauban il y a quelques mois, elle aussi portée par l'association La Raison des ados. Ce pôle de ressources, d'actions et de prévention dans le domaine de la santé est ouvert à tous les adolescents. Six médecins généralistes y font régulièrement des vacations. La structure propose aussi une permanence téléphonique au service des généralistes du département. Elle est enfin une porte d'entrée pour repérer les ados en difficulté et les orienter vers ResAdo 82.
29 bis, faubourg du Moustier, 82000 Montauban. Permanence téléphonique, tél. 05.63.63.72.95.
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